Comme un torrent insaisissable

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Pang Yun pénètre dans la chambre, deux sabres dans chaque main. Il les range en voyant Jiayi et leurs regards s'accrochent, avec une complicité qui fait blêmir l'Empereur. Celui-ci la lâche enfin, il la dévisage avec effroi, mais elle ne s'écarte pas. 

— Où sont donc passées les promesses de confiance mutuelle ? susurre-t-il. 

Contre toute attente, c'est elle qui le regarde avec dégoût, et non l'inverse. 

— Nous devons y aller, la presse Pang Yun. 

— Non ! Pas tant qu'il détient l'artefact. 

L'expert en divination ignore de quoi elle parle et il se contente de trépigner d'un pied à l'autre, devant les battants fracassés, guettant dans les couloirs. Long Zhelan pouffe avec amertume, désabusé. S'il lui fallait se lever et se battre, l'alcool le ferait tanguer et tomber. Il reste assis, mais se tient prêt à lancer un enchantement au besoin. Et Cheng Fen qui n'est pas là, envoyé auprès de Jingyi...

— Alors, cela concerne l'artefact ? Vous me trahissez pour cette ridicule petite pierre.

— Cette pierre peut me sauver.

Il se décompose et l'ivresse ne l'aidant pas, il explose d'un rire sardonique.

— Vous sauver ? Qu'en est-il de sauver tout un peuple ? Deux royaumes, des tribus, des milliers de gens de toutes les Plaines Centrales qui comptent sur cet artefact ?

Et là, une hypothèse jaillit dans son esprit. Il bredouille :

— Ne me dites pas...que...non...impossible ! Ne me dites pas que vous étiez cet opposant coriace dans la grotte près de Xiaolan. Votre intervention auprès des Vénérables Immortels, votre apprentissage... Tout cela pour voler l'Amulette ? 

Sa voix part dans les aigus. Il n'en revient définitivement pas. Pang Yun lui crie de se hâter, mais elle le rabroue à nouveau, agrippant le col de l'Empereur sans plus d'hésitation. 

— Où est cet artefact ? 

— Quel égoïsme, crache-t-il en retour.

— Égoïste ? Moi ? Vous possédez tout ! Un Empire, des gens, des gardes, une armée, des ministres pour vous conseiller, des remparts autour de votre palais et de votre cité, des armes, des frontières naturelles, des océans et des mers pour vous protéger. Moi, je n'ai rien d'autre que votre parole que vous me protégeriez et vous avez échoué le soir même de mon retour à la capitale. Zhang Xinyi était à deux doigts de m'abattre.

— Mais je vous ai sauvée.

— De justesse ! Parce que j'étais assez forte et déterminée pour résister et me débattre contre leur agression. Sinon, j'aurais été brutalisée, abusée et peut-être tuée, laissée pour morte et vous m'auriez retrouvée ainsi, anéantie pour toujours. Je ne peux autoriser personne à me protéger ! Je n'ai pas ce luxe. Je ne l'avais déjà pas en Heilong, et vous n'y changez rien. Je suis une Princesse déchue, l'ombre de la Grande Dame de Heilong, un esprit enchaîné. Je ne veux pas de cette vie... Cherchez mieux, cherchez bien, vous trouverez un moyen de préserver votre Empire de la ruine, j'en suis sûre. Pour ma part, cet artefact représente ma seule et unique salvation. Où est-il ? Dites-le-moi ! 

Dans son emportement, elle commence à le secouer, mais il demeure stoïque, tous deux les larmes aux yeux pour des raisons différentes. Pang Yun comprend bien avant elle que, peu importe ce dont il s'agit, l'Empereur ne répondra pas à sa requête, donc il prend les devants et projette une onde rouge qui percute Long Zhelan de plein fouet. Réagissant trop tard, il tombe à la renverse sur son lit, sous l'impuissance de Jiayi qui se redresse et fonce sur l'expert en divination. Ce dernier, pensant qu'elle le suit, tourne les talons et se dirige vers les couloirs. Sauf que, dans sa colère, elle le fait valser contre le mur en hurlant :

D'Or et de NoirOù les histoires vivent. Découvrez maintenant