Chapitre 1

216 6 22
                                    

A tous ceux qui ont continué d'espérer,

" Je suis ordinairement bizarre"
- Janis Joplin




PARTIE 1

"Il n'y a pas de hasard, il n'y a que des rendez-vous"

- Paul Eluard



Elie

11 mois avant l'université, avant la liberté.

Aujourd'hui est un jour comme les autres, j'ai mangé, j'ai bu,... enfin vous voyez quoi. Si ma grand-mère était toujours de ce monde, elle m'aurait dit : « Aucune journée n'est ordinaire, il se passe toujours quelque chose ». Si tu veux, mamie, mais là il est dix heures du soir, je doute qu'il se passe encore quelque chose qui sorte de la routine. Mon frère est toujours au boulot, il travaille dans un restaurant gastronomique. Cette après-midi, je suis rentrée plus tôt que d'habitude et il n'était pas là mais par contre le ménage était fait. Il a tendance à être maniaque. Il doit tenir de ma mère. Ma mère. C'est une grande histoire d'amour entre elle, mon frère et moi. C'est sarcastique bien sûr, surtout me concernant car mon frère, lui, déteste les conflits. Eh oui malheureusement, c'est un gros fayot.

Revenons à ma mère, je suis sûre que vous la connaissez, la fameuse Serena Thompson, grande directrice de sa propre maison de presse, elle couvre entre autres les événements de la Maison Blanche : oui, oui vous avez bien lu, elle travaille avec le Président. En ce moment même, elle doit être en haut de sa tour de verre telle une princesse qui attend son prince charmant. Non. Telle une sorcière qui prépare un nouveau coup bas pour ses enfants. J'ai vite compris que c'était ce genre de femme quand j'avais quatre ans et qu'elle a « oublié » de venir me chercher à l'école le lendemain d'une soirée affreuse où elle avait pété un plomb à cause d'une mauvaise note. Cet événement a été le premier d'une longue série. Elle a fini par se délester de ce qu'il lui restait de ses fonctions de mère il n'y a pas longtemps. Elle nous a acheté un appartement à mon frère et à moi, dans un quartier pourri, attention à ne pas trop donner hein maman. A force avec mon frère, depuis qu'on est émancipés, on a instauré une routine tranquille sans vraiment compter sur l'aide de notre chère maman pas poule ! La seule chose qui nous prouve qu'elle ne nous a pas oubliés, c'est le versement qu'elle fait tous les 3 mois qui nous permet au moins de nous nourrir.

Je ferme mon journal et le range à côté des 14 autres que j'ai rédigés. C'est devenu une tradition. Quand j'ai commencé à apprendre à écrire, je racontais mes journées dans des carnets que ma mère gardait dans son bureau, des caisses entières de carnets de toutes les couleurs. J'en ai pris deux caisses lors du déménagement. Le silence est la seule chose qui résonne dans la maison, ce qui m'aide pour rédiger la dissertation pour le cours de français : l'histoire de Simone de Beauvoir en vingt dates clés. Passionnant. La sonnerie de mon téléphone vient troubler le silence. Je ne pourrai donc jamais finir cette foutue dissertation ! Je décroche sans même regarder qui m'appelle. Une voix grave et sûrement empreinte d'alcool me répond.

-Oui, bonsoir, s'exclame l'homme avant que je ne coupe la communication, j'aimerais parler à Elie Thompson ?

-C'est moi, si c'est encore pour vendre des trucs, excusez-moi, mais j'en ai rien à foutre. Donc au revoir !

-Non, non ! Attendez ! insiste le gars à la voix grave.

-Je vous écoute, réponds-je avec une pointe d'agacement dans la voix.

I NEED YOU.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant