Un rendez-vous avait été donné, à midi. Il était midi, et Paul avait planté ses devoirs, son école, et ses quelques camarades de classe, car l'heure n'était plus l'heure. S'il avait su être à l'avance, il ne serait pas en retard. Quelque chose dans son coeur lui disait que ce serait peut-être le dernier rendez-vous avant longtemps. Cela lui déchira un peu le coeur, tout de même. Mais sa raison lui demanda d'être heureux.Il s'était rendu à l'hôtel, sur ordre, et s'était installé sur un petit canapé. Siloé était en retard, et cela le fit sourire, attendrit. Son ami ne lui avait rien dit d'autre. Juste ce message : « Viens demain, à midi. Je t'attendrai dans le Hall. »
Faux. Il n'était pas là.
Ce n'était que de l'exagération, car Siloé débarqua dans le hall pas plus tard que deux minutes après. Seul. Il n'avait aucune cerne sous les yeux. Encore mieux, la peau de son visage était colorée, comme celle d'une personne en forme qui ne demande rien de plus que de continuer à voir le soleil. Il y a une semaine qu'il ne l'avait pas vu. Le changement fut saisissant.
Siloé s'installa dans le fauteuil d'en face. Sans un mot. Et les deux hommes échangèrent un regard traversant toutes les émotions. C'était presque devenu un jeu de ne pas parler. De tout se dire simplement à travers le regard. Leurs lèvres s'élargirent et ils rirent. Il avait déjà vu Siloé sourire. Il était le sauveur de ce sourire, même. Mais pour la toute première fois, il vit le véritable sourire de son ami, et il n'était pas forcé. Il était simple, et renversant.
Ce moment n'avait aucun sens vu de l'extérieur. Vous auriez vu deux hommes se faire face, et se regarder jusqu'à en rire, sans se parler. Il n'y a que deux fous, ou deux individus au lien trop fort pour en arriver là.
Oui, bien sûr que Paul n'allait pas aimer ce moment... il le voyait venir depuis des jours. Il n'eut même pas besoin de lui poser la question, rien qu'à voir la lueur dans ses yeux pour comprendre que quelque chose allait changer bientôt.
« Quand ? demanda-t-il la voix chevrotante. »
Siloé émit un son avec ses lèvres, rechignant les larmes qu'il ne voulut pas verser. Le garçon s'accrocha.
« Demain. L'avion décolle à 11 heures.
- Ouah. Répliqua Paul. Je ne suis pas prêt à te laisser partir. Même si je suis content que tu sois heureux.
- J'ai énormément de monde à aller rassurer...
- Et d'amour à vivre, aussi.
- Oh oui, énormément d'amour. Affirma Siloé en baissant la voix. »
Le garçon s'était retenu de pleurer depuis trop longtemps. Il en avait pourtant plus qu'assez des larmes. Cela faisait un an qu'elles coulaient en non stop. Il s'était retenu vraiment longtemps.
« Tu fais chier Paul... j'avais pas besoin d'un troisième frère ! »
Paul se leva de son canapé et l'attira à lui, il l'enlaça amicalement.
« Tu m'apporteras du vrai fromage quand tu reviendras ? Parce que je te préviens, tu as intérêt de ramener ton cul ici très vite.
- Oui, promis. Rit l'autre, une larme salée perlant sur chaque joue.
- Dans pas trop longtemps hein...
- Félix et mes parents risquent de me garder sous clé un long moment, mais je sortirai par la fenêtre.
- Préviens-les avant.
- Oui ! »
Paul le lâcha pour pointer son index sur le torse de Siloé. Il hocha la tête comme pour confirmer ce qu'il voulait lui dire avant de ne le prononcer.
« Ecoute, et protège ce qu'il y a là-dedans. Dit-il en visant le coeur de l'autre. Ne te repose jamais sur tes lauriers, vis chaque seconde comme si c'était la dernière. Aime-le à en crever. Profite de tout ce qu'il t'apportera. Accepte de te laisser aimer, de lui accorder ta confiance. N'aie pas peur de toi-même. Ose la vie en elle-même. Fais voyager toutes les larmes que tu as pleurées pour leur montrer que tu les domines et envoie valser cette douleur en lui montrant que tu choisiras toujours le meilleur chemin pour toi. Laissez-vous rêver, et envoyez le maximum de bonheur dans les airs parce que... parmi le vide et le vent, beaucoup de gens en cherchent. »
FIN.
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Du vide et du vent (BxB)
RomancePour Siloé, voir Félix s'en aller sans se retourner, avec la certitude que jamais il ne rebrousserait chemin pour se jeter dans ses bras, c'était comme, ce doigt qu'on pose sur une source qui ne cesse de monter en chaleur... Ce n'était pas encore do...