Rhadamanthe vs Hilda et Sigmund

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La tempête de neige soufflait encore et encore, rendant la marche dans l'épaisse couche blanche au sol très difficile pour qui n'était pas habitué à ces contrées hostiles. Pourtant, l'avancée n'était pas si irréalisable pour l'homme qui voyait enfin le bout de son périple: la statue de ce dieu nordique imposante et dominant le palais à peine en dessous. Il connaissait le chemin, mais les fois précédentes où il se rendait en Asgard, une fois Odin apparaissant au loin, il bifurquait sur la gauche, vers l'est, sur une route menant dans une forêt aux arbres immenses et parfois très vieux, pour se mettre à l'abri dans une petite bâtisse de pierre perdue dans la nature éternellement plongée dans l'hiver.

Cette fois-ci, il allait dans le château, mais sans raison politique. Pour motif personnel et privé. La personne de ses pensées ne pouvait pas le retrouver dans leur nid secret, car blessée à la suite d'un combat contre un ours imposant, anormalement féroce qui s'en prenait aux villageois, les terrorisant et saccageant leurs biens. En tant que héros et guerrier de ce royaume, il avait du l'affronter et le tuer. D'après la longue lettre relatant ce récit, l'homme regrettait ce geste, car abattre des animaux n'avait jamais été son intention. C'était la bête ou lui. Il s'en était sorti avec une mauvaise blessure au niveau de la cuisse qui mettrait du temps à guérir, l'immobilisant dans ses appartements dans le palais.

Siegfried était un héros, en effet, aimé de son peuple, faisant la fierté de sa reine, Hilda de Polaris, et envoutant de par son regard clair Rhadamanthe, ce Spectre au service du Seigneur des Enfers, Hadès.

Oui, ce dernier appréciait plus que de raison cet homme du nord et tous deux partageaient bien plus que le dragon comme totem commun, la blondeur cendrée de leurs chevelures ou bien ce côté meneur d'une armée inflexibles et féroces au combat. Les diners à la fois diplomatiques et amicaux entre sanctuaires et divinités après le traité de paix signé par les dieux de l'Olympe et Odin avaient crée des amitiés, tissé des liens et même vu naitre des relations plus intimes parfois.

Rhadamanthe et Siegfried se sont bien entendus au fil du temps, si bien que peu à peu, les paroles et les lettres transportées par les émissaires entre Asgard et les Enfers ne suffisaient plus. De par leurs positions au sein de leurs armées respectives, jamais ils ne s'étaient affichés aux yeux de tout le monde, préférant ce coin tranquille au fin fond de cette forêt enneigée, ce lit d'apparence peu solide supportant leurs ébats, cette cheminée réchauffant leurs corps musclés ainsi que les bouteilles d'alcool de qualité qu'ils savouraient à petite dose entre deux baisers. Ils n'avaient pas besoin de grandes déclarations ou de mots doux pour prouver leurs sentiments. Seule la présence de l'autre dès que leurs fonctions le leur permettaient les satisfaisait.

Le Spectre ne montrerait jamais son inquiétude après avoir appris la blessure du Guerrier Divin. Ou bien s'il l'avait fait, probablement que ce subordonné qu'il avait engueulé plus que de raison pour n'avoir pu déboucher sa flasque de whisky préféré devait être encore couché dans le dortoir du tribunal à trembler de peur, une semaine après sa crise de rage.

Il espérait que Siegfried se rétablisse au plus vite...

Stoppant sa marche, il eut une pensée impie rappelant les niaiseries que proféraient les chevaliers d'Athéna quand ils voulaient se motiver. Sauf que là, la silhouette en face de ses yeux tenait en effet presque du miracle. Un homme à la carrure imposante, des cheveux blond cendré ondulant au rythme de la tempête... Celui qui occupait ses pensées était-il finalement rétabli?

Il accéléra sa marche, jura en butant contre une branche épaisse dissimulée sous une dizaine de centimètres de neige mais se dépêchant pour confirmer une fois plus près que c'était lui...

L'épreuve de la bénédictionOù les histoires vivent. Découvrez maintenant