Chapitre 36 : La lettre oubliée

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C'est le père d'Isaac qui débarque dans ma chambre. Je bondis alors de mon lit, je le regarde alors avec mes grands yeux marron. Jusqu'ici, je n'avais jamais eu d'explication de son geste. Un jour avant son enterrement, j'aurais peut-être des réponses à mes questions. Je n'arrive pas à comprendre pourquoi il a pris autant de temps pour me donner cette fameuse lettre.

« La voici. J'aurais dû te la donner depuis le début mais je l'avais perdue. »

Sa justification ne me convainc pas. Je prends la feuille de ses mains, puis voici ce que je lis.

« Bonjour ma fille. Si tu lis cette lettre, c'est que je ne suis plus là. J'espère que tu ne m'en voudras pas mais trop de soucis m'ont envahi l'esprit, et même mon cœur. Tu ne vas sûrement pas comprendre de quoi je parle mais je tenais à te le dire. Je suis un homme qui voulait juste être moi-même avec la personne que j'ai tant aimée mais on est dans une société où c'est mal vu. Je préfère partir en paix plutôt que d'être confronté au mal que j'ai fait. Des personnes vont s'occuper de toi, tu verras. On se retrouvera, j'en suis sûre. »

Assez étonnement, je ne pleure pas. Je relie cette feuille plusieurs fois, le père d'Isaac me regarde depuis un bon moment cherchant une réaction de ma part, il fut lui-même surpris.

« Bon, je vais te laisser te reposer. Je te souhaite une bonne nuit ! »

« Papa, tu fais quoi dans la chambre ? Vous parlez de quoi ? »

Isaac débarque. Il voit le mot, me regarde puis observe son père. Il ne comprend pas ce qu'il se passe. Son père lui explique la situation, il finit par comprendre.

« J'espère que tu vas bien. »

« Tu sais Isaac, on devrait la laisser souffler. »

Ils décident de partir. Je me mets la main sur mon visage, je crie intérieurement. J'ai juste envie de comprendre ce qu'il l'a poussée à commettre ce geste. Il ne me dit rien dans ce bout de chiffon. Il est parti comme ça, sans explications précises. Je n'ai plus de peine, mais de la colère. Il m'a laissée tomber. Je décide de me recoucher, la tête encore plus envahit d'idées négatives. Dommage qu'on soit jeudi, j'en aurais bien profité pour rester à la maison et me préparer le mental pour l'enterrement. Je sens la fatigue revenir à nouveau. Toute cette information m'a assommée. Je me dois de me reposer.

« DÉPÊCHE-TOI DE TE RÉVEILLER, TU VAS ARRIVER EN RETARD ! »

Le lendemain matin, je sens une main assez froide se poser sur mon épaule. Je n'ai même pas eu le temps de reprendre mes esprits qu'Isaac me hurle dessus et me secoue d'une force.

« Tu n'as pas besoin de me réveiller aussi brutalement ! »

« Ne te plains pas, si je ne l'avais pas fait, tu aurais manqué ton cours. »

Il n'a pas vraiment tort, je me lève difficilement. Je décide de me dépêcher d'aller me préparer. Je me rince le visage avec de l'eau tiède pour bien me réveiller puis je me brosse les dents. Pendant cette période dans la salle de bains, je commence à me rendre compte que ça y est, le dernier voyage de mon père est arrivé et pour le moment, je tiens le coup. Avant ça, je dois aller à l'école. Je n'ai pas vraiment le choix. Je retourne dans ma chambre, j'enfile les habits que je prends au hasard. Je n'aime pas vraiment faire ça, j'en arrive même à enfiler des chaussettes qui ne sont pas de la même couleur.

« Tiens, je t'ai noté l'adresse pour les funérailles, c'est à quatorze heures. »

C'est en plein après-midi, il va falloir que je m'absente. Ça tombe bien, je n'avais vraiment pas envie d'y aller après. Je remercie Isaac puis je me dirige vers l'école. Je regarde si le bus n'est pas encore passé, je me rends compte que si. Tant pis, je vais marcher, ça me fera du bien. Tellement la soirée d'hier m'a achevée, je n'ai même pas pris le temps de faire mon sac à dos correctement. Je vais aller en cours sans mes affaires. Je me demande ce qu'on a comme cours aujourd'hui, je regarde mon emploi du temps assez rapidement, et je me rends compte qu'on a cours d'anglais. Je me souviens de ce professeur qui était tellement beau qu'il méritait limite d'être mannequin. C'est d'ailleurs assez troublant qu'il m'ait reconnue. Je me demande s'il est au courant de l'enterrement de mon père. En y pensant, je n'ai même pas eu le temps de revoir les notions qu'on a vues la dernière fois. Je ne devrais pas vraiment m'inquiéter, j'ai de bonne base en anglais, je n'espère juste pas m'ennuyer d'autant plus qu'aujourd'hui je ne suis pas vraiment en forme.

J'approche de l'école en marchant assez tranquillement malgré mon retard. Je me dis que le professeur sera compréhensif. Le grillage est forcément fermé, je ne suis pas surprise. Je n'ai jamais été aussi à la bourre. Il y a une sonnette, je décide d'appuyer sur le bouton. Une sonnerie assez désagréable se met en place. J'en avais même oublié l'existence de ce bruit assez inaudible. Étant donné l'heure à laquelle je viens, je me rends compte qu'on ne va pas me répondre tout de suite. J'attends alors quelques secondes avant de recommencer.

« Oh, mais c'est bon ! Vous n'allez pas sonner plusieurs fois non plus ! Normalement, je n'ai pas le droit de vous ouvrir. Vous avez de la chance. Prochaine fois, vous retournerez chez vous. »

La responsable du lycée était de passage pour distribuer des documents au directeur. J'en ai vraiment de la chance. Si elle n'était pas passée par hasard, je serais resté là planté comme une débile.

« Qu'est-ce que vous attendez ? Dépêchez-vous, bon sang ! »

J'empresse le pas sous la pression de la responsable. Je fais semblant de marcher rapidement.

« Oh, mais ce n'est pas vrai ! Vous êtes combien à arriver en retard ? Dépêchez-vous ! »

J'entends encore une fois les grillages s'ouvrir, décidément, je ne suis pas la seule. Je regarde assez précipitamment le numéro de salle sur mon cahier quand j'entends une personne hurler mon prénom.

« ZYNEB ! Ils sont en train de faire en sorte qu'on ne s'adresse plus la parole. »

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