God's crush

Ariane

Contre toute attente, mon demi-frère a eu le droit de rester au sein de la famille. Minos lave son linge sale en famille, il n'est pas question d'exposer au commun des mortels tous les drames et les secrets royaux. Aux yeux du reste du monde, nous passions pour une famille parfaite. Il a traité le problème à sa façon et a caché toute la poussière sous le tapis. En d'autre termes, il a fait voulu pour le Minotaure une salle spéciale, située sous le palais de Knaxxos où nous résidions.

C'est à ce moment que Dédale, un ami de mon père, a fait son apparition. Dédale était un homme brillant, il jouissait d'une excellente réputation. Tout ce qu'il touchait se transformait en or. Il était décrit à la fois comme un inventeur, un sculpteur, un architecte, un forgeron au talent exceptionnel, au génie esthétique hors pair et à l'ingéniosité technique remarquable.

Les gens racontent que Dédale, athénien d'origine, a trouvé refuge à la cour de mon père après avoir tué son propre neveu. Par pure jalousie. Celui-ci aurait dépassé le maître en se montrant encore plus astucieux que lui. Mon père n'a jamais voulu croire à ses rumeurs. Il a accueilli Dédale les bras ouverts.

Dédale vouait une admiration sans borne pour mon père, et c'était réciproque. Lorsque mon père lui commanda une salle pour le Monstre, comme on l'appelait entre nous, Dédale a mis deux nuits et un jour pour dessiner ce qui allait devenir le labyrinthe le plus complexe que la Grèce ait connu. Il n'avait qu'une consigne : rendre la sortie impossible à quiconque serait enfermé dans le labyrinthe. Il condamnait mon demi-frère à un aller simple pour l'oubli.

Mais comme tout homme, il avait ses points faibles. Ses pêchés mignons. Je suis devenue le sien. Dans sa folie créatrice, il en profita pour me construire aussi une salle de danse, apprenant à quel point j'aimais cette discipline. Une façon de me témoigner son attachement.

A ce stade de mon récit, je marque une pause. Les évènements me reviennent en pleine figure. j'ai suffisamment de recul pour percevoir ce que je n'avais pas vu à l'époque. Je sens à mes côtés le corps de Dionysos qui se tend. Il appréhende la suite. "N'omets rien", ce sont ses propres termes. Me confier à lui, me fait plus de bien que je ne le pensais. Je me sens moins seule à porter le fardeau de mes erreurs et celle de ma famille. et lui garde le silence, assis à mes côtés. Les quelques soubresauts qu'il s'autorise, la tension palpable dans son corps, trahissent ses émotions.

En ainée de la famille, j'ai tout gardé en moi. J'ai épargné mes frères et mes sœurs, mais quant à moi, rien ne m'a été caché. En dévoilant mon histoire à Dionysos, j'en mesure toute la lourdeur, toute la teneur de mon héritage

- J'ai appris le désir dans les yeux de Dédale. la façon qu'il avait de me regarder, d'effleurer de ses doigts ma peau lorsque nous nous croisions dans les couloirs, tout transpirait le vice en lui... A l'époque, cela a attisé ma curiosité, cela a suscitait l'émoi. Aujourd'hui, cela ne m'inspire que du dégoût. Je l'ai laissé fantasmer sur moi...

- Tu n'es pas obligé de...

- Cela te gêne que je t'en parle ? Dis-je en le regardant.

La réponse était évidente. Dionysos avait vu pire, j'en étais convaincue. Mais sa réaction était éloquente. Tout ce qui me concernait, le mettait en ébullition. Son visage était plus qu'expressif ; en fonction de ce que je disais, il transpirait tantôt la peine, tantôt la colère. En ce moment, c'était plus de la gêne.

- Est-ce qu'il t'a touché ? Ou est-ce que vous avez ... ?

- Il ne s'est rien passé entre nous.

Il pousse un profond soupir de satisfaction.

- A ce moment-là du moins...dis-je pour finir

La vérité, c'est que Dédale s'est révélé un pion décisif par la suite. Et que pour arriver à mes fins, j'ai usé de mes charmes. Dans l'espoir de sauver la peau de Thésée. J'étais ce genre de femme, manipulatrice, stratège, qui par amour, par nécessité, n'hésite à réveiller les plus bas instincts d'un homme libidineux. Quitte à se mettre en danger. A toucher la luxure d'un peu trop près.

J'ai su par la suite queDédale avait convenu avec ma mère d'un stratagème