Chapitre 3 - Avestil

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Chapitre 3- Avestil

Ou « le plus gros repère de malfrats à 100 km à la ronde »

« Nous y voilà enfin ! »

De grands bâtiments en pierre s'élevaient devant nous. La large route, faite avec du vrai bitume et non plus de la terre battue que nous parcourions depuis des jours, était empruntée par tous types de voyageurs. Des charrettes de marchands, des cavaliers comme nous et des piétons qui se risquaient à se mêler au flux. Nous n'avions pas vu autant de personnes d'un coup depuis notre départ de la capitale. Pour conserver notre identité secrète, nous enfonçâmes le plus profond possible les capuches de nos capes sur nos têtes. Heureusement, comme personne ne me connaissait, je pus conserver un champ de vision plus large que mes amis et profiter pleinement de ce que je voyais. Mis à part la capitale, je n'avais visité aucune autre ville auparavant. Bien qu'Avestil ne rayonnait pas par sa propreté ni même par son architecture, ce fut très plaisant de découvrir d'autres enceintes que celles que j'avais toujours sillonnées.

A l'entrée de la ville, la plupart des maisons ne dépassaient pas 2 étages. Les poutres qui leur servaient de colombages manquaient cruellement d'entretien. Quelques unes d'entre elles étaient transpercées par des lames de couteaux ou d'épées, certaines encore plantées dans le bois sec. La taille des maisons augmentait à mesure que nous nous enfoncions dans la petite cité pour atteindre jusqu'à 4 ou 5 étages de haut. Il y avait une certaine ressemblance entre les bâtiments que je voyais et ceux des quartiers pauvres de la capitale. Leurs murs moisis, la peinture effritée et leurs charpentes contusionnées étaient identiques. Je finis par me demander si ces vieilles maisons insalubres n'étaient pas communes à tout le continent.

Le brouhaha résonnait dans la ville et les altercations s'élevaient à chaque coin de rue. La population se résumait à des hommes aux ceintures armées, l'air peu aimable et le regard qui vous passe l'envie de vous arrêter discuter avec eux. Beaucoup portaient des tatouages, sur les bras, la nuque et parfois le visage. Je retrouvais certains d'un corps à l'autre et compris qu'ils étaient les emblèmes de sortes de gangs locaux. Les femmes, un peu moins nombreuses que la gente masculine, ne transpiraient pas non plus la sympathie. Nous poursuivions notre route sur la grande artère encore longtemps. Contrairement à ce que je pensais, nous n'étions pas dévisagés par tous, ou du moins ils étaient assez discrets pour que je ne m'en rende pas compte. Finalement, nous étions loin d'être les seuls vêtus de longues capes noires qui voulaient clairement dire « ne nous dérangez pas ». D'ailleurs, toute effusion de couleurs était rare: le noir régnait en maître. Cette fois je ne perçus aucune ressemblance avec la fantaisie légendaire de la capitale, où il n'était pas rare de voir des tenues si brillantes qu'elles éblouissaient la plupart des passants.

Les nombreuses boutiques de ravitaillement étaient très courues mais pas autant que les innombrables bars. J'étais prête à parier qu'une enseigne sur deux servait de l'alcool, véritable religion de la ville. Et qui appelle bars, appelle hommes ivres morts sur la chaussée qui vous aborde avec une voix chancelante pour vous demander quelques pièces ou si on voulait passer la nuit avec eux. Je finis par décider de renommer Avestil « stéréotypesville » tant le schéma devenait grotesque.

Marc tourna enfin dans une rue sinueuse moins fréquentée que l'axe principal mais aussi moins bien éclairée. Par la suite il s'engagea dans d'autres passages tous les plus escarpés les uns que les autres avant d'enfin faire halte devant un hôtel. Sa façade aux murs craquelés ne donnait pas envie d'y faire halte, et encore moins les déjections qui traînaient devant la porte. Il devait être 19 heures passé lorsque l'on put enfin mettre pied à terre. Je faillis tomber sur les fesses lorsque je sautais du dos de mon cheval après une longue journée de chevauchée intense. Heureusement, Marc me rattrapa de justesse par le bras et m'aida à me rééquilibrer. Je le gratifiais d'un large sourire qu'il me rendit avec plus d'éclat. Il venait de me sauver d'une chute sur le sol le plus crasseux que j'avais jamais vu, pire encore que la capitale, c'est dire.

9Egara - L'éveil du dragonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant