Dionysos

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J'ai besoin d'un verre. Ou deux. Mais au fond, j'ai surtout besoin de comprendre ce qui m'arrive. La tête me tourne, ma vue se trouble. Je ne me reconnais plus, je ne me reconnais pas. Cette sensation lorsque j'ai posé mes yeux sur cette fille. Je deviens fou, je le suis sans doute encore. Mais c'est une folie différente, bien loin des égarements dont j'ai pu faire preuve par le passé. Lorsque j'ai vu cette fille, seule, en larmes sur cette île, je n'ai pu m'empêcher de m'arrêter, de l'observer, la contempler. Une empathie singulière, hors norme m'a envahi. Cette jeune fille m'a fait de la peine. Elle m'a laissé sans voix, subjugué par sa beauté. On aurait dit que j'avais trouvé un trésor. Alors je l'ai enlevée. Et maintenant elle est là. A moi, dans mon palais, dans ma chambre.

Je ne sais pas comment elle s'est retrouvée là, ni pourquoi elle pleurait, mais je sais qu'elle est la seule à avoir su ravir mon coeur, allumer un brasier dans mon cœur. Je ne comprends pas. Je ne savais pas qu'un dieu pouvait ressentir ça. Elle est là dans mon palais, et je n'en sais rien d'elle, je ne sais pas quoi faire d'elle. J'aimerai...

Je me suis pointée chez elle une autre, même si elle est la dernière personne vers laquelle je pensais me tourner un jour. Mais aujourd'hui, il n'y a qu'elle qui puisse m'aider.

Comme à son habitude, elle m'ouvre la porte de son antre, et son apparition est toujours aussi... bluffante. Son compagnon, Héphaïstos, est absent, et elle est seule. Du moins je le pense, même si sa tenue laisse penser tout le contraire. Je déglutis à la vue de ce qu'elle porte, une nuisette rouge. Cette fille m'a rendu dingue par la pensée, et sa tenue m'arrache des souvenirs que je pensais enfouis. J'ai beau savoir que ce n'est pas une femme pour moi, que je n'étais qu'un jouet plus parmi d'autres entre ses mains de vilaine fille, la voir provoque toujours quelque chose en moi. Arès, Hermès, moi... nous avons tous succombé aux affres du désir avec elle, rêvant de posséder celle qui n'est qu'une illusion. Aphro n'est qu'un éternel mirage.

- Dio, que me vaut l'honneur de ta présence ?Je pensais que tu étais à Naxos ?

Ne m'appelle Dio. Elle est la seule à m'enticher de ce surnom. Autrefois si excitant dans sa bouche, surtout lorsqu'elle le criait.

- J'en reviens justement...Mais je ne suis pas rentré seul.

Elle hausse un sourcil, visiblement intriguée.

- Elle est actuellement dans mon palais, allongée dans mon lit.

Je distille les informations par parcimonie. Pour la torturer un peu. Attiser sa curiosité. Et aussi parce que je suis paumé, je ne dispose que de peu d'éléments.

- Vous avez ?

Le sexe. Notre maillon faible à tous.

- Non, je ne l'ai pas touché.

Même si j'en crève d'envie.

- Je ne comprends pas ce qui m'arrive Aphrodite. Ce que je ressens lorsque je pose mon regard sur elle... c'est indescriptible. Je veux revivre ça à l'infini, encore et encore.

Elle pose un doigt sur mes lèvres, m'intimant de me taire et sourit visiblement amusée. Mon état la divertie, la soustrait un instant à sa vie ennuyeuse, je m'en offusque, mais je sais qu'elle a compris l'origine de mon tourment.

- Tu es amoureux dingue mon pauvre Dio, cette fille t'a tapé dans l'œil. Mais ce n'est pas réciproque n'est-ce pas ?

- Est-ce que tu peux m'aider ? Lui jeter un sort ou un truc que tu sais faire...

Aphrodite a un don. C'est son truc. Comme je suis connu pour être le dieu de la vigne, de la fertilité et de la végétation, Aphro est réputée pour être la déesse de la beauté, de l'amour, de la séduction. Et dieu, qu'elle est belle. Mais elle n'est pas douée en revanche pour la diplomatie, et sa réponse ne me satisfait pas.

- Tu mérites mieux que ça. Apprends à la connaître, séduis là. Je te donne cinq jours. Si elle n'est pas éprise de toi au terme de ces cinq jours, je te filerai un coup de main... si elle le mérite.

Sur ce, elle me pousse dehors sans ménagement. Cinq jours putain, cinq jours, une vraie torture. C'est une première qu'elle laisse un dieu se débrouiller seule la garce. Qu'elle n'intervienne pas dans un bordel naissant.

Je regrette d'être allée à la voir, de m'être confié à elle, après ce que nous avons vécu elle et moi. Ou peu importe ce que j'ai pu vivre avec elle. Les dieux n'ont aucune parole, ils passent le plus clair de leur temps à se jouer des humains et se tirer entre les pattes entre olympiens.

C'était définitivement une mauvaise idée de m'être rendue chez Aphrodite. Je n'ai pas besoin d'elle, c'est céder à la facilité. Je vaux mieux que ça, elle mérite mieux que ça. Notre rencontre était écrite, je peux y arriver...

God's crushOù les histoires vivent. Découvrez maintenant