Chapitre 2

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                     UNE SEMAINE PLUS TARD

Marck et Elizabeth venaient de sortir de l'hôpital. Arrivés devant la porte de la maison, Marck a tiré sur le lourd porte-clés. Il a essayé de trouver la clé, à tâtons essentiellement ; puis il a tâtonné sur la poignée jusqu'à ce que la clé glisse dans la serrure. Il a poussé la porte, Elizabeth le suivant derrière. Quelque chose clochait. Un truc froufroutait sous leurs pieds. Marc fronça les sourcils. Du plastique! Ils ont marché sur du plastique, le genre que l'on pose pour protéger le plancher. Marc demanda à Elizabeth d'appuyer sur l'interrupteur ; et c'est là qu'ils virent l'homme avec le flingue.

- Salut les Williams.

Étouffant une exclamation, Elizabeth recula d'un pas. Marc, la rattrapa. L'homme en face d'eux était âgé d'une quarantaine d'années, grand et gros, un ventre qui se battait contre les boutons de sa chemise de soirée et qui, à un endroit au moins, avait déjà gagné. Sa cravate était desserrée et sa coiffure était un vrai cauchemar, huit mèches tressées d'une oreille à l'autre et plaquées avec du gel au sommet de son crâne. Les traits de son visage étaient mous ; son menton disparaissait dans des replis de graisse. Il avait posé les pieds sur le coffre que Marc utilisait en guise de table basse, remplaçant le flingue par une télécommande, et vous auriez eu devant vous un père de famille harassé, tout juste rentré du travail. L'autre homme, celui qui bloquait la porte était tout le contraire du gros, un asiatique d'environ vingt ans, trapu, taillé comme un bloc de granit, carré, les cheveux décolorés, un piercing ou deux dans le nez et un Walkman jaune sur les oreilles. Le seul endroit où on aurait pu les voir ensemble, ces deux-là, ça sa aurait été dans un métro, le gros fronçant les sourcils derrière son journal soigneusement plié, le jeune nous observant tout en dodelinant de la tête au son de la musique qui jouait dans ses casques.

- Qu'est-ce que vous voulez ? Demanda Marck .

Le gars avec les tresses appuya sur la détente.
Marck entendit un bruit sec. Puis son genou droit explosa, les yeux écarquillés. Il poussa un cri et s'effondra en se tenant la jambe, le sang coulant entre ses doigts.

- C'est un vingt-deux, a dit le gros en parlant de son arme. Un petit calibre, ce qui me plaît là-dedans, comme vous allez le constater, je peux vous tirez dessus autant de fois que je veux sans vous tuer. Les pieds toujours sur le coffre, l'homme a tiré de nouveau, cette fois c'est l'épaule d'Elizabeth qui a été touchée. Elle a senti son os éclater, son bras est tombé telle une porte de grange dont un gond aurait lâché. Ils étaient soulagés par de terribles cocktails de douleur et de peur, les yeux grand ouverts et fixes dans le brouillard, ils avaient soudainement compris quelque chose : le plastique par terre. Ils étaient couchés dessus pour qu'il daigna dessus, c'était pour ça qu'on les avaient déposés là. Ces hommes les avaient étendus sur le sol afin de simplifier le nettoyage.

- Tu vas me donner ce que j'ai envie d'avoir ? a dit le gros ou je recommence ?
- Je ne sais pas de quoi vous parlez, a dit Marc.
- Tu en es sûr ? Dit le gros.
Marc pris un bref instant de silence, inspira puis il eut un flash-back, il n'avait plus de clé USB. Il ne savait plus où il l'avait déposée ! De toute les façons Marc ne savait même pas, s'il lui disait ou non, où se trouvait la clé USB, s'ils auront la vie sauve. Ils savaient très bien qu'ils n'allaient pas voir le lever du soleil, car les deux hommes n'avaient pas couvert leurs visages. Il avait surtout peur pour sa femme, Elizabeth, alors Marck eut une idée, celle de mentir aux deux hommes.

- Okay, je vous dis où se trouve la clé USB, si vous laissez ma femme en vie et partez, dit Marc.
Il y eut un silence dans la pièce, même pas le bourdonnement d'une mouche. Il les regardait droit dans les yeux, son regard était sans vie et n'arrivait pas à savoir si Marck leur disait vrai ou non.

Mark regardait la grande horloge du salon : il n'était que huit heures du soir et l'autre homme était devant la porte. Il était impossible de tenter quelque chose de physique, car c'était une mission impossible. La seule chose qui pourrait fonctionner serait le mensonge et la ruse.

− Vous en dites quoi ? À la proposition que je vous ai faite ? dit Mark.

− Qui d'autre est au courant de l'existence de cette clé USB ? Dit le gros, sans répondre à la proposition de Mark.

− Ils sont à deux. Si quelque chose arrive à ma femme et moi, ils iront directement à la police.

− Ah ! Ah ! Fait le gros, tu nous prends pour des imbéciles, tu crois que c'est la première fois qu'on liquide des gens ? Tu joues à un jeu dangereux, mon gars. Tu nous donnes la clé USB oui ou non ?

− Non ! Dit Mark.

D'un sang-froid cruel, le gros sortit son arme et tira une balle dans l'autre jambe.

− Tu en dis quoi ? Dit le gros.

Avec douleur, Mark pensa à des alternatives de réponses.

− Comme tu veux jouer avec moi, ta femme va payer le prix. Le temps, c'est de l'argent, et tu me fais perdre mon temps. Tout s'achète, sauf une vie. Vos plaidoiries s'infectent et vos douleurs s'accentuent. Une balle en plein milieu de la cage thoracique et ta femme perdra la vie, ou je peux remballer mon arme, puis caser ta chère et tendre dans le coffre du véhicule et attendre qu'elle meure d'infection et d'hémorragie interne.

− D'accord, et si je te la remets, tu libères ma femme ?

− Je pourrais la libérer, mais rien ne me rassure qu'elle ne va pas prévenir la police ! Dit le gros.

− Elle ne le fera pas, je vais lui faire comprendre. Mark lui sourit, mais son regard était mort.

− Elle est où, alors, la clé USB ?

− Elle est dans ma chambre, OK, tu montes avec Lee. Si tu nous fais un mauvais coup, Mark, ta femme en paiera le prix.

Ils montèrent jusqu'à sa chambre, Lee derrière lui, comme un garde du corps, ne lui quittait pas du regard. Il ouvrit un tiroir et fit sortir une clé USB, et la remit à Lee.

Il savait qu'au moment même où il leur a remis la clé USB, il ne verrait pas le lever du jour. Après avoir remis la clé USB au gros, l'homme lui a tiré dans la cheville droite. Il se leva et donna un coup de manche sur le crâne d'Elizabeth, et elle tomba évanouie, Mark cria : « Tu n'as pas respecté ta promesse. Calme-toi, je ne l'ai pas tuée, elle est juste évanouie. »

Mark lui dit : « Je sais bien que tu vas me tuer, je te demande de laisser ma femme en vie. C'est mon dernier souhait avant ma mort, car je vous ai déjà remis la clé USB. »

Le gros le regardait et lui dit à son tour : « Je n'ai qu'une seule parole, je ne vais pas la tuer ». À ces mots, Mark le supplia de le tuer, de lui mettre une balle dans la tête.

Une heure après, son vœu a été exaucé.

Jonathan Crawford, l'homme aux mèches plaquées sur le crâne, regardait Erick Lee terminer tranquillement le nettoyage. Vingt-six ans, d'origine japonaise, porteur d'une impressionnante collection de piercings et de tatouages, Lee était l'homme le plus dangereux que Crawford ait jamais connu.

Il était bâti comme un petit char d'assaut, mais ceci ne voulait pas dire grand-chose. Crawford connaissait plein de gens avec ce physique-là, mais trop souvent, les muscles apparents se révélaient totalement inutiles. Ce n'était pas le cas d'Erick Lee.

Être taillé dans le rock, c'était bien joli, mais le secret de la force meurtrière de Lee résidait dans ses mains calleuses, deux blocs de ciment avec des doigts comme des serres d'acier. Il passait des heures à s'entraîner, à taper sur des murs, à exposer ses mains à des températures extrêmes, à faire des séries de traction sur un doigt. Quand Lee se servait de ces doigts-là, les dégâts causés à l'os ou aux tissus étaient inimaginables. Crawford l'aurait vu saisir un homme par les deux oreilles et les arracher d'un seul geste fluide.

Aucune de ces morts n'avait été rapide, et personne ne savait exactement d'où venait Lee. La version la plus répandue évoquait une enfance violente au Japon. Crawford n'avait jamais posé de questions Il y a des sentiers nocturnes où il vaut mieux que l'esprit ne s'égare pas, du côté obscur d'Erick Lee.

A l'encre de nos veinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant