D'Or et de Noir

Pour devenir plus forte

— Placez vos mains comme ceci. La droite à la verticale et la gauche à l'horizontale de façon à ce que vos ongles frôlent le bas de votre paume droite. Écartez un peu vos bras de votre buste. Le dos droit. Ne baissez pas votre menton. Maintenant, inversez les positions en effectuant une rotation. Votre main gauche passe à la verticale, les doigts pointés vers le ciel, et vos ongles de la main droite ne font qu'effleurer le bas de la paume opposée. À présent, mettez vos deux mains face à vous, paumes vers le haut... Détendez-vous. Vous crisper ne servira à rien. Cette partie-là, paumes vers le haut, canalise l'énergie que vous aurez accumulée avec les deux précédentes rotations. Pour finir, vous enfermerez cette énergie dans un cercle en positionnant vos mains l'une au-dessus de l'autre, les paumes se font face, et vous laisserez cette énergie filtrer tout autour de vous, sans qu'elle ne s'échappe. Il vous faudra la contrôler et la garder toute proche de vous. Vous serez transportée dans une transe. Au début, vous ne serez qu'à demi-consciente. L'effort vous fatiguera. Cela représentera beaucoup de concentration pour votre esprit tout juste initié et vous ne pourrez pas capter les fluctuations de votre environnement, ni réfléchir correctement. Pour l'instant, ne pratiquez pas seule ou sans personne de confiance. Au fur et à mesure, il deviendra plus facile pour vous de penser et d'être consciente de ce qui vous entoure. Vous pourrez alors interrompre votre méditation si vous en sentez le besoin. Vous pourrez même éprouver les énergies malveillantes et réagir en conséquence. Inutile de préciser, je suppose, que vous devrez envoyer toute votre énergie dans vos mains. Comment ? En sentant les mouvements internes de votre essence. Laissez-vous guider par sa présence, puis tenez-la fermement et dirigez-la à votre guise. Avant de pouvoir la matérialiser sous la forme d'énergie pure, il vous faudra la cerner au sein de votre corps et l'apprivoiser. 

Long Zhelan a tenu sa promesse de la veille. Il l'a attendue devant la salle d'étude, quelques minutes avant l'aube, et si la Princesse de Heilong est quelque peu sonnée par sa journée de lectures et de prise de notes, elle est tout de même prête à affronter cette nouvelle journée avec l'Empereur. Celui-ci l'a conduite dans un petit jardin, au cœur du palais interne, et a ordonné à ses gardes d'en interdire l'accès tant qu'il y sera. Le soleil a entamé sa montée et vient doucement les caresser de sa chaleur. Comme toute la cité, ils sont encerclés d'eau et assis l'un en face de l'autre sur l'herbe fraîche d'un îlot central où tombent sur leurs épaules les pétales du cerisier en fleur. Il lui a montré les mouvements de base pour réveiller son essence, déployer son énergie et se plonger dans un état méditatif. 

— Pourquoi médite-t-on ? poursuit-il. La méditation fait partie intégrante du processus de cultivation. Elle vous permet de renforcer votre essence et de la régénérer si vous en avez trop usé, mais aussi de vous stabiliser, de soigner les maux internes et externes, et de combattre la fatigue. Je médite très souvent quand je m'en vais sur les champs de bataille ou quand les réunions s'enchaînent, comme ces derniers temps. Si vous comptez vraiment m'aider à améliorer la situation déplorable de mon territoire, vous devez d'abord apprendre à vous ressourcer. Sinon vous vous épuiserez et ce ne sera pas bon, ni pour vous, ni pour ma cause.

Si... Il n'est pas certain qu'elle ait demandé à travailler sur sa cultivation pour arranger les problèmes de famine et de la stérilité des sols. Jiayi n'insiste pas là-dessus. Trop de serments la desserviraient. Il se méfierait de ses motivations sincères, donc elle préfère lui sourire et hocher la tête avec détermination, tout en réessayant d'exécuter les mouvements qu'il vient de lui enseigner. Elle les a retenus par cœur et il approuve à chacun de ses gestes. Des dizaines de questions à propos de la méditation parcourent ses pensées, mais elle n'en formule qu'une et celle-ci surprend l'Empereur :

— Puis-je vous considérer comme une personne de confiance, votre Majesté ? 

Ses sourcils se froncent, ne saisissant pas tout à fait pourquoi elle lui pose cette question, et puis, il se souvient de ce qu'il lui a dit à l'instant. Il lâche un soupir désabusé.