9Egara - L'éveil du dragon

Chapitre 2 : Fuite

Les rayons du soleil vinrent se coller à ma peau pour me réveiller. D'abord aveuglée par cette lueur, mes yeux s'adaptèrent vite au changement. Je pus alors observer les rayons s'engouffrer dans l'étable au travers d'un hublot situé au-dessus des portes d'entrée. En bas, les chevaux mangeaient déjà le foin étalé un peu partout sur le sol. Je me retournai pour voir si mes amis dormaient toujours : leurs paupières closes et leurs respirations régulières m'indiqua qu'ils sommeillaient encore. C'était la première fois que je me levais avant eux. J'en profitai pour descendre discrètement de la mezzanine pour préparer nos affaires. D'abord celles d'Emma, puis celles de Marc, je finis par les miennes. C'était ma façon de me rendre utile. Je repris les vêtements mis à sécher sur les poutres et les pliai soigneusement pour les remettre dans les sacoches. La carte, suspendue avec les autres affaires qui avaient été mouillées, ne montrait plus que des traces noires d'encre coulée. Heureusement qu'on avait pu en récupérer une nouvelle, bien que le mot « nouveau » soit assez peu adapté à la situation. Cependant les informations qu'avaient donné les fermiers seraient précieuses aux mages. Je finis par me dire que cette tempête avait été bénéfique au voyage. Enfin, cette rencontre me fit voir une chose : les impotents de la capitale n'étaient pas les seuls à s'opposer à la reine. Les rebelles n'étaient pas des cas rares: ils avaient des alliés parmi le peuple. Plus je m'éloignais de cette ville de malheur, plus j'étais soulagée de m'en être échappée. Les rumeurs sur les rebelles qui ne cessaient de les dépeindre comme des brigands assoiffés de sang n'étaient qu'un tissu de mensonges. Si je m'en doutais déjà auparavant, j'en étais maintenant certaine.

Le bruit du petit bois qui craque me fit sortir de mes pensées. La carte ondulée par la pluie encore dans les mains, je me retournai pour faire face à mes deux compagnons émergeant tout juste. Les sourires qu'ils affichèrent en balayant du regard l'étable témoigna de leurs enchantements :

« Tu as tout rangé ! Tu es géniale ! » dit Marc en liant à ses mots un câlin inattendu.

Je piquai un fard, inhabituée à recevoir ce genre de démonstrations amicales. Marc dû s'en rendre compte car il relâcha son étreinte et m'ébouriffa les cheveux d'un geste de la main. Emma me remercia à son tour tout en ajoutant que les étreintes du jeune homme étaient courantes et qu'il faudrait s'y habituer.

« Et ne surtout pas hésiter à le repousser quand il devient lourd ! » conclut-elle pour taquiner son ami en lui jetant un regard lourd de sous-entendus.

C'est alors que trois coups contre le bois résonnèrent dans l'étable. Marc se tut et jeta un coup d'œil à Emma qui secoua la tête. Je déduisis qu'il lui avait demandé si elle ressentait un flux de magie. Le mage se dirigea vers la porte et l'ouvrit en grand pour saluer le fermier qui nous avait accueilli.

« Prêts ? »

L'expression qui nous apparut en ouvrant la porte était loin d'être celle escomptée. Nous qui pensions voir un homme à moitié réveillé ou bien quelqu'un pressé de retrouver son troupeau se présenter... à la place ce fut un homme stressé, le front recouvert de sueur qui nous fit face.

Marc fronça les sourcils et s'approcha d'un pas pressé pour comprendre ce qui pouvait mettre le fermier dans cet état. Il était évident qu'il se passait quelque chose d'important. L'homme, haletant, parvint avec difficultés à articuler quelques mots pour nous expliquer la situation:

« J'étais au village... ce matin... Les soldats... réquisitionnent tout... Ils seront bientôt... bientôt là. »

Le bruit de plusieurs chevaux martelant le sol de leurs sabots effleura au même moment mes oreilles. Le son fut encore lointain, cependant la cadence effrénée qu'ils eurent les mèneraient d'ici quelques minutes à peine aux portes de l'exploitation.