THE WAY - L'INCERTITUDE

CHAPITRE QUARANTE-ET-UN

-A plus, Em !

Depuis le trottoir, j'adresse un rapide signe de la main en guise d'au revoir aux filles et les regarde s'éloigner à bord de la voiture de Michelle. Je me force à ne pas avoir l'air trop presser et attend patiemment qu'elles aient tourné au bout de la rue pour foncer vers l'immeuble où nous habitons, Cam et moi.

Je suis impatiente de le retrouver. Je veux m'assurer qu'il va bien et que son entrevue avec sa mère s'est bien passé. Enfin, je ne suis pas sûre que tout puisse bien se passer entre eux avec tout ce qui est arrivé ces derniers temps. J'espère seulement que Cam n'est pas plus mal qu'il ne l'était avant. Je sais à quel point il souffre de cette situation. Il a énormément prit sur lui pour aller là-bas. Il l'a fait sous mon conseil. Je me sentirais responsable de son malheur si j'avais quelque chose est arrivé. Je ne pourrais m'empêcher de me sentir coupable car c'est en grande partie à cause de moi qu'il a accepté de la rencontrer. Je prie intérieurement pour que ce rendez-vous en tête-à-tête n'est pas été un échec.

C'est donc le coeur battant à toute allure que je monte dans l'ascenseur et atteint la porte de notre appartement.

Un silence glaçant m'accueille lorsque j'entre dans le loft. Le soleil filtre par les grandes baies vitrées du salon mais les lumières sont éteintes et les stores de la cuisine sont fermés. On entend rien, pas même les bruits de la rue. Ce vide me fait frissonner. J'ai tout de suite un mouvement pressentiment. Je n'aime pas ce calme qui est comme celui après la tempête. Pourtant, rien a été chamboulé dans l'appartement. Aucune lampe n'est cassé, la table n'a pas été retourné et rien ne traîne par terre.

Je peux au moins me satisfaire du fait que Cameron n'a visiblement pas passé ses nerfs sur notre mobilier. Je suppose que c'est bon signe.

Ne parle pas trop vite, Em.

Je fais quelques pas dans l'appartement et m'arrête net en découvrant Cameron assis autour du comptoir de la cuisine, le regard vide et un verre emplit d'un liquide ambré posé devant lui.

De l'alcool.

Je me fige alors qu'il lève les yeux vers moi.

Dans son regard, je détecte une douleur sourde qui me coupe le souffle. Son visage est livide et sa bouche blafarde. Il détourne vite les yeux et recommence à fixer le verre devant lui. Il frôle le verre du bout des doigts et laisse sa tête retomber légèrement en avant. J'avale difficilement ma salive en même temps que ses épaules s'affaissent lourdement vers le sol. Il est littéralement abattu.

Malgré la distance qui nous sépare, je ressens sa tristesse et ça me brise le coeur. J'ai l'impression que Cameron est en morceau et qu'il faut recoller le tout. Il me semble vide de toute expression, tout sentiment. Il est en train d'encaisser quelque chose dont je ne mesure pas encore la gravité.

Soudain, la voix rocailleuse de Cam brise le silence et mon coeur manque un battement.

-Je n'ai prit qu'un verre.

C'est donc bien de l'alcool. Du whisky sûrement.

J'ai le courage de l'approcher malgré son état préoccupant et vais me poster à quelques pas de lui près de l'îlot central.

-Où est la bouteille ? me risque-je à lui demander.

-A la poubelle.

Je hoche la tête.

Contrairement à ce qu'il semble croire, je ne lui en veux pas du tout. Je sais ce que j'avais dit à propos de l'alcool mais cette situation est particulièrement exceptionnelle. Cameron sort d'une épreuve très éprouvante. Je peux comprendre qu'il ne soit pas en état de jongler avec son addiction. S'il a besoin d'un verre, je ne veux pas être celle qu'il en empêchera. Il a sûrement dû traverser l'enfer en allant se confronter à sa mère. Je ne peux pas lui en vouloir d'avoir craquer pour un verre. En plus, ce n'est pas comme s'il était saoul ou qu'il avait bu la bouteille tout entière. Il a préféré la jeter à la poubelle pour se contenter d'un seul et unique verre. Je ne me sens pas la force de lui en tenir rigueur. Je n'en ai même pas envie. En fait, j'ai seulement envie de le réconforter.