Prologue

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Un mot d'amour, dans l'oreille chuchoté

Je ne peux détacher les yeux des objets posés comme des trophées sur mon étagère. Une lettre, sur du papier fin, aussi effritée que mon cœur. Elle y gît, pliée en trois, vestige de paroles factices sonnant pourtant si véridiques. Elle y trône telle la reine déchue d'un royaume fait de désillusions et d'amour déçu, où les « je t'aime » sont aussi volatiles que le vent et les promesses ne durent pas plus longtemps qu'un baiser volé.

Un présent, dans la main déposé

Un livre, que j'ai déjà lu cent fois. Aux pages cornées, à la tranche aussi cassée que moi, aux marges annotées au crayon de bois aussi éphémère que notre idylle imaginaire. Les poèmes ne valent plus rien, si je dois les lire sans personne à mes côtés. Je vois un marque-page dépasser ; je n'ose l'extraire de l'ouvrage pour l'observer, craignant d'y voir inscrits les stigmates de notre histoire.

Une aide, de bon cœur prodiguée

Je m'allonge sur mon lit et ferme les yeux, tâchant de faire disparaître de mon esprit ces réminiscences si vivaces. Peine perdue. Des éclats de rire impromptus s'invitent dans ma tête, et je souhaite à la fois les écouter en boucle et les faire s'envoler de mes pensées. Deux plats fumants, presque plus brûlants que notre passion, partagée mais invivable. Des services rendus, à l'époque si innocents et joyeux, qui se rappellent à moi dès que je les exécute à nouveau. Ces souvenirs sont gravés en moi et je ne parviens pas à les décrocher – par manque de force ou excès de lâcheté.

Un geste tendre, sur la peau délivré

Je me tourne sur le côté et m'enveloppe de mes propres bras, à défaut des siens. Son toucher me manque. Mon corps réclame le sien, sans que je puisse l'en empêcher. Et je me souviens de notre danse folle, de nos tourbillons et de cette tension palpable qui me fait toujours frémir rien que dans ma mémoire. Je sens à nouveau ses mains, amoureuses et vengeresses, vois sa bouche, tentatrice et injuste, m'imagine ses yeux, doux et cruels.

Un moment, dans le cœur imprimé

Je ne pourrais jamais l'oublier. Je dois faire pitié, mais je m'en fiche. Je plisse les paupières plus fort, endiguant les larmes et les souvenirs. Une balade dans un jardin, calme avant la tempête dévastatrice nous ayant submergés ; ces petits rendez-vous emplis de sourires discrets et de silences confortables, instants fugaces s'éloignant de moi à tire-d'aile. Ils s'échappent, et même si je tente de les rattraper, de les amener à moi pour les chérir encore un peu, rien qu'un peu, je n'y parviens pas. Je les vois disparaître pour de bon, mais leur empreinte légère reste dans un coin de ma tête, m'embaumant de leur parfum acide et délicat, me plongeant dans une nostalgie immuable.

Un amour solitaire, une seconde partagé.

Une larme translucide dévale ma joue, et je la laisse glisser sur mon cou, que ses lèvres ont frôlé. Une partie de mon monde s'écroule, et j'ignore comment reconstruire les terres brûlées par la colère, les maisons inondées de pleurs, et les champs de fleurs flétries ravagés par son absence.

Cinq manières de t'aimer, et je suis passé à côté.

Je voulais tout gagner, avec cette relation. J'aurais pu tout gagner. Mais je crois, au final, que j'ai tout perdu.

Aime-moi si je mensOù les histoires vivent. Découvrez maintenant