Souvenirs

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10 septembre 2035.

Le stress coincé au creux de mon estomac, je suis de loin mon père. Les couloirs de la maternité sont peints dans une couleur pastel qui, étonnement, me donne la nausée. Une petite odeur que je n'arrive pas à identifier me fait froncer le nez tandis que les pleurs de bébés m'angoissent un peu plus. Cet endroit me fait flipper. Mon père s'arrête finalement devant une porte qui semble quelconque et se tourne vers moi.

Depuis hier, ma famille m'encourage à aller voir Natalia et lui raconter la vérité. Même avant ça, mon père m'a souvent supplié d'accepter de tout lui narrer mais j'ai toujours refusé de le faire. Je pensais qu'en agissant ainsi, je la protégeais. Après tout, je ne comprenais pas ce que ça allait lui apportait d'apprendre comment était notre mère avec moi.

Mais depuis sa thérapie et le fait qu'elle m'ait rayé de sa vie, je me rends compte que j'aurais peut-être dû le faire. Cela n'aurait peut-être rien changé mais au moins, elle l'aurait fait en ayant toutes les cartes en main. Je m'en voudrais sûrement moins d'ailleurs. Mais c'est ainsi.

Les gens commettent des erreurs. Beaucoup pour le bien de leurs proches mais peu importe les bonnes intentions que l'on peut avoir, les mensonges et omissions font toujours du mal. C'était quelque chose que j'avais appris à mes dépens ces dernières années et que je réalisais depuis peu.

— Ça va aller ? m'interroge mon père en posant une main aimante sur mon épaule.

Je hoche la tête machinalement. Je doute sérieusement que ça se passe bien, Natalia avait toujours eu un sacré caractère. Mais dans son malheur, ça faisait mes affaires. Elle avait dû subir une opération la veille, ce qui faisait qu'elle ne pouvait pas se lever et encore moins fuir loin de moi en me voyant apparaître.

Mon père abaisse la poignée et pousse la porte. Il s'avance, un sourire fier aux lèvres. Le papy qu'il est devenu ressort et m'émeut. Je l'entends saluer Natalia et moi, je reste prostré à l'entrée de la chambre. Je repense aux mots qu'Iven m'a soufflé alors que nous étions sur le quai de la gare avant mon départ.

Ta sœur a besoin de la vérité pour se construire, oblige-la à l'écouter.

J'inspire à fond et pénètre à mon tour dans la pièce. Je referme la porte derrière moi alors que Natalia enlace notre père. Elle me paraît plus frêle que la dernière fois que je l'ai vue. Sa peau est toujours aussi mate que la mienne. Elle s'est coupé ses cheveux bruns en un long carré et même s'ils ne sont pas propres, cela lui va bien.

Quand ils se séparent, elle me remarque aussitôt et son regard sombre se durcit dans la seconde. Ses mâchoires se serrent me donnant l'impression qu'elle va se casser quelques dents dans ce geste. Elle n'est pas ravie de me voir. Je déglutis.

— Dégage de là ! Tu n'as rien à foutre ici, tu n'es plus de ma famille.

Je savais que je ne serais pas reçu comme le messie, mais ça fait quand même mal.

— Natalia ! la reprend sèchement notre père. Maintenant ça suffit cette guerre froide que tu mènes contre ton frère.

— Papa, il a...

— Il t'a sauvé, la coupe-t-il en se laissant tomber sur le fauteuil mis à disposition.

Il enfouit sa tête entre ses mains. J'ignore s'il pleure ou pas mais je n'ose pas bouger et briser le silence qui s'est imposé après sa déclaration. Natalia passe son regard entre lui et moi, cherchant à savoir s'il a dit vrai. Je soupire et me laisse glisser contre le mur. D'ici, bien qu'inconfortable, je peux voir ma famille tout en ne risquant pas de tomber parce que mes jambes se seront défilées.

stay with me. - idy 5Où les histoires vivent. Découvrez maintenant