«𝗖𝗵𝗮𝗽𝗶𝘁𝗿𝗲 18» : 𝖽𝖾𝗋𝗋𝗂𝖾̀𝗋𝖾 𝖼𝖾𝗌 𝗆𝗎𝗋𝗌

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J'ai un mauvais pressentiment.

Ma mère regarde de nouveau vers le sol, le téléphone toujours contre son oreille. Et puis, elle a hoché de la tête et a remercié la personne avec qui elle parlait. Un soupir s'échappe de ses lèvres, la main contre la poitrine, elle ne semble pas du tout bien. Elle s'est dirigée vers moi, et a posé ses mains sur mes épaules en me regardant d'un air désolé.

— Izuku, mon chéri, quoique je puisse te dire promets moi de ne pas paniquer.

Paniquer, à propos...?

Je hoche la tête en signe d'approbation, mais en vérité, je ne peux le promettre réellement. Tout dépendra de ce qu'elle s'apprête à dire, mais je sais que si cela concerne T/p, je ne pourrai pas m'empêcher de paniquer.

— Alors... ma mère reprend difficilement son souffle, ton amie T/p... est hospitalisée.

Mon cœur semble s'arrêter de battre pendant un millième de seconde, mes pupilles dilatent, mon sang ne fait qu'un tour. Alors que la frayeur me ronge de plus en plus, ma mère se dépêche de me rassurer :

— Ne t'en fait pas mon chéri, les médecins l'ont à l'œil, elle va bien !

Malgré tout, je ne peux pas empêcher ce sentiment intérieur qui noue mon estomac de disparaître. Et moi qui avais faim tout à l'heure, mon appétit s'est rapidement volatilisé.

— Les heures des visites ne sont pas encore finies, ajoute ma mère en retirant ses mains tremblantes de mes épaules, on peut aller lui rendre visite, tu veux ?

Sans dire un mot, j'accepte en hochant la tête. Je m'habille et dans ma chambre, je revois les chaussures que j'avais offertes à T/p. Elles sont mises dans un coin de la pièce. All Might lui a acheté de nouvelles paires, et elle a insisté pour me rendre les miennes. Elles sont encore sales à cause de la boue, les lacets qui étaient toujours blancs à mes pieds sont grisâtres à présent. Elle n'en prenait pas soin du tout, et ça ne me dérangeait pas plus que ça - moi qui suis censé prendre soin de mes affaires.

En dehors de ça, le trajet m'a paru extrêmement lent. Le temps s'est figé devant moi quand nous sommes enfin arrivés devant l'hôpital. J'ai senti mon corps s'alourdir à un point. Était-ce l'atmosphère, la fatigue, ma tristesse ? Vraiment, je ne sais pas.

J'ai vu la main de ma mère attraper lentement mon poignet, il y avait son dos, ses cheveux bougeaient au rythme de sa marche sur ses épaules. Je n'ai pas réussi à ressentir sa poigne sur ma chair, parce que je la voyais trembler, et pas qu'un peu. Les gens bougeaient autour de nous, ils avaient l'air pressé, d'autres inquiets, y avait des médecins, des infirmiers, beaucoup trop de monde. Mes oreilles bourdonnaient, mes doigts me fourmillaient, mon corps les a rapidement suivis. Nous nous sommes arrêtés, je ne faisais que regarder mes chaussures rouges. Le sol sous mes pieds, m'aspirait, mes semelles étaient comme collées au par terre. Soudain, j'ai enlevé mon poignet de l'emprise de ma mère, elle me faisait terriblement mal, le bruit aussi. J'ai bouché mes oreilles de toutes mes forces, mes lèvres bougeaient toutes seules, je les mords pour arrêter ces tremblements incessants.

Ma mère s'est dépêchée pour prendre le numéro de chambre de T/p, je l'ai écoutée faire, et rapidement elle m'a conduit dans un coin du couloir qui était un peu plus calme que ce que j'avais pu voir.

— Mon chéri, tout va bien se passer, reprends-toi ! C'est T/p qui t'inquiète ?

J'ai secoué la tête, pour lui faire comprendre que non. Actuellement, je stresse sans en connaître la raison. C'est peut-être le bruit, les gens, mon anxiété sociale.

Ma mère a serré mes mains, sans me faire mal, elle m'a dit de lever les yeux, de respirer. J'ai obéi, et j'ai vu son regard. Il brille d'une lueur si douce, mélancolique, je n'ai pas pu empêcher mes yeux de perler à leur tour et j'ai eu une soudaine envie de pleurer.

— On y va, d'accord ? Elle avait chuchoté, avait posé sa main sur mon épaule et m'avait souri tendrement.

— Hm ! Frénétiquement, j'ai hoché la tête d'un signe affirmatif.

Elle qui était accroupie à ma hauteur, elle s'était relevée et avait frotté sa jupe. Puis, cette fois, elle a attrapé ma main avec une douceur déconcertante. Je l'ai suivie, et comme pour me rassurer, elle me lançait des regards bienveillants de temps en temps. Quand nous sommes arrivés dans l'ascenseur, on a croisé un patient, il devait avoir mon âge et était accompagné d'un médecin. Dans son regard, j'ai lu toute la tristesse du monde. Et puis, la réalité m'est tombée dessus comme un smash. Nous qui connaissons la paix derrière ces murs maculés de blanc, à l'intérieur, c'est la mort que côtoient tous ces pauvres patients. Je ne veux plus revenir ici, et plus personne d'autre.

Mais il faudrait bien soigner les gens, mon cher Deku !

Pas quand on peut éviter qui leur arrive malheur, je veux que le monde entier soit en paix.

Il faudrait déjà que tu le sois avec toi-même, le sans-alter.

Je serai en paix avec moi-même quand tout le monde le sera avec soi-même, j'en suis sûr. Et après, personne n'aurait à s'en faire, c'est certain !

Tu es beaucoup trop préoccupé par les autres, c'est ton souci, ton plus grand défaut. Ça t'apportera des problèmes à l'avenir.

J'en ferai ma plus grande force et l'une des qualités dont je serai le plus fier. Et ce, quoi qu'il en coûte.

×××

Ton point de vue :

À force de broyer du noir, je n'ai pas remarqué que mes yeux n'ont pas quitté le plafond du regard, je suis actuellement insensible à la lumière. Malgré les rideaux blancs qui m'entourent, j'entends une porte s'ouvrir. Ça doit être une infirmière, ou peut-être un médecin, qui veut analyser mon état et s'assurer que j'aille mieux. Malgré le fait qu'aller mieux ne soit pas le mot adéquat, si je dois décrire mon état actuel, je dirais qu'il ressemble à un condamné résigné à son sort tragique. Sincèrement, à l'heure qu'il est, je n'ai aucune envie de voir le reste du monde. Être seule me va très bien, ça pourrait même améliorer mon triste état.

— .../P ?

Je tends mon oreille, j'ai cru entendre mon prénom. Mais en plus de ça, cette voix me dit vaguement quelque chose. C'est celle d'un enfant... Un garçon... Quelqu'un dont je suis extrêmement proche.

— ..T/p ?

Je ne pus retenir un petit sursaut de s'échapper, et je me suis sentie tout à coup super froide. Comme un seau de neige qu'on m'aurait renversé en pleine figure, les restes dégoulinant doucement à l'intérieur de mon vêtement bleu, celui fourni par l'hôpital. La paralysie sur tout mon corps se brise soudainement, et je peux enfin ressentir mes doigts serrer le plus fortement possible mon léger drap blanc.

— T/p ?

Une petite silhouette aux cheveux ébouriffés s'avance vers mes rideaux, la peur qu'il voit sa gardienne dans un piteux état me submerge. Je serre la mâchoire, et je prie n'importe quoi pour qu'il ne tire pas les légers tissus blancs qui nous séparent. Malheureusement, on n'entend pas mes prières, et ses grands yeux verts émeraudes me font face. Je suis rapidement rassurée par son sourire bienveillant, mes yeux en larmes, je les ferme pour éviter la confrontation. Mais c'est que j'écoute ses vêtements se froisser légèrement, signe qu'il marche vers ma pauvre personne. Ma main froide qui serrait si fort le drap, fut recouverte par un cocon de chaleur soudain. En ouvrant les yeux, je remarque que c'est la paume de main de Izuku, posée sur la mienne, qui me fait cet effet. Son sourire ne quitte toujours pas son visage alors qu'il me regarde toujours avec cette étrange lueur dans ses orbes.

— Je suis là T/p, n'aie pas peur. Me rassure-t-il en ajoutant son autre main à l'étreinte.

Faiblement, j'acquiesce de la tête. En y pensant un peu plus, j'ai honte à l'idée que ce soit Izuku qui me rassure et qui me couve, alors que c'est moi qui suis censée le faire, étant donné que je suis sa gardienne.

— Ce n'est pas à toi de me dire ça. Je lui reproche d'une voix enrouée.

Étonnamment, il rigole, son rire est aussi léger que le vent et aussi doux que de l'eau. Et c'est que je souris malgré moi. Izuku ne me répond pas, il fait complètement abstraction du rôle que j'étais supposée jouer dans notre relation. Et puis, c'est vrai que dans mon état, je n'ai pas trop le droit à la parole. En plus de ça, je n'ai finalement pas envie de me contenter du rôle de gardienne qu'on m'a donné. Je suis Toshinori T/p, une humaine, et qui aime éperdument Midoriya Izuku.

Humaine ⁱᶻᵘᵏᵘ ˣ ʳᵉᵃᵈᵉʳOù les histoires vivent. Découvrez maintenant