Chapitre 4

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Ce ne fut qu'après un long moment d'absence que Bankotsu daigna revenir auprès du groupe qu'il avait fondé plus de deux cents ans auparavant. Il fallait bien savoir que la Bande des Sept n'avait pas ressuscité sans une aide extérieure, et que Bankotsu était le seul à avoir eu le privilège de rencontrer leur bienfaiteur. Et ce dernier ne les avait pas ramenés à la vie sans avoir pour eux un plus grand projet encore qu'il n'y paraissait.

Le jeune leader rassembla ses mercenaires à l'extérieur du manoir, dans le grand jardin abandonné de la propriété. Il préférait largement être au grand air que prisonnier entre quatre murs, et puisqu'il avait obtenu une seconde vie, il avait décrété qu'il ne ferait que ce qu'il lui plairait. Et sa vengeance était de ces plaisirs divins dont il ne pouvait se passer.

Bankotsu, assis en hauteur sur un vieux fourneau qui n'avait pas servi depuis plusieurs années, contempla un instant ses sept compagnons de voyages, installés dans l'herbe en face de lui.

D'abord, ses yeux bleus se posèrent sur Kyokotsu, que certains avaient surnommé « la Montagne » par le passé, dont la force physique était sans égale. Il témoignait toujours d'une cruauté sans faille dans son regard imprégné de sang, et ses dents toutes acérées pouvaient faire trembler le plus courageux des hommes. A côté de lui, le vieux Mukotsu, qui de ses vices avaient développés un talent insoupçonné dans l'art du poison, dissimulait encore son visage derrière un voile tout blanc. Contrairement à Kyokotsu, il était d'une si petite taille que c'en était ridicule. A sa gauche, Ginkotsu se tenait là, l'œil perdu dans le vide, le fixant néanmoins. Il était un ensemble d'artillerie lourde à lui tout seul, composé majoritairement d'armes en tout genre et de métal. Une véritable machine à tuer, au sens propre. Installé en tailleur à côté se trouvait Suikotsu, « le Diable », celui qui était craint pour son expression perpétuellement démoniaque, se battant comme une bête avec ses griffes de métal toutes aiguisées. Ensuite, son regard se porta sur Jakotsu, le premier à l'avoir rejoint dans cette histoire. Il était un ami de longue date, maniant son arme, un sabre enchanteur nommé Jakotsutô, comme personne, et grand passionné des beaux garçons dont il prenait un malin plaisir à torturer. Se tenant tout près de Ginkotsu, il y avait Renkotsu, que tous plaçaient derrière lui dans la hiérarchie du groupe. Il était assurément le plus intelligent. C'était un érudit, même, adepte de tout ce qui touchait de près ou de loin aux flammes. Ses yeux bleutés terminèrent cette maigre observation sur Shôkotsu, sa chère petite sœur, sa vie, son sang. C'était pour elle qu'il avait accompli de grande chose par le passé, et dans cette vie encore il s'était juré de la protéger. Elle était ce qu'il avait de plus précieux en ce monde.

- O-Aniki, commença Renkotsu avec un bref salut. Nous revoilà réunis.

- Ouais, acquiesça Bankotsu. Et cette fois-ci, plus personne ne devrait venir m'importuner.

- Alors tu vas rester avec nous ? s'enquit Shôkotsu.

Le jeune leader hocha la tête en fermant les yeux. Il se dégageait de lui un petit côté enfantin qui n'échappait à personne ici. Mais nul n'oubliait également qu'il était le plus fort d'entre eux. En cela ils l'écoutaient et le respectaient.

- O-Aniki, tu ne diras rien sur celui qui nous a ramené à la vie, n'est-ce pas ? demanda calmement l'érudit.

- Ecoute, Renkotsu... Nous sommes tous ensembles comme avant, et nous pouvons toujours tuer à notre guise. Cela ne te convient-il pas ?

- Si...

- Alors l'affaire est entendue.

L'on ne discerna pas le mouvement de mâchoire qui se fit lorsque Renkotsu serra les dents, et il ne laissa rien paraître de ce qu'il ressentait réellement. On passa tout simplement outre ce bref échange.

- Alors, Aniki, qu'allons-nous faire maintenant ? demanda Jakotsu en se laissant légèrement choir en arrière.

- Je veux prendre mon temps, et faire en sorte qu'ils s'enfoncent dans la peur, ricana Bankotsu avec un sourire cruel. Athéna regrettera de nous avoir coupé nos têtes.

Shôkotsu se crispa silencieusement face à cela. La guerre était déclarée contre les Chevaliers depuis le jour où ils avaient assaillis Athènes. Mais contrairement à son frère aîné et aux autres, elle n'en trouvait aucun plaisir. Mais elle cachait ses intentions et ses sentiments avec une certaine hardiesse, qui pourtant s'émoussait lentement à mesure que le temps passait.

- Je les laisserais ensuite tous baigner dans leur sang, ajouta-t-il sur le même ton.

- C'est si excitant, jubila Jakotsu en passant ses mains derrière la tête.

Ginkotsu émit un cliquetis approbateur à cela, tandis que Shôkotsu jouait nerveusement de ses petits doigts sans que personne ne le remarque.

- J'ai entendu dire que les Chevaliers étaient nombreux, déclara Renkotsu en prenant part à toute cette morbide gaieté.

- On peut tuer jusqu'à l'ennui qu'il en restera encore, ajouta Suikotsu avec un sourire moqueur.

Tous se confondirent d'hilarité. Shôkotsu y prenait part également, mais à l'intérieur elle souffrait de ce qui était en train d'arriver. Et malgré tous ses efforts pour le dissimuler, l'on ne doutait pas qu'un jour certains de ses frères allaient remarquer son conflit moral. Mais il valait mieux pour elle de garder tout cela secret, car même s'il y avait au sein de leur groupe une bonne entente, tous n'en restaient pas moins de terribles meurtriers sanglants.

- Ecoutez bien ce que j'ai à vous dire, déclara Bankotsu lorsqu'il eut reprit son sérieux. Tant que nous sommes dans l'enceinte de cette propriété, les Chevaliers ne pourront pas nous trouver.

- Par quel prodige ? s'étonna Renkotsu qui n'y trouvait pas d'explication rationnelle.

- De la même façon que leur Sanctuaire est protégé des intrus, tenta hasardement Shôkotsu.

- Ouais, à peu près, confirma le jeune leader. Mais si nous quittons les lieux, ils seront en mesure de nous voir.

- Voilà qui est bien étonnant... murmura l'érudit.

- Vous conviendrez bien sûr que nous ne resterons pas planqués ici ! s'esclaffa Bankotsu.

- Oh que non ! s'écria l'épéiste.

- Il est temps pour la Bande des Sept de frapper à nouveau. Alors, voilà ce que j'ai décidé, soyez attentifs... 

 

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Les Chroniques de la Guerre Sainte (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant