Où est cette putain ?

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Gabriel revenait vers la suite. Le bal s'était terminé cinq heures plus tôt. Ses parents et les ministres avaient flanché le laissant avec la jeune femme qui ne s'était pas réveillée depuis.

Les médecins avaient été formels. Un empoisonnement. Gabriel avait un instant cru qu'elle avait préféré la mort au mariage, mais c'était un poison qui agissait rapidement. Quelqu'un l'avait mis dans la coupe de champagne à son insu. Ils avaient annoncé que c'était un miracle qu'elle ne soit pas morte. Certains justifiaient cela par le fait qu'elle soit une élue, mais le plus pragmatique avançait qu'elle avait reçu une dose trop légère.

Gabriel l'avait quittée dix minutes pour aller chercher un bout à manger et du café pour se maintenir éveillé. Lorsqu'il arriva au troisième étage, il entendit des cris étouffés. En empruntant le couloir qui menait à la chambre, il vit les deux gardes qui somnolaient plus tôt totalement éveillés. Ils fixaient avec crainte la porte ouverte de la marquise. En s'approchant, il discerna les paroles de la nordienne.

- Où est cette putain ? Où est cette putain que je lui coupe la tête ?

Le jeune homme mal réveillé mit un certain temps avant de comprendre la situation.

Anna arpentait la suite traînant derrière elle une lourde épée. Sa robe de nuit déchirée aux genoux et ses yeux écarquillés lui donnaient des airs de folle. Elle jouait avec une épée à la poignée blanche enchaînant de minutieux mouvements face aux gardes un peu à l'écart par peur de prendre un coup.

- Anna ? Que faite vous ?

- Où est-elle ?

- Non mais c'est quoi ces conneries ? Il est trois heures du matin !

Déboussolée, elle s'arrêta. Elle regarda perdue autour d'elle.

Le palais était plongé dans la demi-pénombre. Face à elle le prince tenant un sandwich au jambon et une tasse fumante.

- Posez cette épée, murmura-t-il comme pour la rassurer.

Elle semblait perdue regardant par une fenêtre la nuit cherchant un quelconque ennemi. Ses doigts blanchirent sur le manche. Elle s'y accrochait comme si sa vie en dépendait.

- Mais je dois la rretrouver, se justifia-t-elle toute penaude.

Le jeune homme s'approcha doucement. Il montra ses mains vides et lui retira délicatement l'arme avant de la poser au sol. L'épée était d'une finesse remarquable. Il garda une prise sur ses doigts.

- Vous devez vous reposer, insista-t-il calmement.

- Elle m'a fait mal, murmura-t-elle en se caressant la gorge au souvenir douloureux de la brûlure.

Elle avait encore du mal à déglutir.

- Je vais vous recoucher.

Elle n'émit pas d'objection se laissant guidée comme une petite fille. Il ferma la porte congédiant les gardes encore ahuris et l'aida à se remettre au lit.

Il la couvrit d'une couette.

- J'ai chaud, souffla-t-elle.

Le jeune homme posa sa main sur son front. Il était brûlant. Il lui ne laissa que le drap.

- Vous avez de la fièvre. Voulez-vous boire un peu d'eau ?

Elle se figea.

La dernière fois qu'elle avait accepté un verre, elle avait fini à moitié morte vomissant ses tripes devant une reine dégoûtée. Heureusement pour elle, les héritiers du Nord s'immunisaient contre le poison, mais celui-ci était vraiment puissant.

Le destin d'AnnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant