CHAPITRE QUATRE-VINGT-ONZE

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 Une semaine plus tard, je suis toujours dans ce foutu canapé vêtue des vêtements de Josh et d'une paire de sous-vêtements achetés dans un supermarché. Un paquet de biscuits à moitié entamé traîne à côté de moi ainsi qu'une bouteille d'eau vide. J'ai allumé la télévision mais je ne la regarde pas. Je fixe seulement un point à travers elle tout en m'exerçant à faire le vide dans ma tête.

Depuis plusieurs jours, je suis devenue une professionnelle dans ce domaine. Je peux rester immobile pendant des heures sans penser à rien. Je fixe le vide devant moi en me concentrant assez pour faire taire toutes mes émotions. Je ne réagis plus à aucun stimuli. Je crois que Josh commence réellement à s'inquiéter de mon état mais je n'arrive pas à m'en préoccuper plus que ça. J'ai passé des journées entières à m'entraîner à tout oublier et je commence à peine à approcher de mon but. Je ne veux plus rien ressentir, je ne veux plus avoir mal.

Avec un peu d'entraînement, je suis sûre de réussir à devenir un robot, un être dans la souffrance n'est plus un problème. Je ne veux pas ressentir le regret, la douleur et encore moins le manque de Cameron. Parce qu'il me manque tellement que j'en ai mal au ventre la plupart du temps. J'ai l'impression de mourir intérieurement chaque fois que je pense que je l'ai quitté. Je voudrais me foutre en l'air pour nous avoir fait autant de mal l'un à l'autre.

Alors, j'ai décidé de me transformer en automate pour ne plus avoir à souffrir. Je n'ai pas fait ce choix par gaieté de coeur mais il le fallait. J'allais devenir folle, complètement folle. Il fallait que je me soulage de ce poids trop lourd pour moi. Je ne pouvais pas continuer à me torturer l'esprit. Ça devait cesser à tout prix avant que je ne pète les plombs.

Prostrée sur le sofa, je ne réagis même pas lorsqu'on frappe à la porte de l'appartement de Josh. Je lève à peine les yeux vers lui pendant qu'il sort de la cuisine et se dirige vers la porte. J'ignore qui ça peut bien être mais je m'en fiche. Je ne veux voir personne.

Du coin de l'œil, je vois Josh ouvrir la porte et laisser entrer son visiteur. Je reconnais aussitôt la chevelure colorée de Violet, ma meilleure amie. Elle entre dans l'appartement en me cherchant tout de suite des yeux. Josh l'invite à rejoindre le salon où je suis affalée sur moi-même comme un légume. Je lève à peine les yeux vers elle en jonglant avec mon hôte qui me lance un regard désolé.

-Désolé, Em, me dit-il d'une voix usée. Je ne pouvais plus rester là à te voir dans cet état sans rien faire.

Je ne dis rien mais je ne lui en veux pas. Je sais que cette situation lui pèse beaucoup et je ne veux pas être un poids pour lui. Je n'ai pas envie d'affronter le regard de ma meilleure amie mais je ne veux pas être la cause d'une souffrance chez Josh. Il a été assez gentil et attentionné pour s'occuper de moi pendant plus d'une semaine. Il m'a soutenu sans que je n'ai besoin de lui demander. Je ne peux pas lui reprocher de demander de l'aide ailleurs. Il veut m'aider, il ne veut que mon bien.

Seulement, la présence de Violet ainsi que son regard compatissant me mettent mal à l'aise. Je me sens comme une moins que rien que ces amis ne savent plus gérer. A cet instant, je me vois comme un poids mort qu'ils seront incapables de faire remontrer à la surface.

-Salut, Beauté, me lance-t-elle en esquissant un sourire timide.

Aussitôt, je baisse les yeux sur mes mains froides.

-Josh m'a dit que tu étais là et que je pouvais peut-être t'aider. Je suis là pour toi, moi aussi, tu sais. Tu m'as manqué. Tu aurais dû me dire que tu étais ici.

-Désolé, réponds-je simplement.

-Ne le sois pas. J'aurai voulu que tu me dises que tu étais là, je te cherchai partout. Mais je ne t'en veux pas du tout. Je comprends. Tu avais besoin de rester à l'écart, de penser à toi, c'est tout à fait compréhensible.

THE WAY - L'INCERTITUDEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant