9Egara - L'éveil du dragon

Prologue (important)

Dégouté de ce qu'il avait sous les yeux, le vieil homme renonça à espérer. Il contempla son compagnon ailé d'un regard triste alors que celui- ci devenait aussi sombre que la nuit. À mesure que la bataille faisait de plus en plus de victimes, les âmes meurtries venaient se réfugier dans le royaume des morts auprès des dieux qu'ils avaient tant adorés. Alors qu'une énième explosion amenait une nouvelle vague de défunts, l'homme, observateur muet depuis la plus haute tour du palace, sorti de son lourd silence. D'une voix sombre, il fit s'arrêter les mortels encore vivants. Tous s'immobilisèrent pour écouter la voix depuis les cieux, stupéfaits de voir une intervention de leur divinité. Autrefois doux, la rage et les guerres incessantes avaient fini par rendre le dieu sévère et amer. Il leva la main et immédiatement, son compagnon déploya ses immenses ailes noires, entravant la lumière du soleil. Une gigantesque ombre se dessina aux formes de l'animal sur la terre battue. D'un geste puissant, la bête s'envola et fondit à une vitesse vertigineuse sur le champ de bataille. Son corps musclé apparut aux yeux des hommes au centre du soleil si bien que l'astre s'effaça à mesure que le dragon s'approchait. D'abord émerveillés par la vision, le cri rauque de l'animal fit comprendre aux soldats la colère de leur Dieu. Tous se mirent à courir, paniqués. Les chevaux hennissaient de terreur, le blanc des yeux visible, se cabrant, galopant et bousculant tous ceux sur leur passage. L'immense bête se posa dans un bruit sourd et domina de toute sa masse les kilomètres de champs de bataille. Sans une seconde d'hésitation, il tendit son long cou et ouvrit sa gueule ensanglantée pour en laisser s'échapper une colonne de feu. Des flammes si chaudes qu'elles se teintaient d'abord d'un bleu froid avant de virer au rouge orangé. Des cris percèrent l'atmosphère pesante ; des cris de douleur, ceux des soldats, des chevaux qui brulaient et agonisaient lentement. En quelques minutes seulement, les grandes étendues furent débarrassées de toute trace de vie par les monstrueuses flammes de l'enfer. Devant cette vision apocalyptique, le Dieu acquiesça et s'adressa à son ami depuis les cieux: « Va Sheitan. Vole à travers les contrées, par-delà les océans et les montagnes. Tu as 2000 ans. Si au bout de ces deux millénaires tu ne trouves pas un peuple qui ne soit pas belliqueux ou malfaisant, je pardonnerai aux hommes et leur offrirai mon aide... Mais, malgré ta force, j'ai la certitude qu'ils s'en pendront à toi dès qu'ils te verront. Tu iras donc voir mes descendants et prêteras ton pouvoir à celui que tu juges le plus digne. Il partagera ta quête et tu le protégeras en mon nom.». L'animal baissa la tête en signe de respect et s'en alla d'un battement d'aile.