Chapitre 32 - Pardonner ou s'en aller ?

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À peine me rends-je compte que Matthew ne m'a pas suivi que je rentre dans un fast-food aperçu au bout de la rue. Dès que je passe les portes vitrées, une odeur de friture souffle sous mes narines et je me dirige vers une borne pour commander. Heureusement, vu l'heure tardive, il n'y a pas grand monde et je n'ai pas à faire la queue. En effet, à côté de moi, il n'y a qu'une famille nombreuse qui attend sa commande patiemment. Décidée à laisser Matthew prendre conscience de ses actes, je ne prends pas ma commande à emporter comme je l'avais songé précédemment mais vais m'asseoir à l'étage, au bord de la fenêtre. Rapidement, un serveur m'apporte mon hamburger et ma boisson que je prends le temps de déguster. C'est ainsi qu'une heure plus tard, je sors du restaurant, le ventre rassasié, prête à faire la route du retour, en espérant que Matthew se soit enfin repris en main et a arrêté de boire.

Lorsque j'ouvre la portière de la voiture, je découvre, satisfaite, que Matthew a une bouteille d'eau à la main cette fois. Mais, ce que je remarque surtout est que Peter n'est plus là.

— Où est Peter ? demandé-je alors immédiatement, pensant qu'il est également parti se chercher quelque chose à manger.

— Je lui ai laissé son après-midi, me répond cependant Matthew, nonchalant.

Pardon ? J'espère que c'est une blague ?

— Et comment comptes-tu rentrer ? Je n'ai pas mon permis et tu as bu, m'exaspéré-je qu'il n'ait encore une fois pas réfléchi aux conséquences de ses actes.

— Je conduirais. Quand j'aurais éliminé tout ce que j'ai bu, bien évidemment, me rassure-t-il.

Mais cela ne me rassure pas, cela me révolte même. Comment peut-il être à ce point inconscient ? Peter était notre seule possibilité de ne pas passer notre journée ici. Excédée, je souffle :

— Eh bien, on a le temps...

— Justement, cela va nous permettre de discuter.

Le culot ! Lui qui me repousse méchamment tout à l'heure, prétextant qu'il n'a pas envie de parler, a désormais envie de se confier. Quelqu'un pourrait lui rappeler que je ne suis pas à son service ?

— Parce que tu veux discuter maintenant ? Te bourrer la gueule et me parler comme une moins que rien ce n'est plus d'actualité ? le raillé-je en sortant de la voiture et claquant la porte violement pour montrer mon mécontentement.

S'il pense qu'il va s'en sortir en me proposant juste de discuter après son comportement d'il y a une demi-heure, c'est mal me connaitre. Néanmoins, il n'a pas l'air de vouloir lâcher l'affaire non plus car il me suit dans la rue, et m'attrape par la main pour me retourner face à lui.

— Lâche-moi, j'ai voulu t'aider et tu m'as rejeté comme si je n'étais rien à tes yeux. Donc laisse-moi maintenant et ramène-moi chez moi.

Ne s'attendant pas à cette réaction de ma part, moi qui n'hausse que très rarement la voix, je le vois baisser les yeux, coupable de m'avoir blessé. C'est là qui m'avoue timidement, d'une voix presque inaudible :

— Je t'ai rejeté car justement tu es tout à mes yeux. Et je ne voulais pas que tu me vois comme ça.

— Arrête de jouer avec moi ! Je ne joue plus moi ! m'emporté-je, révoltée qu'il se permette encore de me prendre et de me jeter, après la journée que j'ai passé à tenter d'être là pour lui.

— Mais moi non plus Elyssa... se désole-t-il, d'un air triste.

Cependant, je ne me laisse pas attendrir par son air de chien battu et renchéris :

— Tu ne peux pas me dire que tu ne m'aimes pas, puis me dire que je suis tout à tes yeux. C'est malsain Matthew, constaté-je, également triste d'en être arrivé là.

— Je sais, je sais combien je peux être détestable, voir méprisant. Mais s'il-te-plait, entend mes paroles, me supplie-t-il, persuadé que si je ne l'écoute pas maintenant, je risque de ne plus jamais lui adresser la parole.

Néanmoins, même si j'ai sincèrement envie d'entendre ce qu'il a à me dire, d'en apprendre un peu plus sur lui, je résiste :

— C'est non, tu ne peux pas jouer comme ça avec mes sentiments.

— Mais je t'aime. Je te promets que je t'aime. Et je n'ai jamais de ma vie aimé une femme. Je ne peux pas te laisser partir, pas comme ça. Laisse-moi te parler, et si après tu veux encore partir, j'accepterais, déballe Matthew, jouant sur mes sentiments pour me convaincre.

Et même si je ne réponds pas, ça marche. Il me touche, ses mots me touchent. Mais c'est bien cela le problème. C'est parce que ses mots me touchent qu'ils m'ont également blessé tout à l'heure. Néanmoins, il doit sentir que j'hésite car il insiste :

— Allez... S'il-te-plait. Je te jure qu'après tu pourras partir, je te laisserais partir.

Ce qu'il ne sait pas, c'est que moi-même je n'ai pas envie de partir. Dès le premier jour, cet homme a ébranlé en moi quelque chose que je ne soupçonnais pas. Je ne pourrais pas tout envoyer valser pour de simples paroles prononcées sous le coup de l'émotion. Ainsi, même si je ne le pardonne pas, toujours énervée malgré tout et désireuse qu'il se rende compte qu'il ne peut point me traiter de cette manière, j'accepte :

— Je te préviens, dès que tu as décuvé on reprend la route, et je ne veux plus t'entendre, l'avertis-je malgré tout pour montrer mon mécontentement.

— Je vais peut-être reprendre un verre pour avoir plus de temps alors...blague-t-il.

Mais cela ne me fait pas rire, je lui lance alors un regard noir, ce qui comme à ses habitudes le fait sourire.

— C'était une plaisanterie Elyssa, sourit-il face à mon regard désapprobateur, qui, j'en suis sûre, en d'autres circonstance m'aurait valu une remarque.

Par chance, voyant qu'il doit se tenir à carreaux, il se retient. Néanmoins, me concernant, je ne peux m'empêcher de rajouter, sarcastique :

— Alors il va falloir changer d'humour. Sinon je peux aussi t'attendre dans la voiture.

— Non. Désolé, c'était déplacé. Un vieux réflexe, encore désolé, s'excuse-t-il plantement en plantant son regard dans le mien me permettant d'apercevoir son regard sincère.

Je le regarde alors intriguée, mais je n'ai pas le temps de demander ce qu'il entendait par là, qu'il me tire, sans même tituber, vers un café non loin de là où nous sommes garés, qui a l'air "pas mal" selon lui.

Mon mystérieux patronOù les histoires vivent. Découvrez maintenant