30. Meurtres et mystères

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ELYO

À mon entrée dans la salle à la décoration épurée et spartiate qui allait aujourd'hui accueillir notre réunion, un grand sourire espiègle s'afficha sur le visage épuisé de Camilo. Finn fit de même, s'amusant lui aussi de me voir passer la porte aux côtés de Jess.

- Vous êtes venus ensemble ? s'empressa-t-il d'interroger, ses iris bleus pétillants d'une lueur malicieuse.

- On est juste arrivés en même temps, lui répondis-je tout en fusillant des yeux mon supérieur qui s'était mis à ricaner.

Le blond s'occupa de me faire remarquer, moqueur :

- En retard tous les deux, donc.

Désireuse de clôturer cette discussion, je m'assis autour de l'imposante table qui occupait le centre de la pièce principale de notre dépendance sans donner de suite à sa réplique. Les quelques feuilles que comportait le dossier contenant des informations succinctes sur la KIP y étaient étalées, indiquant la présence de la prison sur un îlot situé en pleine mer Blanche. Lorsque Finn commenta qu'il voulait que le connard que nous allions y envoyer y crève de froid, Camilo répliqua sèchement qu'il espérait au contraire qu'il y survive le plus longtemps possible dans l'espoir de le voir souffrir une éternité.

Et je pensais pareil que lui.

Je détestais cet homme qui m'avait tout pris : ma vie, ma personnalité et ma stabilité mentale. Je le détestais de toute mon âme, du plus fort qu'il n'avait jamais été possible d'haïr quelqu'un.

Miller.

Je voulais le tuer. L'étrangler de mes propres mains et le faire souffrir autant que ses propres actes m'avaient fait souffrir.

Autant qu'ils me faisaient toujours souffrir.

Je savais que j'attachais à lui la source de l'entièreté de mes problèmes - même s'il l'était en quelques sortes -, venant à trop imaginer qu'en tuant cette personne qui avait provoquée ma brutale descente aux enfers, tout allait finir par s'arranger. Car bien qu'il ait un jour causé la chute, le processus était désormais en cours, et éliminer celui qui l'avait fait débuter n'allait pas me permettre de l'arrêter miraculeusement.

C'était moi qui devait le faire, usant de ma propre force pour parvenir à me ressaisir complètement.

Mais j'étais faible, on me l'avait déjà bien assez dit.

Et surtout, on avait sûrement raison.

L'idée d'une vengeance qui résoudrait l'entièreté de mes problèmes me séduisait bien plus que celle indiquant qu'un long et pénible travail psychologique devrait avoir lieu.

Coupant mes pensées, Camilo vint informer :

- Nous devrons nous rendre à la prochaine soirée de paix. Il nous faut obtenir quelque chose là-bas avant de mettre la dernière étape de notre plan en marche.

Les soirées de paix étaient des fêtes organisées depuis presque un siècle par une ancienne famille influente qui profitait de sa notoriété passée pour rassembler des personnes de notre monde à l'intérieur de sa propriété, voulant par là être le centre de nombreuses alliances. Car, en spécificité de ces rassemblements, la plupart des invités présents se détestaient, souvent en concurrence. Il était pourtant interdit d'y fomenter un assassinat ou d'en profiter pour organiser un quelconque règlement de compte, laissant cependant libre court à toute forme d'espionnage, contribuant encore plus à l'amusement des hôtes qui accueillaient les festivités. 

Camilo releva les yeux - dans lesquels dansait une flamme vengeresse - pour les planter dans les miens et me promettre :

- Elyo, je te jure qu'on va se venger.

CARELESS WITH MEOù les histoires vivent. Découvrez maintenant