17 décembre

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Elle le regardait dans les yeux, se raccrochant presque à cette tasse de thé qui lui réchauffait les doigts. Il lui avait proposé de se voir et elle devait bien avouer qu'elle avait besoin d'avoir une discussion franche avec lui.

La veille, elle s'était laissée dépassée par ses sentiments, se sentant balayée par une vague d'inquiétude qui s'était transformée en colère sourde. Elle avait eu besoin de laisser exploser cette rage, de se sentir transcendée par cette douleur et de la laisser prendre le contrôle et s'exprimer. Aujourd'hui, elle se sentait plus calme, plus apaisée et bien plus apte à entendre ce qu'il avait à lui dire. Elle se sentait rassurée qu'il veuille lui donner des explications, qu'il se sente, d'une certaine manière, redevable face à elle.

Ils n'avaient pas dit un mot, depuis qu'elle était entrée et s'étaient simplement installés dans le salon, là où deux tasses de thé les attendaient déjà. Visiblement, entamer une conversation autour d'un thé ne devait pas être propre à Minerva.

Ils s'étaient installés l'un à côté de l'autre de manière très naturelle, mais c'était comme si cette proximité les mettait maintenant mal à l'aise. Ils n'osaient pas bouger et leur seul lien se faisait par le regard. Ils étaient chacun ancré dans les yeux de l'autre, comme s'il s'agissait de leur seule bouée de sauvetage, pour ne pas partir à la dérive.

« Je sais, que ça n'a pas dû être simple ... Mais j'espère que tu comprendras que c'était nécessaire.

-Nécessaire pour qui ?

-Pour moi et peut-être aussi pour toi.

-C'était nécessaire pour moi de ressentir tout ça ? De me demander si tu étais parti à cause de moi, si j'avais fait quelque chose de mal ou si je n'avais pas été 'assez bien' que ce que tu attendais.

-Non, je ne parle pas de ça ...

-Alors de quoi ? »

C'était la première fois qu'elle lui parlait avec une telle froideur mais elle en avait terriblement besoin. Elle avait besoin de lui faire ressentir cette indifférence qu'il avait eu à son égard, de se cacher, elle aussi, derrière cette carapace.

« J'avais besoin de faire le point, de prendre la distance et de clarifier les choses.

-Et maintenant ? Tout a changé en quelques jours ?

-Non.

-Et en quoi cela a été bénéfique pour moi ?

-Je ne voulais pas que tu puisses souffrir. Parce que même si j'ai agis égoïstement en partant, j'ai agis en sachant que, de la sorte, je pourrai te protéger de moi. »

Elle resta un instant muette, ne sachant pas quoi répondre à cette affirmation. Il y avait tellement de sincérité dans ce qu'il venait de dire et, d'une certaine manière, elle comprenait qu'il s'agissait pour lui presque d'un aveu de faiblesse. Elle pouvait aisément imaginer que, comme pour tous ceux qui ont fait la guerre, il avait été marqué à vie. Elle savait que la vie n'était pas rose tous les jours et que, comme tout le monde, il avait ses démons, ses songes noirs.

Quand elle avait constaté son absence, elle n'avait pas imaginé qu'il s'agisse de cela. Mais si effectivement, d'anciennes craintes étaient ressurgies, aurait-il pu se montrer blessant auprès d'elle ? Elle savait qu'il n'aurait pas pu être violent dans ses gestes, mais qu'en est-il de ses paroles ? Il n'était plus à démontrer qu'en matière de paroles acerbes et caustiques, il excellait.

Elle se sentait presque ridicule à fondre, aussi rapidement, en buvant ses paroles, mais qu'aurait-elle pu faire d'autre ? Agir autrement aurait été renier la personne qu'elle était. Elle croyait en ses propos tant la sincérité était palpable.

Délicatement, il avança la main pour prendre celle d'Hermione, baissant le regard, comme pour s'assurer de ce qu'il faisait. Il ne parvenait pas à savoir si elle le comprenait et, secrètement, c'est tout ce qu'il espérait le plus. Il avait besoin de voir l'approbation et la compréhension dans son regard, de voir que ce risque qu'il avait pris n'avait pas été vain.

Durant ces quelques jours, il s'était fustigé, s'en voulant terriblement d'avoir pu succomber de la sorte. Il avait toujours eu une ligne de conduite à laquelle il s'était tenu et voilà que subitement, il s'écartait de ce chemin, pourtant si clair.

Plus tôt, il avait eu l'impression qu'il n'aimerait jamais que Lily et surtout, qu'il l'aimerait toute sa vie. Mais avec le temps, les années passant, il savait que cet amour avait fané, pour finalement s'évaporer. Pour autant, il s'était toujours interdis d'explorer ses sentiments avec une autre personne, ayant la désagréable impression d'agir comme un traître. C'était trop facile de reprendre une vie normale quand il savait qu'il avait mis fin à la sienne. Il se devait de respecter sa mémoire et de porter cette croix jusqu'à la fin.

Mais voilà qu'elle était apparue : Hermione Granger. Et tout ce qui aurait pu les séparer semblait, au contraire, les rapprocher, chaque jour un peu plus. Au début de ce mois de décembre, tout s'était enchaîné et il avait eu besoin de prendre de la distance pour essayer de se raisonner.

Il avait envie de croire qu'il s'agissait d'une sorte de pensée passagère, quelqu'un qu'il pourrait aisément chasser de son esprit. Il avait envie de se persuader qu'elle se représentait rien, qu'elle n'était qu'une distraction de passage et qu'elle n'aurait aucun impact sur sa vie. Mais en quelques jours, elle avait pris, dans son esprit et dans son cœur, plus de place que Lily ne l'avait jamais fait.

Elle avait balayé toutes les certitudes qu'il pouvait avoir, lui démontrant même que ce qu'il avait pu ressentir était bien loin de ce grand frisson que représente l'amour. En comparaison, les sentiments qu'il avait pu éprouver avant semblaient si pâles et sans saveur. Alors qu'avec elle, tout était subitement si vivant et concret.

Il avait dû se rendre à l'évidence, s'avouer à lui-même qu'elle était certainement tout sauf une passade et finalement, il ne s'en sentait même plus coupable. C'était différent de toutes les autres fois. Elle était différente de toutes les autres.

Tout ce qu'il avait à espérer, maintenant, c'est que ce laps de temps ne lui avait pas permis, à elle, de comprendre qu'elle n'avait rien à attendre d'une relation avec lui. Il était comme suspendu à ses lèvres, attendant une réponse ou n'importe qu'elle autre chose qui aurait pu lui prouver qu'il ne s'était pas torturé l'esprit pour ressortir encore plus brisé.

« Je n'avais pas envisagé les choses sous cet angle, je dois bien l'avouer. Mais je dois aussi avouer que ces quelques jours m'ont peut-être été plus utiles que ce que je pensais.

-Dans quel sens ?

-Je me suis posée beaucoup de questions, sur toi, sur la manière dont tu avais réagis mais je me suis aussi questionnée sur moi-même et ce que je pouvais ressentir.»

Elle était maintenant presque hésitante, regardant leurs mains jointes sans savoir réellement quoi faire. Mais puisqu'il s'était dévoilé, face à elle, ne lui devait-elle pas, d'une certaine manière, la même transparence ?

« J'ai longtemps crû que ce que je ressentais à ton égard n'était qu'une amourette d'adolescente, simplement parce que j'étais adolescente quand j'ai réalisé que tu me plaisais. Puis, ce sentiment s'est intensifié, les années sont passées mais je ne voulais pas envisager que cela puisse aller plus loin.

Je n'avais pas envie de me bercer d'illusions inutiles. Même si ces pensées restaient de l'ordre du fantasme, cela m'allait à merveille. Et puis, il y a eu ce bar et les rendez-vous qui s'y succédaient. Je me persuadais que ce n'était pas raisonnable, que je ne devais pas continuer, mais c'était systématiquement plus fort que moi.

Si quand tu étais là, je parvenais à ne penser à rien d'autre qu'au moment présent, ton absence à créer un véritable vide en moi. J'ai su, que ce que je ressentais allait bien plus loin qu'un béguin d'adolescente ou qu'un fantasme stupide. Ce dont j'ai besoin, c'est toi. »

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