Chapitre 10

11 3 0
                                    

Dans le manoir qui les protégeait de tout assaut venant des Chevaliers, Bankotsu parcourait les couloirs, tout silencieux, sa hallebarde calée sur son épaule comme il aimait la positionner. Il préférait largement le grand air à l'enfermement, mais il devait bien reconnaître qu'il était agréable d'avoir un toit où dormir. Et, pour couronner le tout, même Kyokotsu pouvait aisément entrer à l'intérieur.

- Il n'a pas lésiné sur les moyens, commenta le jeune leader à voix haute.

Cependant, chaque fois qu'il passait devant une pièce, il ne pouvait s'empêcher de regarder ce qu'il y avait dedans. Non pas par curiosité, mais par nécessité. Néanmoins, il ne trouva nullement celle qu'il cherchait depuis déjà une bonne heure. Et il n'y avait personne à interroger non plus. Kyokotsu et Ginkotsu étaient partis pour l'Italie accomplir la mission qu'il leur avait confiée, de même que Suikotsu s'en était allé pour la Chine. Ne restaient plus que Mukotsu, Jakotsu et Renkotsu... Cependant, ces trois là étaient étrangement introuvables. Et plus il y pensait, plus il trouvait cela bien louche et suspicieux.

Serrant les dents pour contenir la rage qui montait en lui, Bankotsu décida de s'aérer. Il ne prit pas la peine de descendre les étages qu'il avait grimpés inutilement, et bondit d'une fenêtre pour atterrir violemment dans l'herbe. Là, il appela d'une voix forte sa petite sœur. Mais il n'obtint aucune réponse. Il s'attela ensuite à crier le nom de ses frères normalement restés avec lui, mais le résultat fut le même. Il jura, avant de donner un grand coup de son sabre dans le fourneau inutilisable, qui se retrouva détruit en mille morceaux sous sa puissance.

- Ils m'emmerdent... lâcha-t-il en serrant le manche de sa hallebarde.

- O-Aniki ! l'appela gaiement une voix pleine d'insouciance.

C'était Jakotsu, qui sortait des buissons qui entouraient le manoir, délimitant ainsi le grand jardin. D'un certain point de vue, il n'avait nullement quitté l'enceinte protectrice de la demeure, puisque le domaine s'étendait tout de même à quelques kilomètres au-delà de la bâtisse. Bankotsu obliqua vers lui, à la fois agacé et soulagé. Il remarqua que Mukotsu suivait l'épéiste de ses petits pas, son carquois débordant d'herbes et de fleurs qu'il destinait probablement à la concoction de ses poisons.

- Où est-elle ? demanda-t-il lorsqu'ils furent à portée de voix.

- Eh ? s'étonna Jakotsu en s'arrêtant à quelques pas de lui.

Il croisa les bras, paraissant réfléchir. Ses traits étaient légèrement crispés sous l'intensité de ses pensées, et il ne comprit qu'après un temps qu'il parlait de Shôkotsu. Alors il voulut répondre, mais le jeune leader le devança, en insistant sur ses interrogations :

- Elle est partie, n'est-ce pas ? Elle a quitté la barrière protectrice ?

- Ouais... marmonna l'épéiste en fronçant ses fins sourcils.

Jakotsu préférait être honnête avec leur grand frère. Leur amitié était plus forte que tout, et il se voyait mal lui mentir comme lui avait suggéré Renkotsu. Peut-être aussi que sa naïveté parlait pour lui ; il ne comprenait pas pourquoi il devait mentir, alors qu'il avait pourtant conscience du lien qui unissait Bankotsu et Shôkotsu. A partir de là, il n'était pas difficile de deviner la colère qui pouvait habiter l'aîné s'il apprenait que sa petite sœur courrait un grave danger.

- Où est-elle ? s'enquit à nouveau le jeune leader avec plus de sévérité.

Mukotsu préféra se tapir discrètement derrière Jakotsu. La colère de Bankotsu était redoutée de tous, seul Jakotsu ne la craignait pas, et l'on pouvait penser que cela était dû à leur profonde amitié, mais en réalité cela était surtout du fait de son insouciance continuelle. Au final, c'était cette même peur qui avait poussé Renkotsu à mentir à leur leader ; mais l'érudit ignorait où cette décision allait le mener.

- Je n'en sais trop rien... répondit l'épéiste en se frottant doucement la joue de son index. Renkotsu ne me l'a pas dit.

- Renkotsu ? s'étonna Bankotsu en fronçant les sourcils.

- Il m'a demandé de ne rien te dire, mais puisque tu l'as compris tout seul...

- Hé...

Les yeux de Bankotsu se plissaient davantage. Avec ce qu'on venait de lui apprendre, il ne pouvait que comprendre que Renkotsu était responsable de la fuite de sa chère petite sœur. Elle était désormais vulnérable face à tous ces Chevaliers qui rôdaient au dehors avec la volonté de les renvoyer dans leur tombe.

- Et lui... Où est-il ? murmura-t-il en se retournant.

- Renkotsu ? Il est parti à la recherche de Shôkotsu.

- Alors, c'est comme ça... ricana le jeune leader.

A priori, les choses étaient différentes de ce qu'il avait d'abord pensé. Néanmoins, Bankotsu éprouva une grande colère contre son frère mercenaire. Si Renkotsu avait si bien comprit que Shôkotsu avait quitté la barrière protectrice du manoir, alors il aurait dû venir l'en alerter tout de suite au lieu de le lui cacher, et d'agir seul. Mais Renkotsu était un malin qui réfléchissait trop, à son sens. Il avait bien l'intention de lui faire comprendre qu'il était le seul qui pouvait protéger sa petite sœur. Sans doute était-il très possessif, trop même... Mais il gardait en tête que sa sœur était une lumière de douceur et de vertu, qui suivait inlassablement sept meurtriers à l'âme ternie, dont lui-même faisait partie. Oui, Bankotsu connaissait la véritable nature de Shôkotsu. Il était le seul de la bande à discerner sa pureté, puisque même dans leur enfance elle était ainsi, et cela ne faisait qu'accentuer ses instincts protecteurs vis à vis d'elle.

Le jeune leader tapota légèrement la lame de sa hallebarde, avant d'en caller le manche contre son épaule. Il ne pouvait actuellement qu'espérer que sa chère petite sœur allait bien. S'il lui arrivait quoique ce soit...

- Aniki... Regarde !

Jakotsu désignait deux silhouettes qui se dessinaient. Bankotsu tourna légèrement la tête, et constata qu'il s'agissait de Kyokotsu et de Ginkotsu. Il esquissa un maigre sourire, en se disant qu'enfin leur tâche était accomplie ; l'orphelinat était donc détruit. Il ne manquait à présent plus que Renkotsu, Suikotsu et Shôkotsu pour que la Bande des Sept soit au complet... Alors ils attendraient encore un peu avant de frapper encore un plus grand coup. Ils ne s'arrêteraient que lorsqu'Athéna aura suffisamment payé le prix de leur décapitation.  

  

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.
Les Chroniques de la Guerre Sainte (Tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant