20. Mantex

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JESS

- On est là.

La main de mon frère indiquait une table entourée de banquettes noires matelassées qui s'étendaient dans l'espace VIP du Mantex, connu pour être le repaire de négociations entre de nombreux réseaux de cette partie du pays. L'étage était entièrement réservé aux règlements d'affaires criminelles, tout le reste étant ouvert comme une simple boîte de nuit sans particularité. La plupart des fêtards présents ne savaient donc même pas qu'au-dessus de leurs têtes, on négociait des armes, des drogues ou projetait de tuer quelqu'un. Notre table était accolée au garde-corps de l'étage qui faisait pratiquement le tour du bâtiment, offrant une vue parfaite sur les différents éléments de la salle en contrebas : la scène, la piste de danse et le bar. J'apercevais Camilo, Finn et Lyzio adossés nonchalamment contre ce dernier, patientant pour l'arrivée de leurs commandes.

Cependant, aucune trace d'Elyo.

Mon regard scruta alors plus attentivement les recoins du club, sans succès. Elle n'était ni à l'étage, ni au bar, ni dans les escaliers. Alors que j'inspectais désormais la foule de danseurs, mon œil fut soudain attiré par un dos nu plongeant révélant des tatouages qui retinrent mon attention. Je suivis la silhouette du regard, hypnotisé.

- Tu sais que tu la fixes ? m'informa inutilement Jay quelques secondes plus tard. On dirait un psychopathe. Ou un gars un peu trop accro.

Je me détournais d'Elyo pour venir me concentrer sur mon frère et ses yeux bruns moqueurs, soupirant :

- Elle me saoule.

Ma réponse paru l'amuser car il fut aussitôt secoué d'un grand éclat de rire.

- Je rectifie, on dirait un gars un peu trop accro qui n'assume totalement pas.

Son ricanement me fit lever les yeux au ciel. Il s'empressa de continuer :

- Tu ne veux toujours pas me dire ce qu'il s'est passé à Brighton, petit frère ? Parce qu'il s'est passé quelque chose, me coupa-t-il en me voyant ouvrir la bouche pour rétorquer. Ça se voit ! Et je te connais. Raconte, aller !

Me donnant une excellente occasion de ne pas lui répondre, mon chef et mes collègues nous rejoignirent, posant leurs verres sur la table sans interrompre leur conversation :

- Je déteste venir ici. Ça me rappelle.. des trucs que j'aimerai oublier.

- L'autre club était fermé, Camilo, indiqua Finn avec compassion, s'installant à côté de moi pour me donner un coup de coude et me demander malicieusement : T'as pas envie de frapper le gars qui danse avec elle ?

Son doigt pointait Elyo. Face à cette intervention, mon frère me jeta un regard victorieux, levant théâtralement ses bras au ciel.

- Non, répondis-je froidement, serrant mes poings sous la table tout en les gratifiant d'une œillade meurtrière.

Si.

J'en avais putain d'envie. Je le savais.

Mais j'étais fort pour le déni. J'arrivais presque à me convaincre que c'était uniquement parce que je ne m'étais pas battu depuis longtemps et que je cherchais n'importe quel moyen pour me défouler.

Ce qui va d'ailleurs se régler très rapidement si ce mec n'enlève pas ses mains de ses hanches immédiatement.

Il n'y avait aucune chance que des gars puissent profiter d'elle alors que je n'étais pas encore en capacité de le faire. Même, ils ne devaient pas l'approcher tout court. C'était bien évidemment par simple solidarité masculine. Je ne souhaitais pas que mes confrères finissent traumatisés, je ne pouvais pas les laisser encourir ce risque en toute connaissance de cause. Je les sauvais en les éloignant d'elle. Et me dévouais. Ça n'avait de toute manière plus grande importance, j'étais déjà bien traumatisé.

CARELESS WITH MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant