S.A.R MILAN F. LUISDEL

CHAPITRE 11

Luis regardait sa mère et voyait bien qu’elle était sincère, il ressentait sa peine mais, il ne pouvait s’empêcher de penser que sa vie n’avait pas eu de sens depuis sa naissance et qu’elle n’a effectivement pris de sens que depuis l’arrivée de Luisdel ! Cette révélation lui torturait l’esprit. S’il s’était trouvé si laid et repoussant, s’il avait toujours eu du mal à se socialiser et manquait d’assurance, il y avait bien une raison et si tout cela avait pris fin avec l’arrivée de Luisdel c’était bien parce que son existence n’avait qu’un seul but. Il regardait à présent dans le vide, il ne voyait plus rien ni personne ; il semblait se trouver dans une autre pièce, une douleur lancinante naquit dans sa poitrine et, il laissa échapper quelques larmes chaudes sur son visage avant de se reconnecter à son environnement et de les écraser dans une attitude résignée. Il se leva, s’avança vers la fenêtre et entendit Axel dire :

— Je sais que ça doit te faire un choc et puis, ce n’est pas drôle de savoir que le seul but de notre existence est de servir l’existence d’un autre, d’un être aussi primitif mais qui plus est mais, tout n’est pas perdu et c’est pour ça que nous sommes là ta mère et moi…

— J’ai des frères ? demanda Luis en se retournant vers sa mère.
Celle-ci leva des yeux tristes qu’elle lui adressa puis, répondit :

— Oui, trois : un garçon de 25ans et deux petites sœurs de 23 et 20ans…

— Ils vont bien ?

Aucune réponse de sa mère ne parvint à ses oreilles alors, sur un ton autoritaire, il insista :

— Est-ce qu’ils vont bien, Rachel ?

— Ils sont robustes tous les trois.
Aymeric, ton petit frère est un sportif invétéré, il est Sous-lieutenant de l’armée de terre ; Carmen, est la deuxième, elle prépare un Doctorat en Psychologie et Priscille, la dernière, vient d’avoir sa Licence en études des langues Africaines…répondit Rachel, le bonheur dans les yeux.

— Je suis heureux d’apprendre que tu as obtenu de ce monstre tout ce que tu désirais, qu’en plus, ils soient tous les trois intelligents et ont l’air équilibré ! Jamais il n’est revenu dans vos vies ?

— Jamais. Il a respecté sa parole, il faut au moins lui reconnaître ça et puis, j’ai conçu autant de fois que j’en ai eu envie, répondit sa mère.

— Qu’est-ce que tu fais là alors ? Pourquoi reprendre contact avec moi ?

— J’étais heureuse d’avoir tous ces enfants, Luis, j’étais fière d’honorer mon mari en faisant de lui un père mais, crois-moi, lui comme moi n’avons jamais ressenti un bonheur complet après t’avoir abandonné cette nuit-là ! Je m’en veux jour et nuit parce que même si tu es venu au monde dans des conditions discutables, tu as fait partie de moi pendant 9 mois ! Je t’ai chanté des berceuses, tu as été ma première fierté de femme mariée ; ton père, de regrettée mémoire, s’endormait sur mon ventre pratiquement toutes les nuits pour te sentir bouger dans mon ventre.

— Il est mort ? demanda Luis avec un pincement au cœur.

— L’année dernière. Une cirrhose aigue. Il s’est mis à boire après l’abandon de notre premier-né. Il m’a caché son addiction pendant des années et quand je l’ai découvert, il ne pouvait plus se passer d’alcool. L’année dernière il est parti. Depuis lors je ne porte que du blanc et je me couvre de cette façon. répondit la dame la douleur dans la voix.
La pièce plongea une fois de plus dans un silence convenu qui permit à Rachel de reprendre ses esprits et à Luis d’intégrer dans son esprit qu’il ne verra jamais son père en vie.

— Tu peux être sûr que je regrette de t’avoir abandonné, Luis, aucun enfant ne remplace la perte d’un autre enfant ! J’étais heureuse à la naissance de chacun de tes frères mais aucun n’a jamais pu effacer de mon esprit mon premier-né. Je t’ai aimé dès la seconde où je t’ai senti grandir en moi et quand tu es né, ton père et moi avons pleuré des seaux de larmes parce que nous savions quel acte horrible nous devions poser. Si je suis là ce soir c’est parce qu’il m’a fait promettre sur son lit de mort de te chercher et de te sauver des griffes de cet être malfaisant, tu es notre sang, Luis !