Lyuri se réveilla alors qu'il faisait déjà bien jour. Elle regarda la feuille posée sur la table de chevet où elle avait tracé quatre traits. On était donc le cinquième jour.
Elle attrapa le bâton de fusain et traça un autre trait. Elle essayait de ne pas trop perdre la notion du temps. Elle ne faisait pratiquement que dormir depuis son arrivée, son corps en avait besoin. Ou peut-être que son anti-douleur ne lui laissait pas d'autres choix.
Coincée dans sa chambre, elle faisait de temps à autres quelques allers retours dans la pièce puis finissait toujours par se poser à la fenêtre où elle admirait le paysage de Neïwar.
Les montagnes s'étendaient à perte de vue, et si l'on plissait un peu les yeux, on pouvait y voir un autre petit village au loin. Mais comme il n'était pas éclairé la nuit, la jeune fille supposa qu'il avait été déserté ou qu'il servait de camps de réfugiés de la ville comme celui où elle se trouvait.
Lyuri attendait la venue de Lüka. Elle avait déjà tenté de le retrouver à sa chambre, mais lorsqu'elle dormait, il errait dans le village et ses alentours ou discutait avec le médecin l'étage du dessous.
Alors elle retournait sur son lit qui commençait à devenir inconfortable et usait de son imagination pour faire passer le temps.
Elle avait trouvé un fragment de miroir dans un tiroir du petit meuble de la salle de bain et avait pu constater que la plaie s'embellissait de jour en jour. Le baume devait vraiment être efficace. Elle peinait toujours à bouger les bras et le dos mais les tissus de la peau se resserraient, laissant une trace rougeâtre.
Lyuri entendit le bois de l'escalier craquer, puis le plancher devant sa porte et enfin deux coups sur le porte.
« Je suis réveillée, annonça-t-elle.
Lüka entra en faisant grincer la porte. Il la referma derrière lui et avança dans la pièce en replaçant ses cheveux en arrière.
— Comment tu vas ?
— Plutôt bien, répondit Lyuri en quittant le bord de la fenêtre.
— Regarde ce que j'ai trouvé.
Lüka sortit de sa poche un tube en verre noir aux extrémités recouvertes d'or.
— Jette un œil dedans, dit-il en tendant le tube à Lyuri.
L'adolescente l'attrapa et le fit tourner pour l'observer. Elle plaça l'objet devant son œil et admira de belles couleurs redessiner la pièce. Du rose, du violet, du jaune, du vert... Le tube changeait les couleurs et les formes à la façon d'un kaléidoscope tout en laissant une part de réel, donnant à la pièce un aspect bien plus vivant et heureux.
— C'est incroyable ! s'exclama l'adolescente qui redécouvrait avec joie le paysage à travers sa fenêtre.
— J'ai aussi ramené ça, ajouta Lüka en déposant sur le lit un petit sac dégageant une odeur sucrée.
Il en sortit deux petites pâtisseries encore chaudes recouvertes d'un nappage caramélisé.
— Ce sont des koumnias, la jeune maman qui nous a aidé à notre arrivée a appris qu'on était encore là, alors elle nous a fait des pâtisseries pour nous remonter le moral.
— C'est adorable, répondit Lyuri en croquant à pleines dents dans le coussin moelleux. Hmm... Qu'est-ce que c'est bon ! »
Ils s'installèrent en tailleur sur le matelas pour manger leurs koumnias. Du caramel dégoulinait de leurs bouches et la fine poudre sucrée qui recouvrait le dessous des gâteaux tombaient sur leurs vêtements.
Lyuri remarqua que la carte de Kaliora dépassait légèrement de la poche de Lüka, elle n'était pas dans son coffret. Il avait dû se cacher à un endroit calme du village ou dans une ruine pour la regarder.
Elle avait remarqué son embarras suite au soir où elle lui avait dit vouloir rentrer chez elle. Lüka essayait de toujours avoir l'air impassible, mais son regard triste et fuyant et le ton de sa voix le trahissaient. Elle était persuadée que ce qu'elle avait dit l'avait perturbé.
A vrai dire, elle n'avait pas spécialement envie de rentrer chez elle. Elle n'avait même plus vraiment de chez elle. Mais le calme d'un quotidien banal sur Terre lui manquait. L'odeur du café au self le matin, la sonnerie qui annonçait le début de la journée, les tableaux 3D qui grésillaient dans les classes... Elle ne pensait pas le dire un jour, mais le pensionnat lui manquait.
D'un autre côté, elle ne voulait pas quitter Lüka. Il était devenu son meilleur ami. Elle aimait son calme à toute épreuve, ses iris jaunes, sa ténacité ou encore son courage. Sans oublier toute la gentillesse avec laquelle il la traitait et sa patience pour lui apprendre tout ce qu'il savait. Elle aimait ces quelques rares fous rires qui les prenaient lorsqu'ils étaient tous les deux à bout, ces longues heures passées au cœur de la nuit à discuter de sujets profonds, ces moments où ils parlaient de leurs vies respectives. Elle n'avait pas besoin du trésor pour être heureuse. Juste d'un Lüka.
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Kaliora, la planète aux trésors T.1
Science Fiction« Confiée aux mains habiles de la Nymphe du voyage, la carte traversa l'espace et le temps, en quête d'un endroit où reposer. Cachée au creux de l'Univers dans le plus grand des secrets, elle permettrait à quelques chanceux aventuriers de voyager, e...