Si elle avait eu la chance d'être épargnée d'un mal de crâne phénoménal, elle n'en menait tout de même pas large au petit-déjeuner. Elle avait généreusement garni son assiette de bacon, le savourant plus que n'importe quel autre jour. Minerva la regardait visiblement amusée de constater la gourmandise dont elle pouvait faire preuve.
« Je vois que vous avez bon appétit ... Mais apparemment, c'est le sommeil qui vous a manqué.
-Cela se voit tant que ça ? »
Elle était entre la gêne et l'horreur, quelque peu honteuse d'afficher un tel niveau de fatigue face à sa directrice, espérant ne pas avoir à s'expliquer.
Elle avait espéré pouvoir rapidement rentrer chez elle, une fois sa journée terminée, pour pouvoir se reposer, mais malheureusement, à peine eut-elle refermé la porte de sa classe qu'elle reçut un petit mot de Minerva qui l'invitait à venir prendre le thé. Elle s'était déjà rendue dans les appartements de l'Ecossaise, il y a un peu plus de dix jours, ce qui lui mis immédiatement la puce à l'oreille. Si elles avaient parlé principalement de son nouveau poste, la dernière fois, il n'en serait pas de même cette fois-ci.
Il y avait fort à parier que, comme tous les directeurs de cette école, Minerva avait des yeux partout. Aurait-elle pu déjà être au courant de ce qu'il s'était passé entre Severus et elle ? Devait-elle craindre des réprimandes ? Même si elle n'était plus une enfant qui recherchait absolument la reconnaissance de ses aînés, Hermione n'aurait pas aimé apprendre qu'elle était la cause d'une quelconque forme de déception chez eux.
Elle ne fit donc qu'un bref arrêt chez elle, juste le temps de déposer son sac pour être moins encombrée avant de se rendre dans les appartements privés de son ancienne directrice de maison. Cette dernière l'attendait déjà, deux tasses fumant sur la table et embaumant la pièce d'une délicate odeur.
« Alors, Miss, ce sont vos élèves qui vous donnent tant de tracas que vous ne parvenez plus à dormir ?
-Non ... Mais je pense que ça, vous le savez déjà, n'est-ce pas ?
-Effectivement. Remplacer Severus, au pied levé n'est pas une chose évidente, même lorsque l'on s'y attend.
-Vous vous y attendiez ? »
Elle avait senti que cette visite n'était pas innocente et avait rapidement compris qu'elle était au courant pour ce qu'il s'était passé, entre Severus et elle, mais elle n'aurait pas imaginé que Minerva s'était attendue à son absence.
En savait-elle beaucoup plus à ce sujet ? Lui avait-il, lui-même, confié ses intentions ? Depuis combien de temps était-elle au courant qu'il allait s'absenter ? Si tout ceci était prémédité, avait-elle eu raison de croire qu'elle en était la cause ? Les questions se succédaient dans son esprit et elle ne parvenait pas à faire un tri. C'était comme percer une énigme dans le noir complet.
« Je connais Severus depuis de nombreuses années maintenant et je pense avoir, aujourd'hui, une vision de lui qui réussit à englober toutes les facettes qu'il a pu arborer. Ne vous y trompez pas : je ne l'ai pas toujours apprécié. Je ne compte d'ailleurs plus les nuits où Albus essayait de me convaincre qu'il était de notre côté. A l'époque, j'étais tiraillée entre la confiance que j'avais pour mon amie, le directeur, et la méfiance que je ressentais pour ce collègue et ancien élève.
Mais le temps a fait son œuvre, me poussant à voir qu'il y avait dans ce monde des êtres qui se battaient irrémédiablement contre une part sombre. Il serait erroné de dire qu'il a toujours été quelqu'un de bien, mais il serait injuste de le cantonner aux erreurs qu'il a pu commettre dans le passé.
Quoiqu'il en soit, j'ai appris à le connaître, à échanger avec lui. J'ai appris à respecter ses silences et à accepter ses remarques acerbes et tout ce qu'elles pouvaient dissimuler. »
Elle écoutait ces confessions attentivement, comprenant le point de vue qui lui était exposé. Elle non plus n'avait pas toujours su estimer l'homme qu'il était, lui attribuant de mauvaises intentions.
Dans le fond, ils étaient tous dans l'ignorance, croyant quelque peu aveuglément à ce qu'il y avait de plus évident à admettre. S'il devait y avoir un méchant dans cette histoire, ce serait obligatoirement ce professeur à l'allure sinistre et sombre, vêtu de noir et aux remarques aussi piquantes que tranchantes. Il avait joué son rôle à la perfection, personne n'avait pas cherché plus loin et il n'allait certainement pas les mettre sur la bonne voie.
« Il ne m'a pas échappé que, depuis quelques temps, vous aviez, l'un pour l'autre, des regards qui étaient semblables et bien différents de ceux que vous octroyiez aux autres. Si j'admets que vous avez été la première à voir votre regard sur lui évoluer, j'espère que vous avez compris, avec ces derniers jours, que vous n'étiez pas la seule.
-Oh, madame, je ne voudrais pas m'avancer concernant ce que pourrait ressentir, ou non, le professeur Snape, à mon égard.
-Et bien si vous n'osez vous risquer, je me vois obligée de le faire. Pensez-vous qu'il soit du genre à agir aussi légèrement avec tout le monde ?
-Je sais que ce n'est pas le cas, mais je n'ai pas envie ... »
Elle ne savait pas comment finir cette phrase. Même si elle avait pris conscience de beaucoup de choses, concernant les sentiments qu'elle pouvait éprouver, elle n'avait pas envie de se laisser aller à des spéculations ridicules concernant les siens.
De plus, elle ne comprenait pas vraiment où Minerva voulait en venir en ayant avec elle, aujourd'hui, cette conversation. Allait-elle pouvoir avoir des explications ? S'il l'avait mandatée, elle, pour transmettre un message, plutôt que de le lui délivrer en face, elle savait qu'elle s'en sentirait blessée. L'estimait-il si peu que pour ne pas trouver utile de venir la voir en personne ?
Sans qu'aucun mot ne soit prononcé, l'écossaise comprit de quoi il s'agissait, voyant très clairement la détresse de la jeune femme en face d'elle. Dans geste infiniment maternelle, elle prit cette main presque tremblante, essayant d'apporter à sa propriétaire un maximum de réconfort.
« Vous n'avez pas envie de croire à une chimère et que cela ne soit plus blessant qu'autre chose. Mais je peux vous assurer que cela n'a rien d'une invention de votre esprit. L'amour est une chose bien complexe, qui peut se montrer blessante et cruelle par moments, qui ne connait pas de justice ou de logique. Mais l'amour sait parfois frapper aux bonnes portes, au bon moment, devant alors salvateur et aussi apaisant que le baume le plus puissant qu'il soit.
-Dans ce cas, pourquoi suis-je ici, seule ?
-Parce que, ce que vous ne pouvez envisager, il ne le peux pas non plus. Vous êtes, tous les deux, enfermés dans ce cercle de pensée, refusant de croire que ces sentiments peuvent être partagés. Vous êtes ici, lui est parti. Vous êtes deux personnes différentes, réagissant différemment à la même chose. Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise option.
-Et pourquoi me dire tout ça ?
-Parce que je connais la douleur d'un cœur malheureux et je ne peux admettre que deux personnes qui me sont chères l'expérimentent. »
Elle était touchée, c'était indéniable. Elle se sentait privilégiée, d'une part, et reconnaissante, d'autre part. Privilégiée de pouvoir être considérée en si haute estime par une sorcière qu'elle respectait et admirait, reconnaissante de savoir que Severus avait, tout comme elle, des amis qui seraient prêts à prendre les devants pour lui venir en aide et s'assurer de son bonheur. Parce qu'au fond, que leur fin soit heureuse ou non, tout ce qui lui importait était qu'il puisse profiter d'un bonheur qu'il avait amplement mérité.
Mais maintenant, pouvait-elle croire que ce bonheur se trouvait peut-être avec elle ?
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Un nouveau jour
Fiksi PenggemarL'amour naît parfois d'une étincelle, il prend du temps à mûrir mais éclos toujours à temps. Jours après jours, Severus et Hermione apprennent, craquent, se séparent et qui sait ... L'étincelle de Noël les réunira peut-être. Edition 2022 des calendr...