21 : En raison d'un sourire

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Je me traîne dans la rue. Chaque muscle me tire, chaque pas me fait esquisser une grimace. Ça faisait longtemps que je n'avais pas eu de telles courbatures. Mon corps est endurant, pourtant. Il fait nuit noire à Copenhague, preuve que l'automne s'installe, preuve également que mes journées d'entraînement sont beaucoup trop longues. Katrina me complimente sur mes progrès, apparemment, j'arrive de mieux en mieux à retrouver une émotion qui m'était tant caractéristique auparavant (quelle surprise !). Mais comme je bosse essentiellement sur le programme libre, plus long et rapportant le plus de points, celui qui change tout le classement aux jeux, Kat' est plus exigeante. Je répète encore et encore les figures potentielles que je veux inscrire au programme, sans que l'on s'entende vraiment sur celles dont j'ai les capacités de faire sans les rater, un subtil mélange de complexité et sécurité.

Je grimpe chacune des marches pour arriver au troisième étage comme si je gravissais l'Everest, en me reconnaissant des qualités de drama queen digne de Hans quand je me plains intérieurement de l'effort. Avec un bain chaud pour détendre les muscles, du gel de magnésium tartiné sur le corps, je m'en sortirai peut-être pour demain (rien n'est garanti, malheureusement).

— Je suis rentré, m'exclamé-je quand je débarque enfin chez moi.

Je vois dans le hall d'entrée les chaussures de Zihao. Enfin, je dois avouer qu'il a exporté ses habitudes culturelles puisque je me déchausse également, alors qu'auparavant, je devais faire face à son regard scandalisé quand j'osais garder mes baskets en rentrant chez moi.

— Je suis dans la salle de bain ! me répond sa voix, même si je l'avais deviné avec l'obscurité de l'appartement et les seuls traits de lumière qui passent sous la porte de cette dernière.

Je débarque dans la pièce, sans que finalement, notre relation nouvelle change quelque chose. Plus d'une fois, on s'était lavé dans les vestiaires communs, ou bien dans ma salle de bain, l'un utilisant la baignoire, l'autre la douche. Mais cette fois-ci, quand je découvre son corps nu dans la baignoire, quelques rares parties de son corps subtilement cachées par des nuages de mousse, j'avoue qu'une boule de désir prend de nouveau naissance dans mon bas ventre (à moins qu'une crampe ne se réveille, ce dont je doute fort).

— T'es rentré depuis longtemps ? lui demandé-je en ôtant mon sweat et mon t-shirt, avant de les lancer en boule dans la panière de linge sale.

— Une demi-heure, peut-être. J'étais même surpris d'être rentré avant toi.

— M'en parle pas, je ne me suis jamais autant entraîné. Katrina est devenue le double maléfique de Jones, ce n'est pas possible.

— C'est vrai que les coaches sont abonnés aux heures supplémentaires en ce moment, soupire Zihao. Je ne sais pas s'ils se rendent compte que le rythme est dur à tenir, alors que l'on a encore cinq mois avant les jeux.

— Pour que même toi te plaigne, les temps sont graves, me moqué-je.

Je m'assois sur le rebord de la baignoire fumante dans laquelle il est allongé, rehausse mon jogging et commence à défaire les bandages qui entourent mes pieds.

— Tes patins te blessent encore ?

— Ouais... Enfin, je m'en tirerais mieux si Katrina ne me faisait pas patiner autant... Je suis sûr qu'ils ont eu des directives d'Hans pour nous entraîner au maximum et qu'on se voit moins. Attends, même Ulrick était moins exigeant quand il était mon coach. Pour dire.

Zihao échappe un sourire, mais approuve :

— J'ai l'impression d'être revenu en Chine, parfois.

Si même lui a ce sentiment... Franchement, pour le flegmatique que je suis, c'est de la torture.

Je me fais surprendre par deux doigts de Zihao sur mon abdomen pour attirer mon attention. Le désir se ravive dans mon corps.

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