MEMORIES DESTROY US

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Point de vue d'Oxana

Je me souviens parfaitement du jour où j'ai enfin osé faire face à Jules après avoir appris qu'il sortait avec Lola. J'ai mis des jours à comprendre pourquoi.

Puis, je me suis rappelée à quel point il complimentait mon corps, tout le temps, et rien d'autre. Que tous les deux on ne sortait pas vraiment, on se voyait souvent pour coucher ensemble. Même s'il ne cachait pas notre proximité devant les gens du lycée, même s'il était attentif à tout ce que je disais, même s'il m'offrait de l'attention, jamais il n'a dit mot pour mot que nous étions en couple. Pour moi c'était logique, ça allait avec notre façon de nous comporter. À 17 ans, c'est difficile d'imaginer qu'on est simplement une sorte de sex-friend.

Alors j'ai pensé que c'est ce qu'il me dirait, que nous n'étions pas un couple et qu'il n'avait aucune raison de se retenir d'aller vers une autre. Une autre de qui il était déjà proche avant. En y repensant, il essayait toujours de la faire rire, de passer du temps avec elle, de s'afficher avec moi devant elle comme pour la provoquer.

Je me sentais tellement mal que j'avais l'impression de toujours avoir les larmes aux yeux. Au lycée, je lui ai demandé de venir dans un coin tranquille pour discuter. Dès que plus personne ne pouvait nous observer, ma vue s'est directement embuée. Il n'a pas compris, comme s'il n'avait rien fait de mal.

— Tu pensais que je ne l'apprendrais pas ? ai-je lancé sèchement.

Du moins j'espérais que ce soit sèchement, en réalité ma voix s'est brisée.

— De quoi tu parles ?

Et voilà, j'avais tort. Il n'a pas nié notre relation, il a simplement fait comme si de rien était.

— Depuis combien de temps vous êtes ensemble ?

Cette fois, il a compris que je savais tout. Il s'est figé et n'a pas répondu, je n'ai jamais su s'il continuait de me voir alors qu'il sortait avec elle, ou s'il n'était jamais revenu vers moi après avoir décidé de se mettre en couple.

— Laisse-moi t'expliquer.

— Que tu es en couple avec Lola alors que je pensais que c'était déjà le cas avec moi ? Je n'ai pas besoin de plus d'explications.

J'avais beau le savoir, j'étais déçue de réaliser que tout ça était vrai. Dans le fond je gardais espoir. J'ai voulu partir, mais il a saisi mon poignet si fort que je n'ai pas pu. Il m'a placé face à lui alors que je tentais de me débattre pour qu'il me lâche.

— Oxy, je suis désolé d'accord ?

— Je ne veux pas t'écouter Jules, je ne veux plus te voir, je ne veux plus rien avoir à faire avec toi.

Mais il m'a simplement serrée un peu plus fort, et j'en ai même eu mal.

— Arrête, ai-je gémis à cause de la douleur, laisse-moi partir.

— Non, d'abord tu entends ma version.

J'ai froncé les sourcils, envahie par une rage soudaine face à son air autoritaire.

Ta version ? Parce qu'il y a plusieurs versions quand on se fait tromper ?

— Je suis désolé je t'ai dit, je ne voulais pas que tu le prennes comme ça.

Comment est-ce que j'étais censée le prendre ?

Est-ce qu'il était juste con ou c'était moi qui étais à côté de la plaque ?

— Tu as deux minutes pour tout me raconter en détail.

Il a pris une grande inspiration sans même lâcher mon bras, puis a plongé son regard dans le mien. Mais avant qu'il puisse parler, une question a surgi dans mon esprit.

— Depuis combien de temps est-ce qu'elle t'intéresse ?

Je commençais à coller toutes les pièces du puzzle, et la surprise dans ses yeux m'a prouvé que j'étais sur la bonne voie. Il a soupiré, les yeux fermés, puis un air coupable s'est affiché sur son visage.

— Depuis le début de l'année.

Ma respiration s'est violemment coupée, au point que mes poumons ont commencé à brûler.

— Et tu t'es rapproché de moi pour te faire remarquer, ai-je murmuré presque pour moi-même. J'étais un moyen de t'occuper en attendant qu'elle veuille de toi, mais aussi de la rendre jalouse.

Il n'a rien dit. Je ne sais pas combien de temps je suis restée sous le choc, même si je m'en doutais depuis quelques jours, en avoir la confirmation m'arrachait le cœur. D'ailleurs, il commençait à battre trop vite, j'avais l'impression que tout mon corps ressentait ses vibrations. Je suis sortie de mes pensées en toussant violemment. J'étais incapable de m'arrêter et ça l'a poussé à enfin lâcher mon poignet. Ma cage thoracique se compressait de plus en plus et je n'arrivais pas à emplir mes poumons.

J'ai sorti mon inhalateur de ma poche en ne pensant qu'à respirer. J'ai passé de longues minutes à tenter de calmer ma crise, et Jules n'a pas bougé d'un poil. Mon poignet était encore douloureux et je voulais partir en courant. Comment est-ce que j'avais pu ne jamais voir ce côté de sa personnalité ? 

— J'ai raison ? ai-je réussi à articuler au bout d'un long moment.

— Écoute, j'aime énormément passer du temps avec toi et-

— Ce n'est pas ce que j'ai demandé. 

Je peinais encore à respirer, mais j'avais besoin de mettre un point final à tout ça.

— J'ai raison, oui ou non ?

Des larmes ont à nouveau coulé, mais majoritairement à cause de la rage cette fois. Il a hoché la tête avec un air désolé.

— Qu'est-ce que tu penses devoir m'expliquer dans ce cas ? Il n'y a rien à dire Jules.

— Si, que je suis désolé.

J'ai lâché un rictus de colère. Pour la première fois, je voyais qu'il mentait.

— C'est faux, tu veux juste effacer ta culpabilité. Tu n'en as rien à faire, sinon tu n'aurais jamais agi comme ça.

Cette fois, quand je me suis tournée dos à lui pour partir, il n'a pas tenté de m'arrêter. Il savait qu'il ne pouvait plus m'avoir avec ses mensonges. C'était trop tard.

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