7. Pixie

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Je suis avec attention la route indiquée par mon portable ; l'effervescence de Londres me submerge, et mes capacités d'orientation restant limitées, je tiens à arriver à l'heure chez Ariel.

Ce dernier et moi avons beaucoup discuté par messages ces deux derniers jours. Après notre entrevue à la bibliothèque, je me suis rendue compte qu'il était vraiment sympa – même si je n'en doutais pas, puisqu'il a tout de même consenti à mon plan foireux – mais qu'il était également doté d'une intelligence rare et d'un humour parfois caustique qui me fait mourir de rire.

Il déteste le brouillard – plutôt comique étant donné notre ville –, est intolérant au lactose, et s'est teint les cheveux en rouge lorsqu'il était adolescent. Je ne l'aurais jamais deviné, mais depuis qu'il m'a montré une photo pour preuve, je ne cesse de l'imaginer avec ces cheveux de feu, adulte.

Ce n'est pas le genre de personnes que j'ai l'impression d'avoir connu toute ma vie. Je n'ai pas le même ressenti qu'avec Maeve, par exemple, avec qui l'alchimie est passée tout de suite. Avec Ariel, j'ai plutôt l'impression que nous sommes tous deux des chevaux un peu sauvages, qui cherchent à s'apprivoiser mutuellement, sans trop savoir comment. Il ne s'étonne pas de mon air revêche, tout comme je m'habitue à ses phrases parfois trop complexes pour moi. Et c'est très bien ainsi.

Je sonne à l'interphone de son immeuble, tout en briques rouges et fenêtres blanches ; sa voix grave m'informe que la porte est ouverte. Je monte à pied les trois étages me séparant de lui, et tape trois coups secs.

— Salut.

— Bonsoir, petite fée.

— Maeve n'est pas là, tu n'es pas obligé de faire semblant.

— Je sais. Mais ça me fait rire. Entre, m'invite-t-il avec un petit sourire convivial.

Je me retiens de siffler comme un gamin de quartier.

— Tu m'avais pas dit que tu étais millionnaire, mon cœur. J'ai touché le pactole.

Il ricane devant ma minauderie, mais se refroidit aussitôt.

— Mon père paye. Tu veux à boire ?

Je n'insiste pas ; son ton m'en dissuade.

— Qu'est-ce que tu me proposes ? Attends, le date a déjà commencé ? Je dois faire quoi ? Le merlan frit ?

Je mime une moue et détends mes paupières, donnant l'impression d'être en admiration devant lui.

— Aie l'air un peu plus amoureuse, pour voir ? Parfait ! rit-il. Sans rire, fais comme tu le sens. Le but n'est pas que tu fasses semblant de m'aimer, juste qu'on passe un bon moment et que tu me dises si ce que je fais est bien. Une bière ?

J'opine, et m'assieds sur son canapé plus confortable que mon lit.

— C'est quoi le plan, ce soir ?

Il s'affaire dans le frigo, et décapsule une bouteille de jus d'orange et une bière, en me répondant.

— Surprise.

— Je déteste les surprises.

— Ça m'aurait étonné, marmonne-t-il en se mettant derrière le canapé. Le but, c'est que tu devines le langage que je vais essayer de mettre en avant ce soir. Là, ça ne devrait pas être trop compliqué. À la tienne.

Je me tourne vers lui ; nous trinquons les yeux dans les yeux, buvons une gorgée, et je fais remarquer :

— On a connu plus romantique, comme boisson. Évite de trinquer au jus d'orange avec ta future copine pour votre premier rendez-vous.

Aime-moi si je mensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant