EDEN Tome 3

Prologue: Bienvenue en enfer...

Aria

Cinquante-et-un.

C'était le nombre de jours, qui s'étaient écoulés depuis que Maze avait fermé les yeux. M'abandonnant dans la pénombre d'un univers sans la lumière de ceux-ci.
Papillonnant dans un monde que j'espérais plus doux et bien plus calme que le mien actuellement.

Quasiment deux mois que mon âme réclamait sans cesse la sienne.

Je comptais chaque jour, chaque heure, chaque minute et même les putain de secondes qui me séparaient de la dernière fois, où mon regard avait pu plonger dans ses billes bleues, grises qui m'hypnotisaient tant.

Depuis, je trouvais tout terne, tout était devenu fade.

La vie sans lui, n'avait plus du tout la même saveur, ni le même éclat.

Sa présence, son rire, ses sourires en coin, sa voix, tout me manquait terriblement.

Mon monde s'était assombri soudainement, quand mon cœur avait éclaté ce jour-là, des milliers de morceaux s'étaient répandus partout dans les gradins et le seul qui aurait pu le réparer de nouveau, n'était pas là, roulant à vive allure, sûrement sur des nuages à l'heure actuelle.

Chaque journée était toujours plus difficile que la veille, mais je devais faire l'effort surhumain d'être forte et souriante pour nos familles et surtout pour lui.

Beaucoup de choses avaient changé depuis cet après-midi d'avril, moi principalement...

Je comprenais mieux maintenant, pourquoi Maze avait si peur à l'époque que je chavire par-dessus bord à la mort de Strodanoff.

Mais c'était trop tard désormais.

J'avais sombré pour lui et uniquement lui.

Il ne me reconnaîtrait certainement plus...

Ma peine m'avait complètement métamorphosée, m'emportant sans efforts dans la noirceur des ténèbres, celles dont il m'avait parlé la fois où nous étions allés au stand de tir.

Le changement avait été si rapide, que moi-même, je n'avais pas vu tout de suite, à quel point mon cœur abîmé avait noirci, se remplissant de rancœur, d'esprit de vengeance et de haine pure, tout ça s'infiltrant par chaque impact qu'il avait subi ce jour-là.

On me l'avait pris et la colère ou plutôt la rage qui brûlait en moi depuis l'accident était devenue mon énergie première.

Rien d'autre ne me motivait.

Sans elle, j'aurais assurément passé mes journées à pleurer et à me morfondre dans le fond de mon lit, attendant patiemment que le sommeil me ramène enfin jusqu'à lui.

J'aimais maintenant voir l'obscurité de la nuit noire tombée sur la ville, me rapprochant un peu plus de ce moment où j'allais enfin le retrouver, le sentir de nouveau à mes côtés, recouvrer son odeur et pouvoir de nouveau respirer normalement, soulageant pendant quelques heures seulement, ce chagrin bien trop douloureux à supporter, qui me déchirait littéralement les entrailles tout au long de mes journées.

Et dès l'aube, je le quitterais de nouveau pour rejoindre ce monde triste et froid sans sa présence et sa lumière.

Faisant semblant d'aller bien, souriant à chaque fois que nécessaire comme un putain de robot programmé, travaillant d'arrache-pied, en espérant le rendre fier de moi, mais tout en cachant toujours mon état de santé à tous.

Ou presque.

- Hey! Mange un peu tesoro... (Trésor)

Mes mensonges n'échappaient malheureusement pas au regard perçant et aussi sombre que mon cœur.

Celui de Jullian Antony Cruz.

Lui seul arrivait à déceler toute cette foutue imposture, que je m'efforçais de faire tenir en place. Mais jamais, il ne m'avait questionné ou même clairement dit les choses.

Prenant toujours soin de moi, à sa manière bien sûr et surveillant que je ne bascule jamais trop loin, me laissant faire toujours silencieusement, pour extérioriser au mieux, ma peine et mes douleurs.

Chez celui qui ne parlait que très peu, un simple mange, un peu comme aujourd'hui, voulait dire, je sais que tu n'as rien avalé depuis hier.

C'était comme ça que ce latino, avec ses iris couleur d'encre et sa petite étoile tatouée, était devenu essentiel à ma survie dans la noirceur ce monde, devenant ma bouée de sauvetage dans cet océan de merde, dès que je suffoquais sans lui...