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Sara





Je réponds à tout le monde sans exception et c'est pour cette raison qu'on m'a souvent demandé, à maintes reprises même, comment je faisais quand un témoignage me dépassait complètement.

Quand c'est tellement au-dessus de mes moyens que je suis incapable de gérer la situation malgré que j'y réfléchisse à en perdre la tête.

Je ne l'ai pas dit à grand monde, mais j'ai un bouton, rouge, un bouton d'urgence que je contacte quand c'est incontrôlable et parfois même dangereux.

À la base, je conseille juste en proposant des solutions, mais quand une personne m'écrit dans une baignoire pleine de sang à cause d'une mutilation qui a mal tourné ou qu'un vétéran anciennement prisonnier de guerre me contacte parce que malgré ses nombreuses séances avec des personnes compétentes, il se réveille tous les jours en sursaut, en sueur, les mains tremblantes et les pieds paralysés par la peur que ses ennemies reviennent, je suis complètement bloquée.

Quand je lui ai demandé, s'il avait déjà été interné, il m'a dit qu'il a refusé toute admission parce qu'être enfermé le tuerait.

Il est assisté à la maison, mais rien à faire, ça fait dix ans, mais rien ne s'arrange. Seulement ses hallucinations sont parties grâce à un traitement long et difficile.

Il s'accroche à la vie parce qu'il a peur d'être enfermé, en enfer cette fois-ci avec ses ennemis, qu'il a tués.

Je me suis demandé comment il a bien pu tomber sur mon blog, mais je ne lui ai pas demandé.

J'étais son dernier recours.

L'un se mutilait et l'autre se faisait mutiler ?

Un contraste effrayant.

Celui qui se mutilait, le faisait depuis longtemps, tellement longtemps qu'il n'y avait pas un endroit sur son corps qui échappait à une entaille qu'elle soit profonde ou non.

Lui et le vétéran ont dû passer par tous les moyens possibles pour soulager leurs maux, mais ça n'a pas marché.

Les professionnels non plus.

Le temps ? Ça n'a rien changé.

Ce sont des personnes qui sont rentrées dans une bulle, une bulle qui s'est petit à petit solidifiée avec le temps et maintenant quasiment rien ne peut la percer.

Le cœur du premier ne battait plus.

Plus de tambour, plus aucun son et la mutilation l'a fait revivre.

Comme quoi, la douleur nous fait toujours sentir plus vivant.

Le cerveau du deuxième est toujours mitigé.

L'abandonner ? Ou bien continuer à fonctionner malgré toutes ses anomalies ?

En créant ce blog, je n'aurais jamais cru être confronté à des cas qui me conduiraient vers des culs-de-sac, des choses incontrôlables.

Moi qui aime toujours tout contrôler, j'ai vite dû trouver une porte de sortie, une porte où ces personnes pourront aussi sortir, pas afin de retrouver une vie à peu près stable, mais pour pouvoir, juste pouvoir.

Ce mot avec plusieurs significations,mais qui est indéniablement quelque chose que tout le monde veut détenir.

***

Je refais un peu mes boucles, Shun devrait arriver d'une minute à l'autre.

Je sais... je sais qu'il éprouve des sentiments pour moi, ce n'est peut-être pas de l'amour, mais ça s'en approche.

Step by StepOù les histoires vivent. Découvrez maintenant