Chapitre 13

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La trajet se fait dans le silence depuis plus de trente minutes. Jeanne ne me regarde pas une seule fois. Au lieu de ça, elle est durement concentrée sur la route, au point qu'elle en répond même pas à son téléphone qui sonne depuis plus de deux minutes.

Je tends la main en lui jetant un regard du coin de l'œil et aggripe son téléphone quand je vois qu'elle ne réagit pas. Je ne réponds que lorsque j'aperçois le nom de mon père s'afficher sur l'écran.

–Ramène-moi un paquet de cigarettes en route. T'es bientôt là ?

Je ferme les yeux en soupirant.

–C'est moi, papa. Jeanne conduit, elle peut pas répondre.

–Vous êtes encore loins ?

Je jette un coup d'œil par dessus le parbrise.

–On est là dans dix minutes.

Ok. Dis à ta tante pour mes cigarettes.

–D'accord, papa. À tout à l'heure.

Je raccroche et dépose de nouveau son téléphone dans le porte-gobelet.

–Il dit qu'il veut un paquet de cigarettes, je reporte tout en l'observant.

Elle acquiesce simplement, toujours cette expression neutre sur le visage, à la fois bourrée de déception. Elle ne m'a plus parlé depuis Samedi, et Stan non plus. On est Lundi, et lui, je ne l'ai même pas vu en cours, aujourd'hui. Lorsque je suis remonté dans la chambre ce soir là, Sonya s'était rendormie, et le matin je lui ai simplement dit que j'étais allé marcher parce que je n'arrivais pas à m'endormir.

Jeanne ne me confronte pas, ne me réprimande pas. Elle ne me parle tout simplement plus. Elle ignore totalement mon existence. Ses petites remarques enjouées ont disparues du jour au lendemain, en même temps que notre complicité. Ça a dû être un choc total pour elle de me voir avec une personne du même sexe, sûrement. Mais à ce point là, c'est carrément effrayant. Pourtant, même si je n'ai que très peu pensé à cette possibilité, j'avais imaginé un acceuil chaleureux de la nouvelle –s'il y en aurait eu une me concernant. Du moins, de sa part. J'ai pensé que si jamais je lui disais être avec un homme, elle le prendrait très bien et serait même heureuse pour moi. Mais à la place, elle me fait me sentir comme un étranger dans la maison. Comme si je venais de la décevoir tellement profondément qu'elle n'oserait plus jamais me regarder dans les yeux.

Des frissons me traversent le long de la colonne vertébrale à chaque fois qu'on s'installe à la table à manger. Même quand j'engage une conversation, elle ne dit jamais rien. Elle acquiesce ou secoue la tête ou alors, m'ignore royalement.

Je déteste cette situation. Je déteste ne pas savoir ce qu'elle pense et je déteste encore plus mon incapacité à le lui demander. J'ai peur de sa réponse. Encore plus que de son silence. Jeanne est juste trop importante pour moi pour que je puisse laisser les choses durer plus longtemps. Sa validation, sa compréhension, sa fierté en vers moi sont les choses les plus importantes pour moi. Bien plus que celles de mes propres parents.

Aujourd'hui, elle m'a simplement envoyé un message pour me dire qu'elle viendra me chercher après les cours pour qu'on aille voir mon père dans la ville voisine. Alors j'ai dit à Sonya qu'on ne pouvait pas se voir aujourd'hui. D'ailleurd, en parlant d'elle, plus le temps passe, plus elle devient collante. Elle veut toujours être avec moi, me prendre la main, m'embrasser, me serrer dans ses bras. Et je n'ai pas le courage de la repousser, surtout qu'elle le fait majoritairement en public. Mais depuis Samedi, j'évite le plus possible ses gestes. Quand ce ne sont pas les mains de Stan sur moi, j'ai cette sensation étrange qui m'anime. Comme si mon corps et mon coeur ont décidé à l'unanimité que Stan était à présent le seul capable de me faire sentir.. ça. Ou simplement de me toucher.

Entre nous deux [bxb]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant