T'es qui toi?

Joshua

Un autre personnage est passé dans mes pensées, avec insistance.
Je le laisse raconter.
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Je viens de recevoir un SMS.
L'homme qui venait chuchoter derrière ma porte est à l'hôpital .
Grave ,dit le SMS.

J' ai l'impression d'étouffer.
Il ne va pas mourir, il ne doit pas mourir.

Je dois aller le voir.
Je tourne entre mon lit, mes ordinateurs, ma bibliothèque de mangas.

Je n' ai plus de chaussures, plus de vêtements d'extérieur.
Cela fait 3 ans que je ne sors plus de ma chambre.

J' ai un haut de pyjama un peu épais, avec la tête de mon héros de manga préféré, un pantalon style jogging, une paire de charentaises.
Je regarde sur internet : l'hôpital est à 10 km.
Il y a des bus jusqu'à 20 h.
1 euro 20 pour le ticket.

J' ouvre la porte. J'ai le vertige.
Mon père et ma mère me regardent traverser le salon , ahuri.
Où vas-tu?
Je n' ai pas l'énergie de répondre.

L'extérieur est trop vaste.
Il va pleuvoir.
L' arrêt de bus désert.
J' ai peur, si peur.

Je m'installe dans une encoignure.
Je suis sûr de me faire agresser.
Je voudrais disparaître.
Je suis petit, tout petit, tout petit,  tout petit, tout….

Et mec, arrête de dire ça, tu fais flipper!
Un arrêt. Je sais où je suis. Je saute du bus sur le trottoir.
Je ne peux plus rester avec tous ces gens qui me regardent d'un air bizarre.

L'orage gronde.
La pluie commence à couler sur mes épaules. Il est tard.
Je cours, j' ai peur, je cours, j' ai peur, personne ne me voit, j' ai peur, je cours….

Pchouf, pchouf,pchouf, mes chaussons trempent me donnent la cadence ; ptptptptpt , les gouttes de pluie s'écrasent sur mon crâne, mon nez, mes épaules.
J' ai peur, je cours, j' ai peur, je cours….plus que huit kilomètres.

L'hôpital.
Chambre 212.
Il y a des gens devant l'ascenseur.
Je grimpe les escaliers.
Personne ne me parle, personne ne me parle, personne ne me parle…

Je pousse la porte.
, je pensais être seul avec lui.
Je me colle au mur, je rampe jusqu'au   coin en face du lit, proche d'un vieil homme.
Je me laisse tomber au sol.
Il est vivant, tout pâle dans son lit.

J' entend un rythme métallique.
Tac,tac….tac,tac….tac…tac….tac…
C'est son signal. Il m'a vu. Il sait que c'est moi, Joshua.
On se sourit.
Je cache mon visage au creux de mes bras.
J' ai peur. Personne ne me voit, personne ne…

Joshua? Je reconnais la voix du docteur un peu bizarre. C'est le seul qui accepte de venir  à la maison, même en pleine nuit, quand je suis malade.

Joshua, tu vas bien ?
Sa bague avec un caniche tombe dans ma main.
Prends, fais la tourner.

Je reste là, à côté.
Il me cache, personne ne peut me voir…
Je grelotte dans mes vêtements mouillés.
Une très très vieille femme s'assoit devant moi.

Tu as froid petit?
Tu as perdu ta langue?
Tu n'aimes pas trop les gens toi.
Tu as peur d'eux?
Bon, tu ne peux pas rester mouiller comme ça, tu vas attraper la mort!
Elle regarde autour d'elle.
Docteur ,donnez-lui votre t-shirt.
Je rit, il ne veut pas, elle lui fait les gros yeux, là tout de suite? Oui, là tout de suite.
Il se déshabille.
Les autres le matent, il est bien foutu.

Je me recolle au mur pour me changer dans la salle de bain, lorsqu' une autre vieille décide d'organiser les transports de retour.

Je vais rentrer avec le docteur, un autre petit vieux qui ressemble au grand-père que j' aurai voulu avoir.
Le chauffeur me fait si peur, si peur
Un pilier de rugby, encore dans sa tenu de match, un géant au nez cassé, un bandeau blanc autour du front.
Avant de partir, je tape le code sur le mur.
Il me répond .

L'épreuve des couloirs, ils m'attendent au rez - de -chaussée.
Je calcule, on est quatre. L'un d'eux va s'asseoir à côté de moi. Terreur.

Le docteur s'excuse, dit qu'il vont se serrer à  deux sur le siège avant.

Le docteur habite Chez les Praz.
Je ne veux pas y aller, je ne veux pas y aller…

Première halte, on pose le petit vieux.
Terrifiant.
Terrifiant.
Je me laisse tomber entre les deux sièges, sur le plancher.
Les portes avant claquent, je me met en boule, autant que je peux, les mains entre  les genoux.
Un immense drap de bain vole au-dessus de moi , une main le tire bien sur  ma tête, une autre sur mes pieds.
Désolé, bonhomme, je n'ai que ça.

Je suis dans un cocon.
La serviette sent la lessive,le propre, du  gel douche à la noix de coco. Je suis bien. La plancher de la voiture vibre doucement. Je me berce.

Ma portière s'ouvre, je rampe vers le sol.

Garde le drap de bain, rentre vite chez toi. Prends une douche chaude.

Les injonctions graves viennent de ce grand  dos rassurant.

Je file vers l'entrée, je me précipite sous la douche chaude, je claque la porte de ma caverne, enroulé dans l'immense serviette.

Joshua, Joshua, tu as de la visite cet après-midi.
J' entends le code.
Tac,tac…tac,tac….tac…tac….tac…
Je ne réponds pas.
Ce n'est pas lui.
Une voix chuchote au travers de la porte.
Si tu le veux bien, c'est moi qui viendrai chuchoter derrière ta porte.
Tu as pris ta douche?
  Je vais te lire le journal….

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