Je ne comprends pas.

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  Il va partir.
Après avoir un peu ranger mes affaires dans le placard, la salle de bain, il tourne en rond lorsque le Mignon Docteur entre en… oh!!! …uniforme de pompier.
Ainsi, il semble moins gringalet.
Il est loin du farfadet bondissant.
Il s'assoit près de moi et pose machinalement sa main sur mes doigts.
Il semble abattu.
Un cycliste mort, au sommet du col.
Je voudrais lui dire mon soutien à défaut de le consoler.
Comment dire dans ce corps cercueil, muet?
Alors je tourne sa bague, dans un sens ,dans l' autre.
Je pense très fort, en boucle,  espérant qu'il puisse m'entendre, ailleurs, dans son cœur.
-Je vous comprends, vous êtes un homme bon, vous avez fait de votre mieux.
-Mmmmmmm.
Il repart d'un pas lourd que je ne lui connaît pas

Puis c'est mon tour , le brancardier fou me propose un nouveau véhicule : un fauteuil roulant.

Un dernier sourire à mon Homme, je le retrouverai ce soir.

On démarre sur les chapeaux de roue, on file dans les couloirs, on fuse hors des ascenseurs.

Premier rendez vous:
Changer la résine pour une attelle.
La scie sauteuse vrombit.
J'observe inquiet, s' il faisait un faux mouvement ?
Mon épaule et ma main sont enfin dégagées.

Puis l' ergothérapie.
Une grande pièce claire, avec d'étranges machines.
Un bain écossais?
Une dame trempe mon bras mort dans de l'eau très chaude, puis très froide, plusieurs fois.

Je crois que j' ai la sensation du froid.
Une classe de maternelle?
D'autres personnes enfilent des perles, transfèrent des bouchons d'une boîte à une autre.
Leurs gestes sont maladroits, ils sont concentrés.
Bientôt, je pourrais aussi faire  comme eux.

On déboule chez l'orthophoniste.
Elle me reparle de plasticité.
Mes neurones morts ne servent plus à rien.
La zone du langage a été touchée, mon cerveau ne sait plus parler, peut être qu'il y a des concepts qu'il ne comprend plus.
Par contre, mon cerveau peut trouver d' autres voies, des déviations.
Je vais là aussi devoir m' entraîner, tous les jours.
Elle me donne des cartes colorées, avec des dessins simples : un fruit, une cuisine, des arbres…
Il me suffira de montrer une image pour demander un objet, exprimer des  idées primaires.
Voilà aussi une roue des émotions, je vais pouvoir exprimer ce qui ce passe en moi.
Là, c'est la joie.

Je rentre trop tard dans mon antre pour le déjeuner,le service est  toujours en sous effectif, personne ne viendra me faire manger avant ma prochaine expédition vers la salle des kinés.
Grâce à un étrange bidule qui ressemble à un siège suspendu, on me transfère dans une piscine.
Le kiné manipule ma jambe inerte.
-Regardez votre jambe, même si vous ne sentez rien, imaginez que vous la bougez..

Alors j'imagine fort quand il la pli, la dépli. J' imagine cette jambe qui marche, qui bouge.
Là aussi je regarde les autres.
Aux barres parallèles, à tirer des poids à l'aide d'une poulie.
Comme eux, je vais y arriver.

16h.
Épuisé.
Retour dans la chambre.
Je demande à être couché.
Je m'endors.

18h.

Il me fait manger à petites bouchées.
Je reste étonné par la dextérité de ces grandes mains brunes .
Il a l' air étrange. J'ai eu un baiser sur le front, rapide, léger.

Silence.
Lui toujours à babiller de tout de rien, de sport, de courses à béquilles.

Rien.

Je sors les planches d'images.
Fièrement je lui montre une carafe et un verre: j'ai soif.

Il a fait du parapente tout à l'heure.
Surtout, je ne dois rien dire à Nanny.
Comment pourrais-je cafter?

Le ciel s'élève, le sol s'enfuit sous ses jambes.
Il plonge vers le sol à une vitesse vertigineuse puis s'élève en tourbillonnant.
Il m'explique, enthousiaste, les portances, les traînées..
Il est beau mon Homme quand il vibre de passion.
Il me désigne deux rapaces .
Ils connaissent chaques courants , ils sont des guides pour les parapentistes.
Les nuages dessinent des ombres dans la vallée.
Le lac scintille, aujourd'hui il est bleu roi.
Le sol se précipite vers lui.
Il se pose. Des gens courent vers lui.

Maladroit, je prend la roue des émotions , je lui montre: joie.

Une notification.
Un nouveau film: celui du départ et de l'arrivée.

Je le vois descendre de la camionnette, des amis lui tapent sur les épaules. Il est heureux.
Un grand blond , la trentaine, les longs cheveux retenus dans un bandeau de surfer le prend dans ses bras.

Ho !? Sors tes mains de ses reins!
Il lui donne une tape sur les fesses.
Ça le fait rire, pas moi.
Il l'installe dans sa nacelle, une caresse sur la nuque par çi, une caresse sur le front par là,
Il le regarde droit dans les yeux avec un sourire éblouissant.

Je me tourne vers lui.
Il voit ce que je vois.
Il rougit, se gratte le crâne, veut arrêter la vidéo.
Ah, non, on va jusqu' au bout.

Il atterrit, on l' aide à se relever.
Toujours son grand sourire.
Mais….mais….il bande !!!!

La caméra élargit son champ.
Derrière lui, le Surfeur retire son harnais.

Mais…mais…lui aussi il bande!!!

Mon Homme perd l' équilibre, le Surfeur le rattrape par les hanches, colle ses fesses à son ventre, le bras passe discrètement sur l' érection, en faisant semblant de détacher une boucle sur la cuisse.
Il se penche dans son cou., répandant les longs cheveux sur ses épaules.

Mon Homme se tourne vers lui pour lui répondre.

????????

Il prend les béquilles .Fin.

-Kkkkkkkkk…

-Un autre son, tu viens de prononcer un autre son!!!!

Je-m'en-fou.

Je suis furieux. Je fulmine.

-Je suis désolée, je suis tellement désolé de ce que je t' ai fait subir
J'ai honte , vraiment honte.
Je ne viendrai plus te voir, t'importuner, j'espère que tu me pardonneras.

Dandy, je ne suis pas gay.

Il sort.

Il me quitte?
Il m'abandonne ?
Je ne comprends pas.

J'utilise mes images.
Madame, donnez moi un somnifère.

💐💐💐💐💐

Oups, oups, oups.

D' après vous quel est le soucis de concept de Dandy?











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