NILAJAJe n'ai eu le droit de ne voir aucun d'entre eux. Ils sont consignés dans leur chambre. Jusqu'à nouvel ordre.
Mon esprit tourne en boucle autour des derniers mots transmis durant l'appel, l'image de mes deux patients, face à face, prêts à s'entretuer.
Parce que leur rivalité est si nourrie que c'est une fatalité.
Jusqu'à lors, j'ai toujours été présente pour freiner tout risque de débordements. Sans pour autant émettre de sanction.
La pression de mes responsabilités m'étouffe de culpabilité. Mon lien avec Enos s'efface jour après jour, tandis que celui avec Sebastián, malgré les montagnes russes que sont mes sentiments, semblent se fortifier avec le temps.
L'idée qu'ils puissent se battre me rend malade. La situation n'a jamais dérapé au point d'en arriver à un attroupement comme celui avec Fahim.
Les deux sont si distincts mais si enflammés, si imprévisibles par la même occasion. Je sais aussi que la passion qui les anime peut se retourner contre eux. Contre nous.
Les reproches voilés de menaces retentissent encore en moi.
« Ce n'est pas la première fois que des patients sous ta responsabilité créent des problèmes. »
Je déteste l'idée qu'il puisse croire que je ne fasse pas correctement mon travail. Pourtant, sa critique est bonne sur une corde : quelque chose ne tourne pas rond.
Comment les choses ont pu dégénéré à ce point ?
Comment ai-je pu laisser ça arriver ?
La journée a été tellement longue qu'elle a dû s'achever plus tard que l'accoutumée.
Dans ma chambre plongée dans l'obscurité, je suis sur le point de succomber au sommeil réparateur lorsqu'un léger bruissement attire mon attention. Je me redresse, les sens en alerte.
La pluie s'abât lourdement contre les vitres, le vent se prête au jeu en secouant les branches des arbres qui se frottent entre elles.
Puis le bruit sourd se répète. Un frisson glaciale parcours mon échine.
En descendant les escaliers, je crus faire une crise cardiaque. Quelqu'un est dans la cuisine.
Alexander.
Bordel.
Alexander est devant ma maison.
Je saisis en vitesse un objet sur la table — un vase, fragile mais c'est tout ce que j'ai sous la main.
Je retiens un cri de stupeur et vais jusqu'à frotter mes yeux pour être sûr que je n'hallucine pas. Mes pupilles s'écarquillent d'horreur lorsque j'aperçois une silhouette se glisser par la fenêtre entrebâillée de la cuisine.
La terreur envahit mes veines jusqu'à immobiliser mon corps sur place. Mes mains deviennent moites, les battements de mon cœur jouent de la musique rock, mes muscles quant à eux, se contractent dans une tension paralysante.
Mon souffle se coupe, mon coeur tambourine si fort que j'ai l'impression qu'il va éclater en morceau. Un éclair illumine momentanément la pièce et je vois clairement des tatouages sur les poignets de l'infiltré.
Puis une voix que je promets de reconnaître même si l'ouïe m'était retirée brise le silence effrayant du moment.
— Joder, j'aurais peut-être dû passer par la porte..

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VOLVER A AMAR
Roman d'amourMarrero. « Jusqu'à ce que la mort nous sépare » étaient les derniers mots que Nilaja avait entendu de l'homme qui a partagé sa vie durant plus d'une décennie quelques heures avant sa mort. Enfouie dans la dépression et complètement coupée de tout s...