NILAJA— Et voilà, c'est terminé.
Je redresse la couverture sur les jambes de M. Stewart, m'assurant qu'il soit bien au chaud. Assis contre les barres du lit, il fixe un point visible sur le mur, le regard vide, comme d'habitude.
Depuis son intégration à l'hôpital, les seuls mots qu'il a prononcés étaient pour exprimer son mécontentement. La schizophrénie le maintient prisonnier dans un monde où je ne peux pas le rejoindre, et malgré les traitements, il semble s'enfoncer de plus en plus profondément dans ses délires silencieux.
Je soupire doucement, touchée par son isolement.
— Si vous avez besoin de quoi que ce soit, n'hésitez pas, d'accord?
Je sais pertinemment qu'il ne répondra pas, mais j'espère qu'il sait que je suis là. Que nous sommes tous là.
Je lui jette un dernier regard avant de quitter la pièce en refermant doucement la porte derrière moi.
Dans le couloir, je tente de détendre un peu mes épaules, la tension de la matinée commence à s'y accumuler. La journée touche presque à sa fin pour certains mais le travail ne fait que de recommencer.
Depuis la soirée passée au côté de Sebastián, les heures au travail me semblent beaucoup trop rapides. Ça fait longtemps que je ne prends plus un immense plaisir à travailler, mais tous paraît plus gaies maintenant qu'il partage une partie de ma vie.
Nous avons passé la fin de soirée l'un contre l'autre, à grignoter nos empanadas devant des films de Noël. Le matin, je me suis réveillée toute seule sur le canapé et plus tard j'ai appris qu'il avait été libéré de l'isolement.
J'ignore à quel point le nom de famille de cet homme est puissant pour qu'il puisse s'échapper d'un hôpital sans aucune répercussion...
Alors que je marche en direction de mon bureau, je passe devant la salle de thérapie dans laquelle Adonis gère un groupe. Curieuse, je m'arrête un instant pour y jeter un œil.
Ça fait un moment que je n'ai pas croisé mon meilleur ami, d'autant plus en plein travail. Sa voix, bien que basse, porte une chaleur rassurante, un véritable don qu'il maîtrise à la perfection.
Adonis a cette capacité à se connecter aux autres d'une manière qui m'admire, et quelque part, ça m'intrigue de voir comment il procède pour comprendre les sentiments de ses interlocuteurs avec une telle finesse.
Je m'appuie doucement contre le mur, me fondant dans l'ombre du couloir.
— ...Bien et maintenant si chacun pouvait prendre un moment pour réfléchir à sa définiton de l'amour, ce sera notre prochain échange. Il n'y a pas de bonne ou de mauvaise réponse. L'amour peut s'interpréter de différentes façons.
Je plisse les yeux, intriguée. C'est un exercice assez simple à vue d'œil. Mais connaissant le médecin et la manière dont il la mène, il va analyser chaque élément de réponse.
Une femme face à lui prend la parole et décrit l'amour comme une promesse non tenue, un mirage qui s'effondre lorsque l'on s'en approche. Ses yeux se remplissent de larmes au fur et à mesure que le lyrisme s'empare d'elle.
L'émotion me serre la gorge face à la détresse de cette dame qui en attend tant de la vie mais qui n'a jamais été graciée.
Puis le psychanalyste se tourne vers la personne suivante.
— L'amour... commence une voix grave qui résonne dans la pièce.
Sebastián est assis au fond, une jambe nonchalamment croisée sur l'autre.

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VOLVER A AMAR
RomanceMarrero. « Jusqu'à ce que la mort nous sépare » étaient les derniers mots que Nilaja avait entendu de l'homme qui a partagé sa vie durant plus d'une décennie quelques heures avant sa mort. Enfouie dans la dépression et complètement coupée de tout s...