21 MAI

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Dimanche. J'ai fait mon sac, aujourd'hui c'est décidé, je me casse d'ici. Peu importe que j'ai terminé ou pas cette pseudo cure de desintox censée m'aider à avancer dans la vie, rester où j'en étais me conviens très bien, on ne peut pas dire que j'ai quelque chose à perdre.

Il est à peine six heures du matin, personne n'est levé. Le jardin est désert, la balançoire grince à cause de la brise matinale, on se croirait dans un film d'horreur. J'escalade comme je peux le grillage et le portail en manquant de m'empaler le pied sur un pic métallique. Ça me fait bizarre de retrouver la ville, aussi déserte soit elle à cette heure ci.

Je traverse le parc, je ressemble à une clocharde et je suis certaine qu'un enfant aurait peur de moi s'il me croisait. La fontaine dégueule, j'ai presque envie d'aller me noyer dedans, dans l'eau que pisse l'angelot en bronze. Ce serait ironique de me retrouver là. Imaginez les gros titres, « Une jeune droguée se suicide dans la fontaine de l'ange », j'adorerais voir ça.

*

Il est sept heures, la maison est fermée à clé, ça me touche de voir que je suis si peu fréquentable pour ma mère qu'elle a fait changer les serrures. Je toque à la fenêtre de Théo, j'avoue que j'ai hésité entre ça et casser une vitre ou crever les pneus de la voiture de Julien. Je toque une fois de plus, encore une, encore une et encore une. À quoi ça sert de dormir les volets ouverts si c'est pour ne pas entendre quand quelqu'un toque à la fenêtre, ce gosse ferait mieux de se dépêcher de m'ouvrir s'il ne veut pas que je casse les carreaux de la cuisine avec un morceau de la caisse de notre cher et tendre beau père.

J'allume mon téléphone, l'écran est explosé depuis que je l'ai jeté contre le mur pour passer mes nerfs. Peut être qu'une fois dans ma vie je pourrais faire preuve de courage et affronter mes problèmes, ou plutôt les pseudos problèmes que Maman juge importants. L'écran affiche « Appel en cours », une fois, deux fois, trois fois. J'entend le téléphone sonner depuis le jardin, il s'agirait d'arrêter de faire semblant de ne rien entendre.

La porte s'ouvre, Théo est de l'autre côté, au vu de sa gueule il se lève. Étonnamment il n'a pas l'air ravi de me voir, j'avoue que je m'attendais à un meilleur accueil, je suis quand même sa sœur il me semble. Je vois Maman dans le salon, elle a grossit et ce con de Julien lui masse les épaules en me regardant comme si je venais de descendre une classe de collégiens avec un fusil de chasse.

Julien s'approche de la porte pendant que Théo s'en éloigne, il se met entre moi et le reste de la maison, c'est horrible mais j'arrive à voir dans ses yeux à quel point il me hait.

- Tu nous déçois beaucoup Alice.
- C'est pour ça que vous avez changer les serrures ?
- Exactement.
- Et j'aurais l'honneur de savoir pourquoi, Ju' ?
- Les camés sont dangereux.
- Et tu tiens ça d'où ? De la cousine de la sœur de ta cliente avec des mycoses vaginales ? Celle que t'as pas sauté ?
- De ta mère.
- Ma mère que t'as mise enceinte, ok.
- Tu dois te mettre dans le crâne que ton père n'est pas un exemple, surtout après ce qu'il vous a fait à ta mère, ton frère et toi.
- Qu'est ce qu'il m'a fait ? Éclaires moi de ta science Jesus, t'attends quoi ?
- Tu as déjà oublié comment il est mort ? À quel point c'était son but de vous faire souffrir ?
- Excusez moi Seigneur, mais si je puis me permettre je pense que je suis en meilleure position que vous pour parler de ce sujet. Il est d'ailleurs de mon devoir de vous demander, qui m'a laissé seule des jours et des jours sans s'en préoccuper alors que je n'avais même pas 10 ans, si vous me le permettez grand dieu Julien, il me semble que sans mon cher camé de père je n'aurais jamais atteint l'âge que j'ai en ce jour.
- Tu as dix minutes pour emmener tes affaires et disparaître avant que j'appelle la police.
- Tu leur diras bien que je leur pisse à la raie dans ce cas là.

ALICEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant