Chapitre_Prendre sur soi

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Les mots échangés entre nous ne changent pas cette sensation d'angoisse et d'abandon qui s'entortillent au niveau de mon estomac, c'est plus qu'un pressentiment, c'est une fatalité, mon père est parti et comme à son habitude, il va envoyer un messager, un messager qui va annoncer son départ imminent et je vais devoir malheureusement encaisser sans rien dire car tel est mon quotidien.

Face à moi, les bouches de Hina et son frère s'animent mais aucun son n'en sort, la peur d'être confrontée a une éventualité que je veux fuir rend mes cinq sens inopérant, la frite que je laisse depuis trente minutes baigner dans le ketchups démontre mon inattention, ma meilleure amie agite ses mains ainsi que ses bras pour m'extirper de cette phase inerte, et quand une larme coule contre ma volonté, elle demande à son frère de demander une sauce à la caissière pour que nous puissions être seules.

Hinata a toujours été gentille, douce et très prévenante envers moi, dès que ça n'allait pas, elle faisait toujours en sorte de trouver un moyen pour que nous puissions être seule, je pense même que Hinata sera la première à se mettre en couple plus tard, sa maturité en est la preuve formelle.

- Hinata : La frite ne t'a rien fait, tu ne veux pas me dire ce qui te tracasses ?

- Laisse, j'ai l'habitude, ne dis à personne que j'ai pleurée.

- Hinata : Par personne, tu inclus le fameux Ken Ryûgûji ? Pitié ! Ne me dis pas « voyons je ne vois pas de quoi tu parles » ou encore « faut que j'aille aux toilettes » car là je ne te laisserai pas tranquille !

Bien évidement, j'aurais dû m'en douter, tel le petit chien qui défonce son os, Hinata ne me laissera jamais tranquille, elle va s'amuser à trouver des faux prétextes pour qu'on se voit plus, puis, elle va m'amadouer avec de la nourriture et un bon vieux film romantique, ça sera à ce moment là où elle brandira son arme pour m'asséner le coup fatal.

Je n'ai pas le choix, va falloir que je cède et que je laisse Hinata pénétrer à l'intérieur de cette zone minée qui détient mes moindres sentiments inexprimés.

- Mon père, tu le connais, il va me laisser, encore une fois, je n'irai pas chez mon oncle, la dernière fois Takeomi et mon père se sont violemment disputés, je pense qu'il a sa petite idée sur le chien qui va devoir me surveiller, le problème c'est que ce chien la, je ne le considère pas du tout ainsi et je ne veux pas qu'il fasse parti de ma vie plus longtemps.
Car je risquerai de m'attacher et ceci je ne peux pas.

Le traumatisme que ma mère m'a offert avant de claquer la porte sans revenir en est la cause, je l'adorais, elle était tout mon monde, mais son abandon a fissuré mon âme en deux, le lendemain, je n'étais plus la même, je le sentais sans m'en rendre compte, puis, c'est lors de ma première baston a l'école que je me suis aperçue qu'en faite cette colère enfoui demandait qu'à s'exprimer, après j'ai été jalouse, très jalouse et possessive car je ne voulais plus que personne ne m'abandonne.

C'est un gros travail que je fais sur moi même avec l'aide d'une psychologue, cependant les travaux avec elle ne m'empêche pas de filer en douce pour rejoindre Taiju et me déchaîner.

- Hinata : Je pense que tu devrais laisser une autre personne que moi entrer dans ta petite zone de contrôle super sécurisée, laisse lui le bénéfice du doute, puis, je ne pense pas qu'il soit du genre à abandonner quelqu'un aussi rapidement.

- Je veux bien essayer mais je ne suis pas sûr d'y arriver Hina.

- Hinata : Il n'est pas ta mère et encore moins ton père, nous sommes tous différents alors fonce.

J'aimerai Hina, j'aimerai abaisser ce rideau métallique qui empêche quiconque de se faufiler entre deux interstice donnant une vue sur la petite fille que j'étais auparavant attendant sa mère de l'autre côté du ponton.

Être comme elle est un souhait que je voudrai tant voir se réaliser, certes il faut s'aimer soi même, apprendre, gagner en maturité mais il y a des choses dont je ne suis pas capable de faire, et à cause de ce cocon familial que mon père et moi nous avons créé, je reste seule ayant pour seul ami, Hinata.

Hina a dû cesser de respirer car son visage s'empourpre, ses yeux déjà grands explosent à cause de la grandeur qu'ils prennent, pour dissimuler la rougeur de ses joues, Hinata aspire très rapidement son coca qu'elle vide, elle se lève brusquement de table, pianote sur son téléphone puis elle part en prenant son plateau ainsi que celui de son frère au moment même où je reçois une notification sur mon téléphone.

« Bonne soirée Jin ! Amuse toi bien avec ton copain ! Ne m'en veux pas s'il te plaît, on se voit demain en cours »

Je ne prends même pas la peine de me tourner, ou de chercher des yeux le fameux Ken qui a disparu avec mon père, car sa main étant présente sur le sommet de ma tête l'instant d'après atteste bien qu'il est revenu de son entretien qui risque de me faire sortir de mes gongs.

- Ken : Je dois te dire que -

- Pas la peine, j'ai l'habitude, j'ai déjà payée le repas, passe une bonne soirée je rentre chez moi.

- Ken : Écoute, il m'a demandé quelque chose.

Furieuse, honteuse d'avoir eu raison, je me lève de table sans adresser un moindre regard à ce garçon si gentil et délicat envers moi, la colère monte en moi et risque de tout emporter sur son passage tel un raz-de-marée, debout, en passant à côté de lui, nos mains se frôlent, un courant électrique que je ne peux pas nier emporte avec lui un léger battement de cœur plus ardent, muette, je quitte le Macdo afin de me réfugier chez Takeomi.

La ruelle en face est lugubre, l'idée de vouloir faire des économies d'énergies ne doit pas avoir des répercussions sur le fait de ne plus savoir où mettre nos pieds, maronnant, inconsciente, je sifflote en arpentant cette ruelle sombre à l'odeur écoeurante, quand deux mains se pose sur les extrémités de mes épaules.

- Ken : Il faut que tu m'écoutes.

- Pourquoi faire ? Je sais ce que mon père t'a demandé.

- Ken : Tu sais pourquoi j'ai accepté ?

- Car il t'a fait une offre que tu ne pouvais pas refuser.

- Ken : Non, c'est simplement parce que je t'aime bien.

A suivre.

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