9Egara - L'éveil du dragon

Chapitre 12: Tenir sa promesse

-Nous rentrons, ordonna Max doucement.

Alors qu'il entreprit sa descente, Sheitan (ou Sophie) l'en empêcha en se redressant d'un mouvement brusque. Le geste provoqua un recul général, mais tous comprirent ensuite qu'il n'y avait là aucun danger. Max adressa un regard interrogateur au dragon, qui lui répondit en déployant ses ailes. Il fronça les sourcils, puis comprit:

"Je vois, tu veux tenir ta promesse maintenant."

-Max? Qu'est ce que vous faites? demanda Emma alors qu'ils s'éloignaient.

"On se retrouve au Q.G!" cria-t-il à ses compagnons, car déjà Sheitan prit de l'élan pour se propulser dans les airs.

Tous d'eux s'envolèrent en délaissant les rebelles sur le champ de bataille. Dans un mouvement puissant mais gracieux, ils prirent de l'altitude pour dominer l'ensemble de la forêt. La poussée nécessaire pour décoller fut difficile à encaisser mais rapidement, un sentiment de légèreté inonda le mage. Max, bien accroché, ferma d'abord les yeux à cause du vent mais fut incité à les rouvrir par un grognement du dragon. Ses paupières se soulevèrent et il découvrit alors le monde sous un nouveau jour. Des étendues magnifiques aux couleurs multiples formant un tableau de toute splendeur, les nuages, rosis par le soleil couchant et surtout, la sensation de l'air s'écoulant sur sa peau. Cela n'eut rien à voir avec son baptême de vol durant lequel il fut plus concentré sur la bataille que sur la beauté de ce qui l'entourait. Émerveillé, il se redressa et remplit ses poumons d'un air limpide et pur en une longue inspiration. Ses muscles se détendirent en même temps que ses craintes se dissipèrent. Ce fut comme se sentir renaître, à des centaines de mètres de la terre, libéré de ses chaînes. Il eut l'étrange impression d'enfin se trouver à l'endroit où il se sentait vraiment lui-même. Les jambes arquées, le dos droit, il était en parfait équilibre, comme s'il avait chevauché un dragon toute sa vie.

Les paysages défilèrent sous eux et la plaine avait déjà disparu. À l'est, la silhouette de la montagne se détacha de l'horizon et derrière elle, l'océan qu'il aimait tant. Comme s'il avait lu dans ses pensées, le dragon vira vers le bastion, ce qui prit au dépourvu Max. Le mage perdit l'équilibre le temps d'une seconde et se rattrapa in extremis en s'accrochant aux écailles dorsales. Il parvint cependant à suivre le mouvement et se coucha sur l'encolure de la bête. Soudain, le dragon se redressa et commença une ascension, jusqu'aux nuages. Ses ailes puissantes fouettèrent l'air et déformèrent les nuages sur leur passage. Leurs corps fendirent ces étendues blanches qui déposèrent des gouttes d'eau sur leurs peaux. La couche nuageuse était épaisse et ils se retrouvèrent dans un paysage immaculé de blanc. Les plus imposants des nuages semblaient être des montagnes. Le bout des ailes du démon les fendit lorsqu'ils passèrent près d'eux, laissant un couloir dénué de blanc. Lorsque leurs têtes frolèrent un nuage, Max tendit le bras pour toucher des doigts cette nouvelle découverte. Etonné par le froid qui assaillit son épiderme, ses phalanges se baissèrent vivement. Il montèrent plus haut encore et une aquarelle des plus douces les attendit: le ciel se décomposait vers la terre, allant du bleu nuit au rose, passant par le violet et l'orange. En dessous d'eux, les nuages avaient disparu, offrant un panorama gigantesque sur les feuillages colorés par le crépuscule. Max releva la tête et découvrit au-dessus d'eux les milliers d'étoiles. Jamais auparavant il n'avait eu l'occasion de les voir d'aussi près. Pas un pégase ne volait aussi haut. On aurait dit un champ de fleurs aux boutons blancs immaculés. Au centre de cette étendue, les deux lunes absorbèrent les parties du ciel délaissées par le soleil, telles deux sœurs, deux princesses toutes puissantes dominant pour quelques heures la voûte céleste. Plus le soleil diminuait, plus les reflets des astres illuminaient la forêt interdite. De là où ils étaient, Max et Sophie purent admirer les deux faces qu'offrit la fin de journée, semblable à une bataille entre la lumière et l'obscurité. Les astres peignaient des centaines de tableaux, semblant presque raconter chacun une histoire passionnante. L'air était froid, mais d'une pureté incroyable.