Est-ce une menace Marquise

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Anna se baladait tranquillement à la lisière de la forêt qui bordait le parc. Elle préférait être seule, loin de l'agitation des aristocrates qui évitaient de trop s'éloigner du palais. Elle avait demandé à sa femme de chambre de ne pas la suivre et Alexis était allé en ville faire une course qu'il avait lui-même qualifié de trop secrète.

Elle entendit un cri qui brisa le fil de sa pensée. Elle n'eut pas le temps d'en savoir la raison qu'elle fut propulsée au sol. Un chien au pelage foncé bavait sur sa robe en reniflait la poche. Anna, qui était entravée dans ses jupes, avait du mal à bouger et n'arrivait pas à repousser complétement le molosse qui revenait à chaque fois.

Le prince arriva dans son champ de vision et saisit le chien par le collier pour l'écarter. Il lui ordonna de ne pas bouger, mais le rottweiler était toujours en alerte fixant la tionienne encore au sol. Elle sortit de sa poche un pochon gris et face à ce geste, le chien tenta de s'échapper de la poigne du prince qui le retenait ferment. Vaincue, Anna jeta son pochon vers le chien qui fut libéré de l'emprise du prince.

L'héritier se rapprocha de la tionienne pour l'aider à se relever, mais il fut pris d'un fou rire face à sa mine déconfite.

— Pourquoi aviez-vous un saucisson ?

— Pour nourrir les canards évidemment, dit-elle en se relevant difficilement.

Elle épousseta sa robe pervenche et se massa le bras en grimaçant. Son épaule la lançait à chaque mouvement et sa tête tournait un peu à cause du choc. Lorsqu'elle eut bien repris ses esprits, elle vit que l'ortusien lui tendait le pochon troué et plein de bave.

— Je crois que Camembert vous doit un nouveau sachet.

— Camembert ? Votre prénom est original.

La jeune femme ignora l'objet tendu et esquissa un sourire face au visage surpris du prince. 

— Puis-je vous accompagner ? Je n'ai pu m'entretenir avec vous depuis notre dernière rencontre dans la bibliothèque.

— Vous voulez dire que je devrais accepter votre présence à mes côtés alors que vous m'avez poussé dans un buisson. Je garde encore de mauvaises coupures sur mes bras. A cela s'ajoute que votre chien m'ait attaqué et que par-dessus tout, je vous abhorre ?

— C'est vous qui m'aviez insulté en première avec ce mouchoir ! Mais oui, je veux avoir cette discussion.

Elle leva la tête pour croiser le regard pétillant de son interlocuteur ne parvenant pas à savoir s'il se moquait d'elle ou non.

— J'imagine que mon heure est arrivée, capitula Anna d'un air dramatique.

Cela faisait trois jours qu'elle évitait les lieus publics pour ne pas le voir. Ce n'était que le matin même qu'elle l'avait croisé lors de la cérémonie religieuse. Assise sur les rangs du fond, elle était suffisamment loin de lui, mais ne pouvait s'empêcher de remarquer le regard inquisiteur du prince. À la fin de l'office, il avait essayé de la rejoindre, mais elle était sortie rapidement entourée de sir Alexis et d'Ophélia.

Elle se mit à marcher en direction du palais et l'héritier lui emboîta le pas. Côte à côte, ils passèrent devant le rottweiler qui mastiquait le saucisson.

— Étaient-elles comme je vous les avais décrites ?

La tionienne coupa le prince dans sa pensée et il mit plusieurs secondes à comprendre ce qu'elle voulait dire.

— Pas vraiment, vous avez mal choisi vos mots. Il est vrai que mademoiselle de Lero est obnubilée par sa personne, mais elle s'est intéressée à moi et mademoiselle de Casteria a eu l'amabilité de s'intéresser aux différentes familles de mon royaume.

Anna lui sourit indulgemment.

— Comme je vous l'ai dit, si vous n'êtes pas repoussant, elle vous aimera tandis que Sonia a été élevée pour être reine il est donc normal qu'elle s'intéresse à ceux qui pourraient menacer son trône.

— Alors comme cela, je suis beau ? Serait-ce un compliment de votre part ?

Elle le jaugea de haut en bas.

— Vous n'êtes pas repoussant, mais ne vous estimez pas attirant pour autant.

— Vous blessez mon orgueil à m'insulter ainsi. Comment ferez-vous si je vous choisis ? Arriverez-vous à supporter mon magnifique faciès ? demanda l'héritier goguenard.

— Vous ne me choisirez pas, répondit-elle rapidement.

— Comment pouvez-vous en être certaine ? Vous pourriez apprendre à calmer votre caractère et votre minois convient à la Cour.

Anna s'arrêta net et lui adressa un regard noir.

— Ce n'est pas le visage qui fait une bonne reine, mais l'esprit, corrigea-t-elle. Je sais que vous ne me prendrez pas pour épouse, car ce serait un choix peu réfléchi pour un futur roi.

— Pourquoi cela, l'interrogea le prince, ne vous sentez-vous pas à la hauteur de la tache ?

Elle reprit sa marche.

Ils passèrent devant une fontaine et continuèrent de remonter l'allée vers le palais. Le nombre d'aristocrates qui évoluaient vers le palais était impressionnant. En cette belle journée, toute la Cour s'était donnée rendez-vous vous dans les jardins et tous saluaient le prince héritier qui ne leur accordait aucun regard.

— Je vous méprise ainsi que votre famille alors si l'idée de me choisir effleure votre esprit attardé, sachez que vous ne pourrez plus dormir sur vos deux oreilles, lui murmura Anna.

Le prince se figea et lui attrapa le poignet.

— Est-ce une menace Marquise ?

— Une promesse, répliqua la nordienne en se dégageant.

Un groupe d'aristocrates passèrent devant eux en les saluant. Une fois dos à leur futur roi, ils chuchotèrent sur la scène à laquelle ils venaient d'assister.

— J'aime les défis ma chère. Je pourrais vous choisir juste pour voir si vous réussirez à me couper la gorge.

— Vous n'avez pas le cran de le faire, assura-t-elle.

Ce fut à son tour de sourire.

— C'est ce que nous verrons Marquise. En attendant, expliquez-moi pourquoi avoir un saucisson dans votre poche.

— Savez-vous garder un secret ? murmura-t-elle.

Le prince se pencha.

— Oui, répliqua-t-il ravi d'être dans la confidence.

— Eh bien moi aussi. Au revoir, le paria, rit Anna en s'éloignant vers le palais.

Le jeune héritier resta hébété.

-Bonjour les gens-

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Le destin d'AnnaOù les histoires vivent. Découvrez maintenant