N'approchez pas

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L'horloge sonna dix heures lorsque Charlotte pénétra dans la salle du trône. Ses joues étaient un peu rouges et sa coiffure n'avait pas les plis réguliers habituels. Elle se rangea à côté d'Anna et son chaperon se mit derrière elle.

Il n'y avait que la reine qui conversait avec un ministre ainsi que les promises avec leur chaperon. La blonde était la seule à ne pas être accompagnée. Elle sentait sur ses épaules le regard pesant des deux chaperons qui voyaient en elle un danger pour leurs protégées. Anna profita de la discussion de la souveraine pour la détailler.

La reine Aliénor de Pame était très belle pour son âge. Son visage, marqué par le temps, avait conservé sa beauté. Sa peau laiteuse contrastait avec ses sourcils noirs qui faisaient ressortir le bleu de ses yeux. Elle nota que l'héritier direct avait hérité de ses traits. Elle portait une somptueuse robe rouge assortie au velours de son siège. Elle fit appeler un homme qui jusque-là était resté dans l'ombre des colonnes et lui chuchota ses ordres. Il quitta la salle après avoir s'être incliné. Ce départ fut le signal pour le début de l'audience.

- Je vous souhaite la bienvenue et j'espère que votre séjour se passera bien. Vous êtes ici pour le bien de votre royaume, mais nous n'ignorons pas votre bien être. Ainsi, comme vous le savez déjà, mon fils choisira parmi vous celle qui aura assez de qualités pour prendre son cœur et pour régner à ses côtés.

À ces mots Sonia se redressa encore plus dans son corset trop serré et Charlotte lança un regard compétiteur à ses cousines. Anna ricana quand elle entendit parler de qualité pour régner. Il n'était pas dans les coutumes tioniennes d'apprendre aux filles à faire d'autres activités que le chant ou la peinture. La reine le remarqua et lui lança une œillade assassine.

- Vous avez deux mois, jusqu'à la fête des fleurs pour tisser des liens avec le prince. Vous apprendrez à vous connaitre mais n'oubliez pas que vous gouvernerez un jour. Ainsi, vos aptitudes et vos qualités seront évaluées au cours de petits concours. Je vous expliquerais tout en détail au goûter qui se tiendra cette après-midi au jardin du printemps.

Charlotte sourit de toutes ses dents et Sonia rougit d'excitation. Anna resta de marbre.

La reine dut prendre ce manque de réaction pour de l'arrogance puisqu'elle continua d'un ton dur.

- Vous êtes ici pour votre royaume alors montrez-vous en digne. Si vous ne prenez pas cela au sérieux, je tâcherai de vous-

Des bruits de pas et des chuchotements la coupèrent. Ils provenaient de la galerie aux glaces qui menait à la salle du trône.

Le prince entra dans la grande salle.

Ses cheveux noirs, ébouriffés étaient plaqués sur son front où perlaient des gouttes de sueur et ses bottes laissaient sur le sol immaculé des traces de boue. Il salua gaiement sa mère du bas des marches qui ne put contenir sa colère de le voir ainsi.

- Gabriel, Paul, Charles, François de Sezia ! Comment osez-vous vous présenter à cette heure-ci débraillé comme un sauvage ?

Le jeune homme lui adressa un sourire éclatant qui dévoila ses dents blanches.

- Bien le bonjour mère, je vais très bien et je vous remercie de vous soucier de moi. La chasse a été si fructueuse que je m'y suis attardé, pour preuve, ce soir, nous mangerons le cerf que j'ai attrapé.

La vieille reine contenait sa colère, mais ses joues étaient rouge vif et son regard assassin. Le prince ne prêta pas attention à sa mère, mais aux jeunes femmes.

- J'avais raison, murmura Anna, un cochon s'était enfui.

- Qu'avez-vous dit mademoiselle ?

Il avait entendu l'insulte et il comptait lui faire payer en l'affichant face à la reine furieuse. Anna ne se laissa pas démonter.

Le destin d'AnnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant