Chapitre 9

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Dans le taxi qui le ramenait chez lui, Luis tremblait comme une feuille. Il n'essayait plus de dissimuler ce tremblement sous cette attitude virile et protectrice qu'il avait gardée quand il était encore en compagnie de Sabine. Il était désolé pour la jeune femme qui avait dû écourter son entrevue avec ce jeune directeur qui la courtisait et avec qui elle semblait s'entendre mais, pour Luis, l'urgence était qu'il parte de ce lieu devenu malsain à ses yeux et il tenait à ce que son accompagnatrice soit sauve.

Son chapeau sur le siège vide derrière le chauffeur, le journaliste se passait la main dans ses cheveux, il n'arrivait pas à y croire. Cette sensation dans la chambre de Luisdel, ce rire démoniaque qu'il avait entendu et qui lui avait glacé le sang, cette vision effroyable des invités aux têtes de squelettes lorsqu'il avait fui la chambre. Il avait cru n'être entouré que de suppôts du diable lui qui pourtant ne croyait pas en ces superstitions. Seule Sabine avait une tête normale ! Il devait s'enfuir, pensa-t-il, ça faisait beaucoup trop pour son petit esprit cartésien. Un regard tourné vers Luisdel avant de partir, celui-ci lui adressait un sourire malicieux et, son regard, ce regard rouge sang lui rappela celui de cette ombre qu'il avait cru voir une nuit dans sa chambre. Luis se revit attraper la main de Sabine sans lui fournir d'explications et la traina dans la rue où il héla un taxi au grand dam de la jeune femme qui se laissa faire.

Le journaliste secouait la tête en signe de dénégation, inquiétant même le chauffeur du taxi qui l'observait dans son rétroviseur le front plissé. Il ne voulait pas croire que son monde basculait dans l'abstrait même si ses soupçons commençaient à trouver un fondement dans l'étrangeté de ce qu'il vivait. Il pensa soudain à Axel qu'il avait revu plus tôt dans la soirée et qu'il avait laissé chez lui, un petit espoir naquit dans son esprit, l'espoir d'une possible explication loin du regard épouvantable de Luisdel :

— Pouvez-vous accélérer, la voie est libre, s'il vous plaît, demanda-t-il au chauffeur qui s'exécuta.

Il s'adossa et ferma les yeux. Aussitôt, toutes les images de sa vie depuis la semaine d'avant défilèrent dans son esprit et, soudain, il rouvrit les yeux en s'exclamant :

— Il y a clairement quelque chose qui n'est pas à sa place !

Le taxi gara devant son immeuble, il paya le chauffeur et descendit puis, se précipita en courant vers la barrière de son immeuble lorsqu'il sentit une force le freiner et le retenir par le bras :

— Qu'est-ce...qui est là ? demanda Luis en se retournant pour ne voir personne pourtant, le bras levé, il sentait bien que quelque chose le tenait fermement sans parler de cette odeur de soufre qui lui avait brusquement envahi les narines.

Un vent fort souffla soudain, un de ces vents glacials venus de nulle part et dont la froideur défit toutes les lois de la nature. Un vent qui glace le sang. Le chauffeur, qui avait observé la scène, prit de panique, démarra en trombe disparut presqu'aussitôt sous le regard apeuré de Luis.

« Ecoute ce que ton ami va te dire, il est temps que tu sache la vérité, le temps presse mais, tout n'est pas aussi noir qu'il te le dira. » murmura une voix tout près de Luis avant qu'il ne sente plus d'emprise sur son bras.

Il se retourna, chercha encore à savoir qui se tenait près de lui dans cette nuit noire dans cette rue à présent déserte. Les battements de son cœur couraient dans tous les sens et, il sentit des gouttes de sueur faire des sillons dans son dos, sous ses vêtements. L'odeur de soufre avait disparu, il comprit que quel que soit la présence qui lui avait tenu le bras, elle était partie. Il pénétra l'enceinte du bâtiment et prit l'escalier en courant. Il fallait qu'il parle à Axel. Il tambourina sa porte en criant le nom d'Axel. La porte s'ouvrit devant lui :

— Je veux tout savoir, Axel, je deviens fou ! dit-il en pénétrant dans son studio tout en se débarrassant négligemment de ses vêtements devenus trop encombrants.

S.A.R MILAN F. LUISDELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant