Chapitre 3 - Le pousser à bout

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— Il faut que tu me programmes un rendez-vous la semaine prochaine avec le client belge. Je pars le lundi suivant pour rencontrer un gros client, il faut que je le vois avant, me lance le chef avant même que je n'ai refermé la porte du bureau.

Je crois qu'il oublie que je ne travaille ici que depuis une demi seconde et donc que je ne sais absolument pas qui est ce client, ni même comment le contacter. Je l'interroge donc :

— Qui est-ce ce client belge ? Parce que [...]

— Demande à Alexia elle t'expliquera, me coupe-t-il.

— D'accord, mais vous auriez simplement pu m'envoyer un mail, lui fis-je remarquer, oubliant presque que c'est mon patron.

— Non, car je voulais aussi te demander si ta première journée se passait bien, s'adoucit-il tout d'un coup.

— Oui tout se passe très bien, personne dans l'ascenseur ce matin je suis arrivée rapidement à mon bureau, ironisais-je, ce qui ne manque pas de le faire sourire.

Je ne sais pas ce qu'il me prend, mais le fait de savoir qu'il a essayé de m'embrasser alors même qu'il savait que j'allais faire partie de cette entreprise et qu'il refuse de me dire pourquoi il m'a embauché, me donne envie de le pousser à bout. Ou peut-être est-ce juste mon attirance inavouable pour lui... Néanmoins, je n'ai pas le temps de trouver la réponse à cette question qu'il reprend :

— Personnellement, j'aurais préféré être en retard comme hier, me lance-t-il d'un air taquin, accompagné d'un clin d'œil.

Je rêve où il fait allusion à notre dérapage de la veille ? Moi qui fais tout pour oublier ce moment et cette honte d'avoir failli embrasser mon patron, lui ne fait que de m'en reparler. Il faut vraiment que je sorte de ce bureau le plus rapidement possible...

— En parlant de ça, si je ne pars pas maintenant je vais prendre du retard dans mon travail...

— Tu sais Elyssa, je pourrais te mettre encore plus en retard si je le voulais ? murmure-t-il soudainement, comme s'il voulait une nouvelle fois me mettre au défi.

Je rougis instantanément, ne pouvant me contrôler, comprenant rapidement à quoi il fait allusion. Néanmoins, même si je suis irrésistiblement attiré par cet homme qui beau, semble musclé, séduisant, avec des yeux incroyables, un chevelure brune avec un dégradé parfaitement exécuté, c'est aussi mon patron et je ne peux pas me laisser aller. Tu n'es pas comme ça Elyssa, me répété-je, presque pour me convaincre.

— Je dois aller prendre votre rendez-vous et m'occuper de l'accueil, Alexia ne peut pas tout gérer toute seule, lancé-je pour couper la discussion et trouver une excuse pour retourner à mon bureau.

Je tourne immédiatement les talons, sans le regarder. C'est lorsque j'ouvre la poignée de la porte que je l'entends me dire :

— Très bien, bonne journée Ely.

Je sursaute et m'arrête net dans mon mouvement à l'entente de ce surnom. Ely. Personne ne m'a plus jamais appelé comme ça depuis sa mort. Jason. C'était lui qui m'avait trouvé ce surnom quand j'étais petite. Et là je fulmine que cet homme ait décidé de m'appeler comme cela, sans ma permission. Hors de moi, oubliant qui il est ici, je lui ordonne :

— Ne m'appelez plus jamais comme ça, c'est clair ?

Je n'attends pas sa réponse, sors du bureau en claquant la porte et marche d'un pas décidé jusqu'au mien auquel je m'assois encore rouge de colère sous les yeux interrogateurs d'Alexia qui ne comprend pas la scène à laquelle elle vient d'assister.

— Il voulait quoi ? me demande-t-elle timidement, ne sachant pas trop comment m'aborder.

— Que je lui prenne un rendez-vous...

— Tu es sûre que c'est tout ? insiste-t-elle.

— Oui ! répondis-je un peu sèchement pour qu'elle me laisse tranquille.

Je ne sais pas si c'est de la curiosité ou de l'inquiétude mais je n'ai pas envie de parler de mes problèmes. Et même si je commence à apprécier cette fille, je me vois mal lui raconter que j'ai demandé à notre patron de m'embrasser hier, qu'il m'attire plus que je ne veuille bien me l'avouer, et qu'il vient de m'appeler par le surnom que me donnait mon frère décédé. Je me remets donc au travail, sans un mot.

Le reste de la journée se passe sans encombre et notamment car je fais tout pour éviter Monsieur le PDG. Il est seize heures quand je me rends compte que je n'ai toujours pas programmé le rendez-vous qu'il m'a demandé. Voyant son emploi du temps surchargé, je décide de le programmer lundi à huit heures.

— Tu as trouvé une place pour le rendez-vous de Clayton ? me demande soudainement Alexia alors qu'il est presque temps de partir.

— Oui je viens de le faire. Lundi à huit heures !

— C'est une très mauvaise idée Elyssa, il déteste les rendez-vous tôt le matin, me préviens-t-elle.

Et moi je déteste que l'on m'appelle Ely, pensais-je. C'est donc de bonne guerre ce rendez-vous matinal finalement, non ? Mais d'ailleurs, comment Alexia peut-elle savoir ça ?

— Comment sais-tu qu'il déteste les rendez-vous de bonne heure ? Toi aussi tu as couché avec lui ?

Surprise par ma question venue de nulle part, elle me regarde bouche bée avant de me répondre :

— Moi non, mais crois-moi c'est une très mauvaise idée. Tu vois la fille avant toi, eh bien c'est ce qu'elle a fait. Mais elle s'est attachée alors que lui ne voyait en elle qu'un amusement. Puis à force de le voir avec d'autres femmes, elle a fait une dépression et a démissionné, m'informe ma collègue.

— Wow je ne sais pas quoi dire, resté-je bouche bée.

— Ne dis rien, mais fais attention à toi Elyssa, tu as l'air d'être une gentille fille.

Je suis à peine étonnée de ce qu'elle me raconte, qu'une fille ait pu tomber amoureuse du patron au point de devoir quitter l'entreprise. Cependant, je ne sais plus quoi répondre à Alexia, à la fois touchée et gênée qu'elle s'inquiète pour moi alors qu'elle ne me connaît que depuis hier. C'est pourquoi quelques minutes plus tard, culpabilisant d'avoir été indiscrète et froide avec elle, je rajoute :

— Je suis désolée d'avoir posé cette question Alexia. C'était indiscret de ma part. Ce ne sont pas mes affaires.

— Ne t'inquiète pas, me sourit-elle. C'est déjà tout oublié !

Cette fille a l'air d'être un vrai rayon de soleil. Beaucoup d'autres femmes auraient pris la mouche, mais pas elle. Elle me sourit déjà en reprenant ses occupations.

Il est dix-sept heures lorsqu'Alexia et moi commençons à ranger nos affaires. Nous nous apprêtions à partir quand notre cher et tendre boss nous rappelle. Ou plutôt me rappelle.

— Elyssa, qu'est-ce que ce rendez-vous à huit heures lundi matin ? Tu ne pouvais pas trouver un créneau plus tard ? Alexia a bien dû te dire que je ne voulais pas de rendez-vous avant neuf heures ! s'emporte-t-il.

— Elle me l'a bien dit. Mais votre emploi du temps est complet, réponds-je avec un sourire en coin, fière de moi.

— Et tu ne pouvais pas déplacer un rendez-vous ? s'énerve-t-il, contrarié.

— Aucun ne pouvait être déplacé, rétorqué-je alors que c'est totalement faux, je n'ai même pas regardé.

Il veut s'amuser avec moi avec cette histoire d'ascenseur alors moi aussi j'ai décidé de jouer.

— Très bien, alors comme l'entreprise n'ouvre qu'à huit heures et que le rendez-vous est à une heure de route d'ici, personne ne pourra m'y accompagner. Tu viendras donc avec moi.

— Pardon ? m'exclamé-je, ne m'attendant absolument pas à cette réponse.

— Rendez-vous devant mon bureau à sept heures lundi. Bonne soirée mademoiselle Tunson.

Et il tourne les talons, me laissant là bouche-bée, toujours avec ce foutu sourire de séducteur scotché sur le visage.

Mon mystérieux patronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant