(J'ai écrit ce texte il y a quelques temps. Je n'avais pas osé le partager. Je le fais maintenant. )
Je caresse sa joue duveteuse, admirant ses yeux clos, une expression de douceur et d'amour dans le creux de ma paume. Son regard d'ursidé se mit à me toiser, des yeux de prédateurs, à la tendresse infinie. Mes griffes glissent sur ses lèvres, cherchant au fond de lui ce qu'il voit de moi. Les larmes roulent sur mes joues, emprisonnées dans mon pelage noir telle une nuit sans lune, sans étoiles, sans une once de lumière. Les ténèbres ont englouti mon cœur.
- Je suis fatiguée, murmurais-je entre mes crocs.
Ses bras s'enroulèrent autour de moi, m'emprisonnant dans un cocon rassurant. Je retourne dans une enfance qui m'a été interdite, je ne veux plus qu'il me lâche, je désire ses griffes dans ma chair.
- Je t'en pris, sifflais-je, menaçant de m'effondrer.
Ses gestes restèrent doux, tendres, mais si fermes, si volontaire. Aucune agressivité, aucune violence, seulement un aplomb sans faille. Il sait ce qu'il désire, et il me le fait ressentir.
Sans prise de tête aucune, seulement un plaisir et des sentiments purs, sur l'instant, sans lendemain.
Un rêve éternel.
Un murmure chaud dans le creux de mon oreille.
- Tout de passera bien.
Une affirmation, une confiance inébranlable qui gonfle mon cœur de sûreté. Je me sens bien, je me sens à ma place. Je regarde à nouveau dans ses yeux. Je m'y vois, je n'y vois que moi, en cet instant, je ne vois que lui. Il est si doux, si beau, si intense. La passion le dévore. D'où trouve-t-il cette force de voir autant de beauté. Un artiste, un poète, un amoureux transis. Il n'est que gentillesse. Je caresse ses mains, ses coussinets rugeux et rèches, remonte le long de ses avant-bras, mes doigts de faufillant dans sa fourrure si épaisse et drue. Je pose ma truffe sur la sienne, froide, humide. Je ne peux réprimer un coup de langue sur son museau. Mon affection pour lui est limpide, sans une once de doute. Je serais à jamais en partie sienne. Il le sait. Il me connait mieux que moi-même. Son intelligence me fait frissonner. Il me voit vraiment, et je me sens entière dans ce regard.
Alors j'étouffe une parole, la ravale douloureusement, et l'enferme à double tour à jamais dans un coin de mon cœur. Puis je lui souris. Il le sait, il me connaît. Il détourne la tête.
Il relâche son étreinte.
- Au revoir, souffla-t-il.
C'est fini.
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Divagations d'une louve
PoesieDes maux traversent mon âme. Ils m'ont fait ouvrir une page facebook pour partager ma peine et mes pensées, sachant pertinemment que personne ne les lirait, mais désormais, j'ai besoin d'un public, même infime, alors je viens les inscrire ici, espér...