Chapitre 3

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Noé s'assied en face de moi.

C'est très étrange. C'est lui, mais c'est un autre en même temps.

Avait-il déjà ce regard brûlant ?

- Il faut que tu saches que mon père m'a autorisé à te corriger sévèrement si tu ne m'obéis pas.

- Vous êtes tous devenus cinglés, en fait !

- Ce serait une bonne vengeance pour toutes les corrections que j'ai reçu à cause de toi, n'est-ce pas ?

Là, il touche une corde très sensible. J'ai beaucoup culpabilisé du fait qu'il ait pris plusieurs roustes à cause de moi, je ne sais même pas combien car il refusait de m'en parler. Je déteste vraiment Paul. Et je n'aime pas du tout cette tension désagréable entre Noé et moi.

- Pourquoi est-ce tu te comportes comme cela ?

- Je ne garde pas de très bons souvenirs de nos vacances ensemble, Lisa.

Je ne saurai pas dire pourquoi, mais jamais personne ne m'a fait aussi mal.

- Ce n'est pas comme si je t'avais forcé à faire quoi que ce soit !

- Assez parlé du passé, viens avec moi pour que je te montre ton travail de la journée !

- Noé, je ne sais pas à quel moment quelqu'un dans cette famille a commencé à croire que je pourrais un jour travailler pour vous.

- Avec quoi vas-tu vivre, ta mère t'a-t-elle laissé de l'argent ?

Mince, comment ai-je pu ne pas penser à ça ?

- Es-tu idiote ? Tu ne t'es même pas demandé comment tu allais manger pendant son absence ?

Il y avait encore des choses dans le frigidaire, plein de légumes dans le potager, des œufs de nos poules, jusque-là je n'ai pas eu de soucis, mais il me faut un peu d'argent quand même !

- Je veux bien travailler une demi-journée par semaine !

Vu ce que je dépense, ça devrait largement suffire.

- Ce n'est pas open bar, nous avons besoin de toi quatre heures par jour.

- Pour faire quoi ?

- Pour me servir mon petit-déjeuner, et j'ai vraiment hâte de voir ça !

Il me regarde d'un air vraiment méprisant en disant cela. Même son père et son frère ne m'ont jamais fait me sentir aussi misérable.

- Plutôt crever que de te servir quoi que ce soit !

Je me lève brusquement et je pars en courant.

Quelle cruche, pourquoi n'ai-je pas deviné que Noé deviendrait forcément le même enfoiré que ses ainés ?! Ils sont élevés pour devenir comme cela, ils doivent même recevoir une formation spéciale « Mépriser tous les autres parce que vous êtes plus riche qu'eux ! ».

Je cours aussi vite que je peux avant d'entendre un bruit derrière : Noé est en train de me poursuivre !

C'est en même temps horrible et grisant. Je me retiens pour ne pas éclater de rire et je gueule : « Lâche moi, connard de Maréville ! »

Mais le fait de me retourner vers lui m'a fait perdre le peu d'avance qu'il me restait et il me rattrape un poignet puis l'autre côté du corps, si bien que je me retrouve coincée contre lui et nous tombons tous les deux à la renverse. Je lui tombe dessus, le coude en avant dans une côte et je vois bien que je lui fais très mal, mais il n'est pas question que je m'excuse. J'essaye de me lever mais il me retient contre lui, ce qui est délicieux. Je suis tout près de ses lèvres et il me regarde différemment de tout à l'heure. Il a de nouveau ce regard brûlant qui essaye de pénétrer dans le mien. Nous nous relevons pendant qu'il ne lâche pas mon poignet et comme j'essaye de m'enfuir à nouveau, il me prend, me soulève et me porte sur son épaule !

Action ou vérité - Les héritières 2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant