Chapitre 34 : Seven

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« Le bonheur n'est pas dans la recherche de la perfection, mais dans la tolérance de l'imperfection. »

Yacine Bellik


Février

— Depuis quand tu sais que les filles ne t'attirent pas ?

— Hein ?

En équilibre précaire sur mes patins, les mains fermement accrochées à la rambarde, je fixe Sloan, perdu. Il semble mal à l'aise, mais je ne sais pas si c'est par rapport à sa question, ou si c'est parce que je suis déjà tombé 4 fois en 10 minutes. D'où le fait que je m'accroche maintenant.

— Désolé, je ne sais pas si je peux te poser ce genre de question.

— Non c'est bon. Tu es mon meilleur ami, j'ai envie de pouvoir parler de ça avec toi.

Sloan est peut-être maladroit, mais il ne me rejette pas. Il a été blessé d'apprendre que je n'ai pas été honnête avec lui, mais il a fini par comprendre pourquoi. À présent il veut être là pour moi et me faire comprendre que je peux lui parler, que je ne dois pas douter de lui. Il n'est pas à l'aise avec le sujet surtout parce qu'il a peur de gaffer que. Le cercle premier est connu pour être assez intolérant, surtout chez les longues lignes, cela concerne plus les Saints et les Nobles que les élites, mais je fais confiance au père de mon ami pour avoir ce trait de caractère. C'est un ancien militaire très haut gradé qui a monté une école en plus d'une entreprise de défense en tout genre. Militaire, garde du corps et mercenaire y sont formés ou y travail. C'est un homme extrêmement macho qui prône la virilité à l'excès.

— Je crois que je l'ai toujours su. Mais j'avais tellement peur de comprendre ce que ça voulait dire que je ne cherchais pas plus loin. Je ne voulais pas savoir si j'étais attiré par les gars, aucun genre en particulier, ou même si je n'avais d'attirance pour personne. À un moment c'est devenu évident que j'aimais bien les mecs, mais j'étais avec Lucie et franchement je l'adorais, je croyais pouvoir réussir à l'aimer et la désirer avec le temps.

— Je comprends, ça n'a pas dû être facile.

— Tu n'imagines même pas à quel point... je laisse échapper.

Je n'ai pas envie de trop m'attarder sur le sujet ni de lui parler du passé et de ces jours où je me dégoutais tant que sortir de mon lit était difficile.

Je lui souris pour lui faire comprendre qu'à présent tout va bien et il fait de même. Le fait que Sloan n'ait pas d'a priori sur la communauté LGBT me fait assez plaisir aussi. Je n'avais jamais parlé de ça avec lui donc je ne connaissais pas du tout son point de vue sur le sujet. Pour moi aussi c'était assez flou étant donné que j'avais peur qu'en me posant trop de questions, je finisse par me rendre compte qu'effectivement, je n'étais pas comme les autres.

Sloan s'écarte un peu de moi et se met à patiner. Il est à l'aise dans sa posture. Il glisse sur la glace et se déplace avec une telle fluidité que j'en suis admiratif. Avec son gros manteau en laine beige et noir lui arrivant à mi-cuisses, ses cheveux blonds qui virevoltent au vent et ses yeux bleu si intense, j'ai du mal à le quitter des yeux. À côté, j'ai l'impression de donner une image pitoyable. La petite fille de 7 ans qui passe devant moi en patinant aisément finit de tuer mon amour propre. Je soupire, un peu blasé.

-Seven !

Sloan me fait un signe de la main. Il veut que je le rejoigne, mais je ne me sens pas trop de lâcher cette rambarde qui pour l'instant est ma seule garantie de survie. Mon ami lève alors les yeux au ciel et revient vers moi. Il me tend les mains et je me jette presque sur lui. On ne sait jamais, je ne voudrais pas qu'il parte de nouveau en me laissant là.

Porcelaine - Fissure de verreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant