NILAJA
Deux ans plus tôt.« L'opération a été un franc succès » m'a rapporté le médecin lorsque je me suis réveillée, l'anesthésie ne faisant plus effet. Le bébé a été retiré sans aucun problème et je suis en bonne santé. Mon corps est juste un peu fatigué à cause de cette anesthésie, mais j'ai dû le cacher auprès des médecins pour qu'il me laisse sortir plus tôt que prévu.
Enfin, j'ai essayé.
Ce sont des professionnels de santé avec qui je travaille depuis de nombreuses années maintenant. Ils savent ce qu'ils font et surtout, ils connaissent les patients. Sofia a vite remarqué que j'étais faible et que je devais rester au moins pour cette nuit.
J'ai reçu plusieurs appels de Camélia et Fiona durant la nuit auxquels je n'ai pas eu la force de répondre. Les connaissant, elles me demanderaient forcément comment je me sens bien et ma gorge enchaînée m'aurait m'empêcher de pouvoir leur répondre. Or, cela fait un moment que je n'ai pas versé de larmes.
20 minutes.
20 minutes, durant lesquelles j'ai pu enfin dormir. Sur une nuit de près de 8 heures. Le reste du temps, j'ai seulement regardé la fenêtre du lit où je me trouvais, assistant la lune tomber et le soleil se couchait. Et si ce ne sont pas les étoiles que je regarde, je me glisse sous la couette pour pouvoir étouffer les bruits de mes sanglots de fillette.
C'est si dur. D'être seule. J'ai envie que cette opération allège mon cœur...
Ma respiration se coupe à chaque fois que j'entends des pas se rapprocher de la porte, pour n'alerter personne. Mes dents mordent si fort dans mon coussin que j'ai peur qu'en voulant refermer la bouche, elles restent accrochées.
Je ne savais pas que lorsqu'on perdait un proche, on pouvait ressentir une tristesse si immense au plus profond de notre être. C'est comme si une partie de nous était arrachée, laissant un vide impossible à combler. J'ai comme une douleur intense au niveau de la poitrine qui ne veut pas s'estomper et qui est amplifiée par cette sensation de serrement, comme si mon cœur était comprimé.
Maintenant, je comprends comment se sentait ma mère lorsqu'elle apprenait presque tous les jours que l'un des membres de sa famille était mort. Mais elle était toujours plus forte que moi, je ne l'ai vu pleurer qu'une fois. Les autres fois, elle était là pour mes frères, mes sœurs et moi. Elle ne se laissait jamais abattre devant nous et s'est toujours battue pour que nous ayons le sourire, jusqu'à mettre sa propre vie entre parenthèses. C'est dans ce genre de moment que je me rends compte que nous sommes totalement opposées, elle et moi. Elle, contrairement à moi, a toujours donné le meilleur d'elle-même pour nous. Peu importe ce qu'elle traversait, tant que nous avions de quoi manger, elle était heureuse pour ses enfants.
Alors que moi, j'ai choisi la facilité.
Mes larmes et mes plaintes ont cessé quand d'un coup, vers les coups de 9 heures, la poignée de la chambre s'est mise à tourner. J'ai eu le réflexe de poser mes lunettes de soleil sur mon nez avant que la porte ne s'ouvre sur Sofia et mon médecin. Je tente de retenir ma respiration, parce que si je ne le fais pas, la seule chose que mon nez sortira sera mes reniflements. Et je suis censée aller bien...
— Comment tu vas, Nilaja ?
La forme. J'ai battu un tout nouveau record, j'ai passé plus de cinq heures à pleurer. Et les seuls moments où je me suis décidée à faire autre chose, c'était pour mordre puissamment dans mon coussin, pour empêcher que ma douleur résonne dans les locaux de l'hôpital. Je viens également de perdre mon mari et de retirer en moins la seule chose qui aurait pu nous unir à vie. Sinon, tout roule et vous ?

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VOLVER A AMAR
RomanceMarrero. « Jusqu'à ce que la mort nous sépare » étaient les derniers mots que Nilaja avait entendu de l'homme qui a partagé sa vie durant plus d'une décennie quelques heures avant sa mort. Enfouie dans la dépression et complètement coupée de tout s...