13. Une question d'avenir (2)
Trois miroirs, une partie de la vitre teintée, et les lampes murales du couloir, c'est ce que j'ai brisé, en plongeant dans le plaisir. Ça amuse beaucoup Chost, et j'aurais pu en rire, si deux éléments ne m'alertaient pas : le premier, nous manquons cruellement de discrétion. Et le second, plus personnel, moi, je manque cruellement de contrôle.
Plus Chost me touche, plus il apprend à manier mon corps. Et plus il apprend à le manier, plus la jouissance m'amène à briser tout ce qui est composé de verre dans un rayon de vingt mètres.
Pourquoi le verre ? Aucune idée.
Mais bon sang, c'est subjuguant, de recevoir autant de plaisir dans une même zone du corps. Chost est un génie des sensations ; il sait utiliser ma propre peau comme s'il la connaissait mieux que moi.
Et il s'autorise de plus en plus à être lui-même, à me montrer ce qu'il aime. Il ajoute à l'agilité de ses doigts, à la douceur de sa langue, et au respect de ses mains, des touches de douleur, d'autorité, d'emportement plus brut, qui me font vaciller et qui détruisent le mobilier du marbre sitkostique si sacré.
Chost communique bien mieux ainsi : quand il est en moi. Là, il me dit des milliers de choses. Et il m'assure, sans mot, sans besoin de parler une seule seconde, il m'assure qu'il est tombé amoureux de moi. A chaque coup de rein, Chosthovak grave des « je t'aime » dans mon bas-ventre.
Reprendre mes esprits, et la totale possession de mon corps a été long ; heureusement, il me tenait contre lui, caressait mes cheveux, et il murmurait des tendresses, s'opposant à la virulence de ses mouvements, quelques minutes plus tôt.
En rentrant à ma demeure, sur le trajet, je suis terrassée par une élémentaire question, si simple qu'elle en est insolente : qu'est-ce qu'on va devenir, lui et moi ?
Combien temps va-t-on pouvoir continuer ainsi, encore ?
En poussant la haute porte du manoir Sayag, j'en ai oublié que Nhils repose à l'étage. Cependant, l'accueil de James m'éclaire sur cette journée en mon absence :
— Il est rentré chez lui, lance-t-il en guise de bonjour, droit et sec au bas de l'escalier.
Je l'interrogerai bien sur son dialogue avec l'héritier, mais une autre Essence, elle aussi puissante, ainsi que douce, calme et gracieuse, brouille ma pensée un instant.
Sous l'alcôve, à gauche de James, l'élégante silhouette de Jacques Langlois apparaît. Je me demande de quelle couleur est son Essence ; bien que j'aie souvent perçu un lien avec celle des yeux, j'ignore si c'est une loi immuable.
La sienne serait chocolat, un marron teinté d'éclats noirs, et auburn.
Son visage de cinquantenaire apaisé me sourit. A côté de mon oncle, aux yeux noirs, cheveux noirs, costume noir, aura plus sombre encore, il a l'air de la lumière qu'on aurait fait entrer sans le savoir dans les Ténèbres.
— Bonsoir, Hélianne, salue-t-il d'une voix claire qui résonne dans le hall.
— Dem.
Je ne parviens toujours pas à croire que l'unique ami de mon oncle soit l'émérite Jacques Langlois. Lui avoir adressé la parole au Stikos était déjà un honneur. Mais le voir dans ma propre demeure me fige les jambes, je dois l'avouer.
— N'use pas de cérémonie, si tu le veux, bien sûr, répond-t-il à ma salutation. James, j'ai préparé le dîner. Assiette vide pour toi, tu me diras ce que tu en penses.
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La troisième Rive, tome II
FantasyTome 2 : La lumière du Grand C A présent, l'élite observe Hélianne Kahn d'un oeil nouveau. Mais si son nouveau statut auprès de la Régence lui assure un avenir radieux, son rôle dans le monde des Passeurs, lui, constitue encore une menace. Qui son...