Épilogue

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Au milieu de la montagne fleurie de Xiaolan en plein cœur du printemps, les hauts arbres majestueux ouvrent la voie vers une vallée où se succèdent cascades et ruisseaux magnifiques. Trois jeunes femmes sont assises au bord de l'eau, leurs petits pieds délicats plongés dans la rivière revigorante, aux propriétés bienfaitrices. Elles se sont éloignées des souterrains et des autres disciples pour profiter du beau temps et des chants des oiseaux. Les Vénérables Immortels leur autorisent toujours toutes leurs sorties, à condition qu'elles leur fassent les yeux doux et qu'elles les flattent un peu. 

De toute façon, il ne servirait à rien de surprotéger leurs disciples. D'une part, elles cultivent depuis très longtemps leur essence et sont avancées dans le processus. Les Vénérables Immortels ont bon espoir pour elles. Ils pensent qu'elles atteindront l'immortalité un jour ou l'autre, et peut-être qu'elles reviendront enseigner à Xiaolan. Ils n'y croient pas vraiment. Ces trois-là obéissent à des esprits libres et sauvages. D'autre part, l'Empire du Centre est devenu un territoire sûr. Plus de guerre et de révolte. Le peuple est satisfait. Il ne redoute plus la famine et la pauvreté, bien qu'aucun ne soit réellement à l'abri d'un champ stérile ou d'une faillite. Personne n'échappe à des conflits de voisinage, des vengeances qui tournent au drame, des vols et des crimes affreux, mais, en soi, le territoire n'est plus en proie à de graves périls. 

Toutefois, alors qu'elles discutent de leurs entraînements, et des charmes de chacun de leurs shīxiōng, la conversation tourne à la dispute. Elles reparlent du passé et ne sont pas du tout d'accord sur certains points. Elles évoquent notamment une époque révolue où la guerre dominait, où l'incertitude régnait, où les Plaines Centrales se confrontaient à une perte certaine, affrontant la famine et la pauvreté. Chen Wangshu se lève d'un bond, éclaboussant les robes des deux autres.

— Je sais ce que je dis. 

— Parce que tu y étais ? rétorque Li Wen.

— Très drôle, Xiao-Wen. Ma mère m'a tout raconté. 

— Donc, tu prétends que la Dame de la Dévotion Solitaire s'est suicidée après avoir causé tant de torts ? résume Bai Hua, perplexe. À quoi bon risquer sa vie, sa liberté et son honneur si elle décide finalement de tout abandonner en choisissant de se punir elle-même ? Et puis, elle n'aurait pas reçu son titre de Dame de la Dévotion Solitaire si elle n'avait pas fusionné avec l'Amulette de Xi Wangmu. Réfléchis un peu !

— Ne me parle pas comme les Shīfu. Ils n'arrêtent pas de me réprimander.

Chen Wangshu, une moue boudeuse aux lèvres, se rassoit et jette ses pieds dans l'eau, éclaboussant à nouveau ses deux amies. Celles-ci pestent, mais ne commentent pas. Au lieu de cela, Li Wen prend la parole sur un ton volontairement mystérieux.

— Moi, je suis au courant de tout. La Dame de la Dévotion Solitaire a bel et bien fusionnée avec l'artefact, logiquement, et elle s'est isolée dans un village reculé, tout près de cette montagne. Elle a décidé de demeurer à proximité des Vénérables Immortels, en leur faisant jurer de ne rien dévoiler de sa présence ici, puisqu'elle devait d'abord se transformer en esprit démoniaque et renoncer à son essence.

— Selon ma mère, proteste Wangshu, elle n'a pas renoncé à son essence en s'apercevant de la puissance en elle. Par conséquent, elle a trouvé un moyen de fusionner sans devenir un esprit démoniaque.

— Et elle vécut heureuse, dans la joie et la bonne humeur, maugrée Bai Hua. Ne sois pas naïve et arrête de toujours écouter ta mère. Je suis sûre qu'elle invente complètement cette histoire et qu'elle se moque de toi.

— Pourquoi ferait-elle cela ?

— Pour que tu apprennes à différencier le vrai du faux, la rabroue Li Wen.

D'Or et de NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant